Face au mal qui se répand dans une Amérique marquée par la Première Guerre mondiale et déchirée par le racisme et la ségrégation hérités de la guerre de Sécession, Maryse Boudreaux combat les monstres qu'elle appelle des « Ku Kluxes », armée d'une épée ensorcelée capable de canaliser la magie des dieux africains ancestraux à travers les chants vibrants de colère et de souffrance des esclaves morts. Secondée par Cordelia Lawrence, alias Chef, vétérane de la Grande Guerre férue d'explosifs, et Sadie, une métisse virtuose de la gâchette venue d'Alabama, Maryse s'emploie avec succès à combattre ces aberrations.
Jusqu'à l'arrivée de leur général, Clyde le Boucher.
Non content de continuer à propager le mal en profitant de la haine des suprémacistes, la créature multiple cachée derrière une façade humaine tente de corrompre Maryse et d'invoquer une monstruosité suprême (qui n'est pas sans rappeler les Grands Anciens de Lovecraft). La jeune femme devra louvoyer entre cauchemars et réalités, afin de trouver l'appui nécessaire pour vaincre ses démons intérieurs tout autant que les Ku Kluxes.
Ce roman court évoque avec douleur les atrocités infligées par l'esclavage, la haine et le racisme.
Dans cette fresque linguistique et culturelle, à la fois immersive et érudite, P. Djèlí Clark donne la parole aux communautés afro-américaines, et notamment gullahgeechee.
Malgré l'horreur - réelle ou fantastique -, les personnages ne cèdent jamais au fatalisme. L'espoir, infusé par la lutte, est le ciment de l'amour que se portent ces femmes.
LES TAMBOURS DU DIEU NOIR.
À La Nouvelle-Orléans, devenue un territoire neutre cerné par une guerre de Sécession interminable, Jacqueline ne rêve que d'une chose : laisser derrière elle sa vie de pickpocket afin d'explorer le monde à bord d'un dirigeable. Pour cela, l'adolescente doit gagner la confiance de la capitaine Ann-Marie St Augustine, une contrebandière créole. En guise de monnaie d'échange, Jacqueline détient une information capitale : des confédérés cherchent à acheter une arme mystérieuse et dévastatrice appelée les « Tambours du dieu noir » auprès d'un scientifique haïtien.
Jacqueline, Ann-Marie et l'équipage de son dirigeable embarquent dans une mission périlleuse visant à récupérer les Tambours du dieu noir et à empêcher l'annihilation de La Nouvelle-Orléans.
Dans cette uchronie qui imagine une Nouvelle-Orléans indépendante, des Caraïbes autonomes et des États-Unis démantelés, P. Djélì Clark nous entraîne dans une intrigue palpitante au coeur du bayou, où s'affrontent tant les intérêts politiques que les desseins personnels. Les personnages féminins dominent au sein de la multiplicité des cultures qui cohabitaient - et cohabitent encore - dans cette contrée forgée au fil des brassages de populations.
L'étrange affaire du djinn du Caire.
Posons tout d'abord le décor : au XIXe siècle, l'alchimiste et mystique al-Jahiz bouleverse l'histoire de l'Égypte en ouvrant une brèche vers le royaume des djinns, permettant ainsi à la magie de se frayer un chemin dans notre monde.
Grâce à ces créatures mythiques et à leurs merveilles mécaniques, l'Égypte parvient à gagner son indépendance, à chasser les colons britanniques et français de son territoire et à s'imposer parmi les puissances de premier plan.
La nouvelle débute au Caire - désormais une plaque tournante sillonnée de dirigeables et de tramways aériens - en 1912. L'agente spéciale Fatma el-Sha'arawi, missionnée par le ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles, doit mener une enquête délicate : on a retrouvé le cadavre d'un djinn majeur parmi les plus puissants des immortels. Tout porte à croire qu'il se serait suicidé, mais Fatma, suivant son instinct, refuse de s'en tenir à cette conclusion et finit par mettre au jour une machination de grande ampleur orchestrée par un Ange, une de ces étranges créatures surgies à la suite des djinns et dont nul ne sait rien.
À travers son uchronie aux subtiles nuances steampunk et lovecraftiennes, P. Djélì Clark donne la parole à une Égypte forte de son héritage mythologique et de son folklore ancestral.
Le Caire, 1912. Vêtue d'un complet trois pièces - un ensemble blanc du plus bel effet sur sa peau cuivrée -, Fatma lisse sa cravate couleur d'or en veillant à exhiber les boutons de manchette scintillant aux poignets de sa chemise bleu nuit. Puis elle pose son chapeau melon sur sa courte crinière bouclée.
Oui, Fatma el-Sha'arawi est une redoutable sapeuse. C'est aussi une énergique et compétente enquêtrice du ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Et la voici en charge de l'assassinat collectif de la Fraternité d'al-Jahiz par un inconnu qui se prétend... al-Jahiz lui-même, le puissant mystique qui a ouvert la porte de l'Égypte à la magie et aux djinns cinquante ans plus tôt.
Imposture ? Ça ne fait aucun doute pour Fatma. Mais encore faut-il identifier et traquer ce mystérieux terroriste que des pouvoirs inouïs rendent, semble-t-il, invulnérable. Une enquête à tiroirs à l'issue de quoi on dirait bien que notre héroïne devra encore sauver le monde.
Avec Maître des Djinns, Phenderson Djèlí Clark signe son premier roman et nous entraîne au coeur d'une Égypte uchronique flamboyante.
Une novella où nous retrouvons cette Égypte émancipée du début du XXe siècle, où les hommes côtoient la magie et les djinns, qui est aussi le théâtre de L'Étrange Affaire du djinn du Caire (paru en avril 2021).
Qui dit nouvelle histoire, dit nouvelle enquête et nouveaux agents du ministère de l'Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. L'agent Hamed Nasr et son partenaire fraîchement sorti de l'académie, l'agent Onsi Youssef, sont chargés d'un banal cas d'apparitions. Pas d'une maison hantée cette fois-ci, mais d'un tramway...
Et la créature, qui prend tantôt les traits d'une fillette innocente, tantôt ceux d'une monstrueuse harpie, leur tient tête. Aux prises avec les luttes de pouvoir administratives, les batailles de financements et le manque de budget, Hamed et Onsi vont recevoir une aide insoupçonnée :
Celle d'une étrange serveuse nubienne dénommée Abla (répondant aussi au doux nom de Siti...), mais aussi d'une cheikha assistée d'une automate hors du commun, ainsi que d'une vieille marchande de poupées, qui leur apprendront chacune à dépasser leurs préjugés et leur montreront que la clef de leur enquête se trouve dans les légendes et la magie populaires.
Dans son récit, Clark s'appuie sur la culture égyptienne et sur la dualité réelle qui existe entre ville et campagne, entre tradition et modernité encore aujourd'hui. Hamed et Onsi en sont d'ailleurs les incarnations, l'un représentant plutôt la tradition, l'expérience, un certain archaïsme de pensée, malgré une volonté d'évolution, et l'autre illustrant la fougue un peu naïve d'une jeunesse lettrée.
Grâce à des personnages féminins forts et à un arrièreplan de revendication sociale et politique avec la lutte des suffragettes, l'auteur interroge sur la place de la femme et sur sa représentation mentale dans la société. Il remet en question - ouvertement quoique avec finesse - un patriarcat finalement mis en échec. La solution vient des femmes et de leur savoir - de leur magie ? - qu'on aurait tort de négliger.