Robert Laffont
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« En cette fin d'après-midi, l'épaisse pollution n'a pas eu tout à fait raison de l'éclat du crépuscule. Une douceur rose survit et se répand. Jeanne lui avait dit souvent la beauté des soirs d'été, la lumière qui décline, le rouge diffus qui se cache dans les nuages et s'étire dans leur souvenir. Bulle buvait les paroles, et jalousait. Car jamais elle n'avait pu contempler ce spectacle. Parce que ces soirs-là n'existaient plus, ils étaient obstrués. Le «secret des affaires» les avait étouffés ».
Paris, 2050. Bulle découvre, catastrophée, qu'elle est enceinte. Autour d'elle, le monde est un naufrage. Sous des dômes, les plus riches se calfeutrent, ignorant les misérables qui se débattent au-dehors, rendus inutiles par l'automatisation. Le chômage a atteint 70%, la violence envahit les rues. Les plus dociles gobent leur Exilnox, les yeux voilés par des implants connectés. Sur les holordis, les murs, partout, brillent les pubs et les flashs info anxiogènes. Alors un enfant, là-dedans... Pourtant le garder, c'est refuser de se résigner. Avec une poignée de hackers, Bulle choisit la lutte.
C'est bien de notre époque dont il est question dans ce roman. Aussi acide et apocalyptique que lumineux et optimiste, il est une célébration du libre arbitre.
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Tout perdre... pour mieux se sauver.
« Trop de rituels. Vautré sur un banc, face aux murs d'une école, le coccyx malmené par la dureté du bois, les jambes écartées et le regard flou, Antoine les a énumérés. Puis il les a trouvés suspects. Trop nombreux, donc suspects. Il s'est dit qu'ils avaient lissé sa vie, qu'il avait laissé son existence s'aplatir sous leur poids. Ils ont décapité les reliefs, comblé les aspérités, ils lui ont fait une petite vie, ces rituels, toute petite et prévisible. Sans le fard du travail, elle lui est apparue, elle est venue le frapper au visage, sa vie, lui serrer la gorge. » Par un matin ensoleillé, Antoine est licencié. Le choc est brutal. Son couple tangue, ses certitudes s'effondrent, son ego vacille. Mais à mesure qu'il se libère de ses habitudes, d'une consommation vengeresse et de l'agitation stérile qui l'avaient mû jusque-là, la vérité se fait jour.
Il bouge encore raconte cette odyssée sédentaire qui lui rend la vue.
Jennifer Murzeau analyse la dérive d'un homme et le naufrage d'un couple de façon crue et chirurgicale. Elle dresse le tableau d'une époque ou la réflexion et les questionnements sont des actes de résistance.
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Tendances : plaidoyer pour ne plus en suivre aucune
Jennifer Murzeau, Saphia Azzeddine
- Robert laffont
- 13 Octobre 2022
- 9782221259542
Quel est le point commun entre une architecte qui cherche son salut dans les plaids molletonnés, une jeune active qui tente de reprendre pied en enlaçant des arbres, une grande bourgeoise autoproclamée styliste qui fait bénir ses « créations » par un chaman, un trentenaire qui ingurgite des jus verts dans l'espoir de purifier son corps, accessoirement son âme, et une femme au foyer qui range compulsivement pour ne pas s'effondrer sous sa charge mentale ? Tous sont victimes des tendances.
Omniprésentes et insidieuses, sur nos écrans et dans nos magazines, suivies ou subies, elles se présentent comme des solutions miracles à tous nos maux.
Un burn out ? La pleine conscience !
Un couple en crise ? Le minimalisme !
De l'éco-anxiété ? Le greenwashing !
Les tendances sont surtout des symptômes, ceux d'une époque où la religion consumériste fait marcher sur la tête, scier la branche sur laquelle on est assis, et chercher désespérément un sens qui se dérobe de plus en plus.
Dans ce faux guide de développement personnel, Saphia Azzeddine et Jennifer Murzeau démontrent sans jugement et avec beaucoup d'humour qu'il est essentiel d'arrêter de se soumettre à ces injonctions absurdes qui, en prétendant nous tendre les clés du bonheur, font de nos vies des simulacres. Et affirment qu'alors tout ira mieux !