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François Bégaudeau
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« Ce qui doit être tu au tribunal sera dit dans un livre. Nos livres sont infiniment plus audacieux que nous parce que tel un hold-up ils se mijotent à l'abri des regards. Parce qu'une fois achetés et vaguement lus, ils finissent sur une étagère, offerts au regard mais fermés, impénétrables, contenu dérobé, impossible de savoir ce qui se trafique à l'intérieur. »
Un jour de mai 2020, François Bégaudeau échange avec des camarades, sur son site à la fois personnel et public. Il commet, ce jour-là, une phrase qui lui vaudra de comparaître en justice pour diffamation à caractère sexiste et sexuel.
Ça, ce sont les faits.
Ces faits sont l'occasion pour l'auteur d'Entre les murs et d'Histoire de ta bêtise de mener un travail d'auto-analyse et un examen profond de nos contradictions contemporaines. Une fronde railleuse qui laisse place à une réflexion sur nos affects, l'art et la politique. -
J'ai voulu raconter l'amour tel qu'il est vécu la plupart du temps par la plupart des gens : sans crise ni événement. Au gré de la vie qui passe, des printemps qui reviennent et repartent. Dans la mélancolie des choses. Il est nulle part et partout, il est dans le temps même. Les Moreau vont vivre cinquante ans côte à côte, en compagnie l'un de l'autre. C'est le bon mot : elle est sa compagne, il est son compagnon. Seule la mort les séparera, et encore ce n'est pas sûr. F. B.
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«Ne rien dire, ne pas s'envoler dans le commentaire, rester à la confluence du savoir et de l'ignorance, au pied du mur. Montrer comment c'est, comment ça se passe, comment ça marche, comment ça ne marche pas. Diviser les discours par des faits, les idées par des gestes. Juste documenter la quotidienneté laborieuse.» Entre les murs s'inspire de l'ordinaire tragi-comique d'un professeur de français. Dans ce roman écrit au plus près du réel, François Bégaudeau révèle et investit l'état brut d'une langue vivante, la nôtre, dont le collège est la plus fidèle chambre d'échos.
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Une famille n'est jamais autant une famille qu'en vacances. En vacances on voit sa peau.Durant leur congé estival à Royan, les Legendre sont très performants : la mère excelle en communication de crise, la petite en piano, et le père en running. Sa montre GPS compte ses pas. Chaque jour davantage de pas. Cette famille de la bourgeoisie parisienne est en croissance.Seul le petit dernier tarde à performer. Tarde à apprendre à lire. Ou refuse d'apprendre. Il fait peut-être de la résistance passive. Sur une plage, il creuse un trou pour l'évasion.
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Du libéralisme aux algorithmes, en passant par le burnout, les transclasses et la trottinette, François Bégaudeau livre, à travers les maîtres mots de l'époque, une analyse implacable de l'idéologie bourgeoise. « Plus c'est plus gros, plus ça passe, dit-on, et cela ne vaut pas pour mes bonimenteurs. Comme l'ordre syllabique l'indique, le bonimenteur n'est qu'à moitié menteur. Un boniment, pour prendre, doit être un peu vrai. Il est un peu vrai que cet écran plat est plat, et plus léger - le portant je le vérifie -, et plus confortable pour les yeux - rivé à lui je suis confort. La langue du capitalisme intégré est toujours un peu vraie. Il est un peu vrai que nous autres sujets des régimes capitalistes paradigmatiques sommes libres de nos mouvements. Il est un peu vrai qu'un télétravailleur peut disposer de ses horaires. Il n'est pas archi-faux que nos élections sont démocratiques. Les marchands ne mentent pas complètement en disant qu'ils créent de la valeur ou créent de la richesse. Ils devraient juste préciser que cette richesse leur revient. La langue du capitalisme ne doit pas être démasquée, elle doit être passée au crible implacable de la précision. »
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S'adressant à l'électeur d'Emmanuel Macron, François Bégaudeau fait la somme des aveuglements qui le font se prendre pour un progressiste de pointe là où il n'est qu'un conservateur de base.
Tu es un bourgeois. Mais le propre du bourgeois, c'est de ne jamais se reconnaître comme tel.
