Ces Confrontations avec l'histoire sont une suite de questions adres-sées à l'histoire, celle des historiens comme celle qui a incarné la marche du monde moderne : l'Histoire. Plus d'une fois, elle a été interpellée, critiquée, récusée par des auteurs qui ne sont pas des historiens de métier et que François Hartog nomme des outsiders. En Occident, le premier d'entre eux, Aristote, a donné l'avantage à la poésie. Ces grands outsiders ont, ici, pour nom Char, Camus, Sartre, Lévi-Strauss, Barthes, Foucault, Michon.Confrontations aussi avec des concepts majeurs que l'histoire n'a cessé au cours des siècles de convoquer et de remodeler (l'altérité, l'accélération, l'héritage et la dette, le simultané du non-simultané).Confrontationsenfin avec le présentisme : la place prise par la mémoire, les transformations du musée, la montée du patrimoine, l'actualité des ruines, en questionnant l'histoire, l'obligent à se repenser. Quel peut être le rôle de celle qui s'est voulue la régis-seuse du temps, quand Chronos semble plus que jamais échapper à toute prise ?
Loin d'être uniforme et univoque, le présent présentiste se vit très différemment selon la place qu'on occupe dans la société. Avec d'un côté, un temps des flux, de l'accélération et une mobilité valorisée et valorisante, de l'autre, du côté de ce que le sociologue Robert Castel a nommé le « précariat », un présent en pleine décélération, sans passé - sinon sur un mode compliqué (plus encore pour les immigrés, les exilés, les déplacés), et sans vraiment de futur non plus (le temps du projet ne leur est pas ouvert).
Le présentisme peut ainsi être un horizon ouvert ou fermé : ouvert sur toujours plus d'accélération et de mobilité, refermé sur une survie au jour le jour et présent stagnant. À quoi il faut encore ajouter une autre dimension de notre présent : celle du futur perçu, non plus comme promesse, mais comme menace. Celle d'un temps des catastrophes dont nous sommes nous-mêmes les instigateurs.
F. H.
«La Grèce antique est la plus belle invention des temps modernes», écrivait Paul Valéry. Son héritage, si longtemps placé au coeur de la culture européenne, est fait de multiples voyages vers un objet façonné et refaçonné au fil des siècles. De quelles significations la Grèce a-t-elle été successivement porteuse, à Rome, au Moyen Âge, à la Renaissance et depuis la Révolution française? De quelles manières a-t-elle aidé à définir les identités culturelles ou nationales, la démocratie, l'histoire? Et quel sens peut-il y avoir, aujourd'hui encore, à «partir pour la Grèce»?
Par une réflexion lumineuse qui nous conduit d'Hérodote à Jean-Pierre Vernant, en passant notamment par Plutarque, Montaigne ou Fustel de Coulanges, François Hartog permet de comprendre l'émergence et les transformations de ce repère majeur de la pensée occidentale qu'on appelle la Grèce.
Réflexion sur l'évolution du concept d'histoire, en s'interrogeant sur sa signification et son sens, avec une comparaison entre le XIXe siècle, où l'histoire était perçue comme une science, et le début du XXIe siècle, où elle est entrée dans l'ère du soupçon.
Régulièrement la postérité instruit le cas hérodote : est-il ethnographe ou historien ? est-il l'historiographe d'un prince ou d'une cité ? s'il est le père de l'histoire, pourquoi ment-il alors comme ne saurait le faire un historien ? les histoires- couramment appelées l'enquête - et la longue suite de leurs interprétations sont un miroir oú l'historien n'a jamais cessé de regarder, en fait de s'interroger sur sa propre identité et sur sa propre activité.
Qui est-il, lui aussi ? mais miroir s'entend aussi en d'autres sens. parlant des barbares, les histoires sont ce miroir en négatif tendu aux grecs. ainsi les scythes, nomades étonnants pour des grecs, hommes de la cité. manière de revenir, grâce à eux, sur la question de l'ethnographe et de l'historien. le miroir, c'est encore la représentation du monde et du passé proche qu'hérodote construit : parcourant et racontant le monde, à la fois rhapsode et arpenteur, il le met en ordre dans un espace grec du savoir.
Manière donc, à partir du texte même de l'oeuvre, de reprendre la question de la place de l'historien et de son pouvoir.
L'histoire semble aller de soi. Depuis Hérodote, elle est une affaire d'oeil et de vision. Voir et dire, écrire ce qui s'est passé, le réfléchir comme un miroir : tels ont été quelques-uns des problèmes constituant l'ordinaire de l'historien. Les nombreuses reformulations modernes ont poursuivi ce travail sur la frontière du visible et de l'invisible, avec l'ambition de parvenir à la vue réelle des choses, en voyant plus loin et plus profond. Mais, avec la fin du XXe siècle et la domination du présent, cette forte évidence de l'histoire est mise en question. Quel rôle revient désormais à l'historien face au « défi narrativiste », à la montée du témoin, à celle du juge, et alors même que mémoire et patrimoine sont devenus des évidences ?
La généalogie du concept ancien d'histoire est esquissée ici par les textes, que ce soit ceux des historiens eux-mêmes (préfaces) ou d'autres textes importants dans la longue histoire de l'histoire. Ainsi, comment devenir Hérodote quand on a pour modèle Homère ? Comment Thucydide écrit-il à partir de et contre Hérodote, et comment Polybe s'essaye-t-il à retourner et à remettre sur leurs pieds les propos d'Aristote sur l'histoire et la tragédie ? D'Hérodote à Augustin, en passant par Cicéron et Tite-Live, on comprendra pourquoi le même mot n'a pas recouvert exactement la même marchandise.
Un glossaire accompagne chaque chapitre. Le lecteur y trouvera un vaste choix de notions et la présentation des thèmes, qui forment comme la trame du discours historique antique.
De 1830 à 1930, du programme de guizot et de thierry aux débuts des annales de bloch et febvre, au milieu des ces années vit et écrit un grand historien : fustel de coulanges, l'auteur de l'inoubliable cité antique.
Libéral selon ses dires mais en rupture avec les illusions de la révolution française ; référence, après sa mort, de l'action française ; soucieux de méthode et de science, mais en marge de la nouvelle sorbonne républicaine ; historien de l'antiquité mais plus prolixe encore sur la france de son temps, comme en témoignent les textes rassemblés par françois hartog. fustel est décidément un " cas ". a travers lui, c'est toute l'historiographie du xixe siècle qui est réinterrogée et le malaise même de l'historien à l'âge de la science mis au jour.
"Ô muse, conte-moi l'aventure de l'inventif celui qui pilla troie, qui pendant des années erra, voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d'usages, souffrant beaucoup d'angoisse dans son âme sur la mer pour défendre sa vie et le retour de ses marins sans en pouvoir sauver un seul...
"faut-il présenter ce "très vieux poème" ''la superbe traduction de philippe jaccottet fait revivre l'épopée d'homère qui vient" à son lecteur ou, mieux peut-être, à son auditeur un peu comme viennent à la rencontre du voyageur ces statues ou ces colonnes lumineuses dans l'air cristallin de la grèce..." le traducteur, philippe jaccottet, est un des plus grands poètes français contemporains.