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La Part Commune
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Généralement considéré comme un auteur des grands espaces et de la vie sauvage - que les Américains appellent le Wild - Jack London est aussi un écrivain engagé personnellement dans les combats sociaux et politiques de son temps. Ce texte est celui d'une conférence donnée par l'auteur de L'appel de la forêt à Harvard, directement inspirée par la première révolution russe, ce qui fera dire à Leon Trotsky, trente ans plus tard, dans une lettre à la fille aînée de London que ce dernier « a su traduire en vrai créateur l'impulsion donnée par la première révolution russe [et] aussi repenser dans son entier le destin de la société capitaliste à la lumière de cette révolution ». Cette prise de conscience remonte chez London à sa propre expérience ouvrière, qui lui a permis de côtoyer de près les exclus de la croissance et trouvera à s'exprimer magistralement dans sa magistrale dystopie, Le Talon de fer, dans laquelle il décrit une révolution socialiste aux États-Unis, réprimée pendant trois siècles par une dictature capitaliste ayant atteint son paroxysme. Véritable brûlot, Révolution va bien au-delà des appels à l'indignation, que Dario Fo définit avec truculence comme « l'arme suprême du couillon », pour annoncer une insurrection, un soulèvement populaire inéluctable. La violence de certains de ses propos répond elle-même à la violence de la misère qui frappe ceux dont le travail est surexploité pour générer des profits qui ne bénéficient qu'à une oligarchie dont il fustige le cynisme. La résonance de ce texte avec la crise que nous connaissons ne laisse pas de frapper. On peut le lire comme un cri de ralliement ou une implacable et sinistre répétition de l'histoire et de ses errements.
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L'oeuvre de Jack London, trop souvent réduite à de simples récits pour la jeunesse, est d'une saisissante modernité.
Elle est le reflet de ses propres tourments et de sa conscience suraiguë de la nature humaine. Mille morts et L'ennemi du monde, textes rares de London, ne sont pas tant des récits du mal que de la déréliction qui y mène. Dans Mille morts, Jack London revisite le mythe de Prométhée, celui de l'homme et de son Créateur. Ici l'histoire d'un fils qui est devenu le cobaye de son savant fou de père. Avec Emil Gluck, L'ennemi du monde, London crée un de ses personnages les plus forts, celui d'un homme qui met son énergie au service d'une haine implacable vouée à l'humanité toute entière.
Mais, singulièrement, Gluck n'apparaît pas pour autant comme un monstre, mais presque comme une victime d'une société qui l'a engendré. Ce texte prémonitoire au souffle étourdissant, préfigure dès 1914 le cataclysme qui, un quart de siècle plus tard, plongera par la folie d'un seul homme, le monde dans le chaos.