Petit test : tu votes toujours au second tour des élections quand l'extrême droite y est qualifiée, pour lui faire barrage. Par conséquent, l'abstention te paraît à la fois indigne et incompréhensible. Tu redoutes les populismes, dont tu parles le plus souvent au pluriel. Tu es bien convaincu qu'au fond les extrêmes se touchent. L'élection de Donald Trump et le Brexit t'ont inspiré une sainte horreur, mais depuis lors tu ne suis que d'assez loin ce qui se passe aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Naturellement tu dénonces les conflits d'intérêts, mais tu penses qu'en voir partout relève du complotisme. Tu utilises parfois (souvent ?) dans une même phrase les mots racisme, nationalisme, xénophobie et repli sur soi. Tu leur préfères définitivement le mot ouverture.
Si tu as répondu oui au moins une fois, ce livre parle de toi. Prends le risque de l'ouvrir.
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« Après un débat, il y a toujours un débat. C'est ce qui arrive à Lyon à François Bégaudeau, écrivain, essayiste et réalisateur. Des admirateurs, du moins se présentent-ils ainsi, lui proposent de prolonger autour d'une bière. Après les premiers échanges, l'auteur se rend vite compte qu'il a affaire au camp d'en face. » Ouest-France François Bégaudeau est l'auteur de romans, parmi lesquels Entre les murs (Folio, 2007), La blessure la vraie (Folio, 2012), En guerre (Folio, 2020), et d'essais comme Histoire de ta bêtise (Pluriel, 2021) et Comment s'occuper un dimanche d'élection (Divergences, 2022).
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Dans une France contemporaine fracturée, un ouvrier, Cristiano Cunhal, est licencié par l'usine dans laquelle il travaillait depuis quinze ans. Peu après avoir découvert les échanges érotiques de sa compagne, Louisa, et de son amant, Romain, il décide de s'immoler par le feu. Dès lors, chacun s'interroge sur les causes réelles de son acte. Poussés par la mauvaise conscience, Louisa, la prolétaire kabyle, et Romain, le bobo trentenaire, vont chercher par tous les moyens à venger l'honneur déchu de l'ouvrier sacrifié. En guerre questionne avec une rigueur implacable les déterminismes socioculturels d'un scandale lié au monde du travail qu'on pourrait ranger dans un registre purement passionnel. François Bégaudeau propose une fresque documentée d'une France fracturée, en autopsiant l'histoire d'amour utopique entre deux êtres issus de mondes qui n'auraient pas dû se croiser.
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« La question de voter ou non ne porte aucun enjeu.
Je suis un abstentionniste non prosélyte. Je ne fustigerai pas un votant, pas plus que je ne tiendrai un non-votant pour un camarade. Le vote ne devient un sujet que si les votants en font un sujet. C'est souvent le cas. Nombre de votants aspergent de sermons les non-votants, taxés d'incivisme, d'irresponsabilité, d'immaturité, d'individualisme. Les non-votants manquent à leur devoir de citoyens. Ils galvaudent la souveraineté politique qui leur a été gracieusement offerte par la démocratie. C'est ici qu'on est soudain tenté d'entrer dans le débat. De montrer aux électeurs ce qu'ils font quand ils élisent. D'observer qu'alors ils font tout sauf de la politique. » FB François Bégaudeau est l'auteur de romans, parmi lesquels Entre les murs (Folio, 2007), La blessure la vraie (Folio, 2012), En guerre (Folio, 2020), et d'essais comme Histoire de ta bêtise (Pluriel, 2021) et Notre joie (Pluriel, 2022). -
« L'idée cheminait en moi que quelque chose s'était passé en 86 dont je n'étais jamais revenu. Je commençai à me repasser cette année, sautillant entre les trous de mémoire. Finalement la rétrospection se resserra sur l'été, puis, au sein de cet été, sur la dizaine de jours de juillet qui avaient culminé dans de drôles d'événements, jamais oubliés mais que je ne croyais pas si fondateurs. Je décidai de raconter tout, jour après jour, heure par heure presque. On verrait bien. On verrait mieux, peut-être, ce qui là-dedans avait conditionné la suite ». François Bégaudeau a choisi de revenir loin en arrière, au coeur de l'été 1986 en Sud-Vendée. Il a alors quinze ans, un âge critique à bien des