Loin d'être uniforme et univoque, le présent présentiste se vit très différemment selon la place qu'on occupe dans la société. Avec d'un côté, un temps des flux, de l'accélération et une mobilité valorisée et valorisante, de l'autre, du côté de ce que le sociologue Robert Castel a nommé le « précariat », un présent en pleine décélération, sans passé - sinon sur un mode compliqué (plus encore pour les immigrés, les exilés, les déplacés), et sans vraiment de futur non plus (le temps du projet ne leur est pas ouvert).
Le présentisme peut ainsi être un horizon ouvert ou fermé : ouvert sur toujours plus d'accélération et de mobilité, refermé sur une survie au jour le jour et présent stagnant. À quoi il faut encore ajouter une autre dimension de notre présent : celle du futur perçu, non plus comme promesse, mais comme menace. Celle d'un temps des catastrophes dont nous sommes nous-mêmes les instigateurs.
F. H.
La généalogie du concept ancien d'histoire est esquissée ici par les textes, que ce soit ceux des historiens eux-mêmes (préfaces) ou d'autres textes importants dans la longue histoire de l'histoire. Ainsi, comment devenir Hérodote quand on a pour modèle Homère ? Comment Thucydide écrit-il à partir de et contre Hérodote, et comment Polybe s'essaye-t-il à retourner et à remettre sur leurs pieds les propos d'Aristote sur l'histoire et la tragédie ? D'Hérodote à Augustin, en passant par Cicéron et Tite-Live, on comprendra pourquoi le même mot n'a pas recouvert exactement la même marchandise.
Un glossaire accompagne chaque chapitre. Le lecteur y trouvera un vaste choix de notions et la présentation des thèmes, qui forment comme la trame du discours historique antique.
" Adieu sauvages ! Adieu voyages ! " : ainsi s'achevaient les Tristes Tropiques de Lévi-Strauss. S'appuyant sur les réflexions que lui inspire ce texte, François Hartog se lance ici dans une nouvelle enquête. Des Anciens aux Modernes, des Modernes aux Sauvages, il s'interroge sur les espaces d'entre-deux, les discordances et les interactions entre ces trois concepts. Aux réflexions qu'il a menées sur l'altérité et la frontière, dans l'optique d'une histoire culturelle du monde antique, et aux travaux qu'il a publiés sur l'écriture de l'histoire tant ancienne que moderne, François Hartog ajoute aujourd'hui une nouvelle question : celle des usages et des appropriations modernes de l'Antiquité. Ce faisant, c'est une véritable histoire intellectuelle de la culture européenne qu'il nous propose.
De 1830 à 1930, du programme de guizot et de thierry aux débuts des annales de bloch et febvre, au milieu des ces années vit et écrit un grand historien : fustel de coulanges, l'auteur de l'inoubliable cité antique.
Libéral selon ses dires mais en rupture avec les illusions de la révolution française ; référence, après sa mort, de l'action française ; soucieux de méthode et de science, mais en marge de la nouvelle sorbonne républicaine ; historien de l'antiquité mais plus prolixe encore sur la france de son temps, comme en témoignent les textes rassemblés par françois hartog. fustel est décidément un " cas ". a travers lui, c'est toute l'historiographie du xixe siècle qui est réinterrogée et le malaise même de l'historien à l'âge de la science mis au jour.