égards, celui des orgueils démesurés et des failles béantes, celui d'un adolescent prêt à toutes les métamorphoses. Comme chaque année depuis que sa famille s'est installée à Nantes, il passe ses vacances à Saint-Michel-en-l'Herm, une bourgade en rase campagne, mais proche des campings du bord de mer. Deux milieux aux antipodes, deux terrains de jeu familier pour le jeune narrateur en mal d'aventures concrètes. L'ado a déjà échafaudé son programme : trouver la fille qui voudra bien le déniaiser. Pressé de s'émanciper, il échafaude des stratégies, mise sur plusieurs tableaux, joue de malchance, avant d'entamer enfin une romance imprévue, la vraie, avec Julie, qui va changer ses plans et libérer en lui une sentimentalité poétique inattendue. Mais c'est sans compter sur les détours accidentels et contretemps malheureux qui vont compliquer son drolatique et douloureux apprentissage amoureux. Arrive le bal fatidique du 14 juillet, où tout va s'accélérer à tort et à travers. Provocations perverses, meurtre par imprudence, bitures en série. l'esprit embrumé du jeune Nantais n'arrivera plus à sortir de ce cauchemar éveillé. Dès lors, c'est la vitesse à l'état pur qui mène la danse : l'été en pente raide, la mort aux trousses, l'adolescent qui court à sa perte, une nuit sans fin, celle de tous les dangers, ou peut-être un gigantesque canular ayant très mal tourné ? Qui saura distinguer le vrai du faux et dire ce qui s'est réellement passé cet été 86 ? Et pourquoi le rire rétrospectif du narrateur révèle encore en lui une plaie à vif, vingt-cinq ans plus tard ?
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Finale de la Coupe d'Europe de football... À la fin de la deuxième mi-temps, juste avant les prolongations, un entraîneur livre d'ultimes conseils à ses joueurs et les exhorte à «jouer juste». Mais entre franc-parler et digressions métaphysiques, ce discours déborde son sujet, et vient bientôt s'immiscer le récit d'un amour passé avec une certaine Julie. Chorégraphies amoureuse et sportive sont liées plus qu'on ne le croit. Dans ce premier roman atypique, François Bégaudeau a su habiter une parole à la fois artificieuse et fébrile, badine et hallucinée. Le lecteur est emporté dans une logorrhée verbale, dont les à-côtés comiques redoublent le vertige mental, qui révèle les failles et les aveuglements de ce narrateur donquichottesque.
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Annecy, automne 1995. Jeanne Deligny, 44 ans, infirmière, est retrouvée morte sur le palier de son appartement, égorgée d'un coup de cutter.
Ce crime n'ayant aucun motif apparent, l'enquête piétine, jusqu'à la découverte d'une pièce à conviction qui permet de retrouver la trace d'un suspect.
S'inspirant de ce fait divers, François Bégaudeau n'en a conservé que les grandes lignes : la configuration du crime, son motif, et surtout l'ancrage des protagonistes dans un quotidien ordinaire. Au suspense qui sous-tend cette intrigue criminelle s'ajoute l'attention minutieuse portée à l'intériorité de personnages quelconques (enquêteurs, témoins, assassin, journalistes, proches de la victime, jurés), soudain révélés dans leur complexité moléculaire. Sans prétendre lever le mystère de leur passage à l'acte, ni distinguer le fautif de l'innocent, François Bégaudeau souligne le décor mental de ces années 90 ou les routines illogiques de l'appareil judiciaire.
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Ça s'ouvre sur un cadavre, livré par le narrateur à la «trop douce» Juliette. Elle qui d'habitude explique et guérit tout ne comprend pas. Comment l'étudiant bien éduqué qu'elle a aimé dix ans plus tôt en est arrivé là ?Il va raconter. Il y passera la nuit s'il le faut. Il parlera cru.Le prof de fac jadis humaniste va décrire un enchaînement nécessaire de faits arbitraires survenus à l'université de M., où victimes et bourreaux permutent, où le vengeur tombe dans la trappe qu'il a creusée. Où l'arroseur finit comme on sait.Il voulait jouer avec le pire de l'époque, avec la dinguerie survoltée des réseaux sociaux, avec la concupiscence vernie de morale. Il était autant le jouet que le joueur, autant la plaie que le couteau.Et maintenant il en rit.
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"La France des années 70 est un banquet gaulois où l'on boit et mange en parlant fort sous le regard magnanime de nos hommes politiques punaisés au mur comme on place un patriarche en bout de table.
Moi je suis à l'autre bout, disposé à imiter ce qui passe, à devenir un adulte comme ceux qui me nourrissent, me servent des grenadines, me reprennent si je jure, me déposent à l'école publique. Bientôt je prendrai leur place, puis celle du patriarche. Une vie se sera passée et dedans il y aura eu de la politique, dès le début et jusqu'à la fin.
Elle ne s'est pas passée comme ça." Ni manuel de conduite, ni texte prosélyte, ni justification complaisante, ni examen de conscience, ni autoportrait générationnel, Deux singes ou ma vie politique emprunte à l'ensemble de ces registres, tout en les détournant de leurs lieux communs.
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Un conflit familial vu à travers le regard incisif de l'auteur d'Entre les murs dans une courte pièce où l'action se déroule en temps réel. + Une interview exclusive de l'auteur en fin d'ouvrage !
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«Quand on couche pas, même si on est convaincu que ça avance à rien, animal triste et tout, eh bien on est angoissé, assez connement je dois dire mais voilà. Alors on essaie de trouver des plans, avec même de l'amour des fois, ce qui complique les choses, ou au contraire ça les simplifie, enfin faut voir, il y a un peu de tout dans ce dossier-là.» Selon un subtil désordre chronologique, ce roman à épisodes brouille les pistes de l'existence de Jules, amateur de plans improbables, journaliste sportif et célibataire intermittent. De malentendus jouissifs en gags à répétition, l'auteur tient la chronique de ses aventures et fiascos parmi une dizaine de trentenaires des deux sexes. À moins que ce jeu de rôles archi-contemporain n'implose in extremis, pour s'ouvrir à une fantaisie sentimentale, assumée dans toute sa douceur.
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« La littérature ne forme pas une famille harmonieuse réunie par une mamie centenaire. Quand bien même on aurait tout le monde à table, y compris Cendrars toujours en vadrouille, ça grimace, ça se taquine, ça se frictionne, ça se frottouille. Bernanos insulte Diderot qui fait des oreilles de lapin à Mme de Staël qui drague Baudelaire qui a encore vomi.
T'as dit littérature, t'as rien dit. »
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Jésus, les bourgeois et nous ; entretien avec Paul Piccarreta
François Bégaudeau
- L'Escargot
- 15 Octobre 2020
- 9782380740073
Un témoignage exceptionnel de François Bégaudeau sur sa foi
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«La vérité, c'est que Mick Jagger est né en 1960 et mort en 1969. Né au printemps 60, et mort le 6 décembre 69. C'est précis, c'est daté, c'est du document, ça se vérifie dans mes registres. Vous ne le saviez pas, moi je le sais. Sur Mick Jagger je sais tout. Rien lu rien étudié, compulsé nulle archive, dépoussiéré nul cadastre, déterré nulle relique, je sais tout. Et d'abord ceci : qu'il est né en 1960 et mort en 1969. Et je dirai comment. Comment il vécut, comment il est mort.»
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Liberté, égalité, fraternité : notre devise n'est-elle pas la plus belle, la mieux rythmée, mais surtout la plus audacieuse, la plus moderne, celle qui montre la voie à l'humanité ?
Missionné par la République auprès des « jeunes » pour redonner sens à la légende nationale, un homme s'exerce à faire résonner son discours. Guidé par une coach hyper motivée, il s'interroge : Quel est le « socle moral » de notre République ? Justement en ces temps de crise civique, où en est-on ? La liberté, est-ce faire ce que l'on veut ? À quoi sert l'égalité ? Et la fraternité dans tout ça ?
Cette joute oratoire portée sur le discours politique nous rappelle surtout qu'en démocratie, c'est par la dispute que le sens se construit.
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En tout cas t'aurais détesté qu'un prof vienne te faire un sermon là-dessus. Tu l'aurais traité de bourgeois et tu te serais bouché les oreilles.
T'aurais détesté qu'un adulte vienne t'expliquer la vie. T'aurais détesté qu'on te prenne pour un crétin marabouté par Internet.
Stéphane est professeur d'histoire. Supposé bien connaître les jeunes, il est diversement sollicité au sujet du soupçon de radicalisation qui plane sur eux. Au cours de trois face-à-face - avec un adolescent, un journaliste et un auteur dramatique -, il tente sans succès de répondre aux attentes des uns et des autres. Piégé par ce sujet toxique, son besoin de fuir devient vital.
Création du 06 au 18 juin 2017 au Théâtre Paris-Villette, dans une mise en scène de Valérie Grail.
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Mes chers amis, nous venons au-devant de vous ce soir, parce que nous avons connu cet égarement. Comme vous nous croyions résoudre le réchauffement climatique en achetant des parasols. Ou nous consoler d'un deuil en avalant une pizza. Comme vous, nous nous sommes mépris sur la cause de nos maux ; comme vous nous avons ignoré la cause des causes.
Et puis nous avons vu la lumière. Nous avons cessé de croire.
Mesdames messieurs, bienvenue dans La Bonne Nouvelle.
Façon talk-show live-tweeté, confessions intimes, conférences powerpointées, sketchs et karaoké, trois hommes et trois femmes bien nés, bons élèves, winners du capitalisme mondialisé ou supertechnocrates, racontent leur désamour d'un système auquel ils ont dédié leurs plus belles années. Qu'est-ce qui les a tant séduits dans le capitalisme ? Qu'est-ce qui les a fait changer ?
Création en 2016, dans la mise en scène de Benoît Lambert.
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Revue L'Avant-scène théâtre n.1458 : le lien
François Bégaudeau
- Avant-Scene Theatre
- Revue L'avant-scene Theatre
- 15 Février 2019
- 9782749814407
Stéphane, écrivain, rend visite à sa mère Christiane. Celle-ci se réjouit de sa visite mais le noie pendant tout le déjeuner dans un monologue qui semble ne pas le concerner. Il en déduit que sa présence est inutile et s'apprête à partir. Le ton monte. Il lui reproche en sous-main de ne pas s'intéresser à sa vie. Elle prétend s'intéresser à lui plus qu'à sa vie. L'incompréhension semble irrésoluble, jusqu'à l'arrivée de la voisine.
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François Bégaudeau, écrivain, rend compte ici, à sa manière, de la tournée promotionnelle d'un auteur, alias lui-même. Il énumère les étapes obligées de l'écrivain lors de la sortie d'un ouvrage : émission de radio, salon ou foire du livre, plateau télévisuel, séance photo, intervention en bibliothèque, signature en librairie, etc. Il donne ainsi à voir un vaste échantillon des lieux et cas de figure qui attendent ce VRP de son propre livre : entre parcours du combattant, traversée du désert et quiproquo déceptif. Si certaines situations prennent l'allure d'un gag, il s'agit moins de moquer les travers du microcosme parisianiste ou des professionnels de la culture que de mettre à nu les rouages d'une machinerie culturelle globale qui, au gré des flux de produits interchangeables, semble condamnée à faire l'impasse sur la confrontation aux textes eux-mêmes.Dans une deuxième partie, l'auteur décide de sortir de sa réserve, répond à côté, fait l'idiot ironique, torpille les débats biaisés, bref cesse de jouer le jeu de la comédie littéraire. Autant de joutes verbales qui, brisant le moule des conversations standardisées, ne cèdent pas aux règlements de compte personnels mais produisent un théâtre burlesque de l'absurde où chacun reconnaîtra une part de vérité.Enfin, nous voici transportés en 2023. Jouant sur les codes du roman d'anticipation, François Bégaudeau imagine une société française où les îlots de vie communautaire d'une jeunesse altermondialiste auraient gagné du terrain. Et c'est là, dans ces zones d'expérimentation coopérative que le narrateur se surprend à découvrir les échanges intellectuels que rend soudain possible un monde libéré des rivalités commerciales. Une façon pour l'auteur de dépasser la déploration ou la résignation en réaffirmant, à travers cette marge d'utopie, que le meilleur moyen d'interroger le rôle politique de l'intellectuel reste la fiction.