"Les choses belles et rares qui nous entouraient valaient une petite fortune et leur histoire, depuis qu'elles avaient quitté les mains de l'artiste ou de l'artisan qui les avait façonnées, était souvent peu banale ; elles avaient servi de prise de guerre, payé la rançon d'un roi, cadeaux d'un amant à sa maîtresse, butin d'un cambriolage, elles avaient été dérobées, cachées, retrouvées, vendues et revendues cent fois.
Voilà bien ce qui faisait leur charme et sans doute leur valeur. C'étaient des objets de convoitise." Philippe Flandrin nous entraîne avec délices dans l'univers parfois infernal, souvent chatoyant des trafiquants, des gangsters, des iconoclastes, des amoureux comblés ou déçus des trésors volés qui infestent le marché mondial de l'art. Avec ce livre, il signe un document-vérité exceptionnel dans la tradition du roman policier.
"Je suis devenu le souverain du Tibet, en 1951, à l'âge de seize ans et mon pouvoir était absolu. Le 8 aout 2011, j'ai transféré le pouvoir politique à un premier ministre laïque, élu par le parlement. Par cet acte, j'ai mis fin à quatre siècles de tradition durant lesquels le dalaï-lama était à la fois le chef politique et spirituel du Tibet. Nous avons ainsi achevé la démocratisation de nos institutions. Ce soir-là, chose rare, j'ai dormi à poings fermés. Pas de rêves ! Rien ! " Et Tenzin Gyatso le quatorzième dalaï-lama a éclaté de rire. Nous étions en 2012, à la fin du printemps. Lorsque je l'avais rencontré pour la première fois à Paris, trente ans auparavant, le dieu-roi, à la force de l'âge, portait le toit du monde sur ses épaules. Parvenu au seuil du grand âge, il entendait imposer la démocratie au Tibet et en Chine. J'ai tenté de comprendre et de relater la longue marche de l'absolutisme vers la démocratisation de cet homme qui, un jour, a dit : "Je ne suis qu'un être humain, accidentellement tibétain, devenu moine bouddhiste."
L'Orient, considéré au tournant du XXe siècle comme un "objet scientifique", aura été pour le savant Paul Pelliot celui d'une dévorante passion. Sinologue à vingt-et-un ans, il arrive en Indochine en 1899. Après avoir rencontré Thanh Thai, l'empereur d'Annam, il est le premier Français jamais admis dans la bibliothèque du Conseil aulique, le saint des saints de la citadelle de Hué dont il emporte les annales. A Pékin, lors de la révolte des Boxers en 1900, il combat, les armes et le verre de champagne à la main, les sectes du Grand Couteau, du Nuage blanc et du Nénuphar blanc que manipule en sous-main Tseu-hi, l'impératrice douairière en guerre contre les "diables étrangers". Traducteur des mémoires de Tcheou Ta-kouan, le visiteur d'Angkor au XIIIe siècle, il dirige de 1906 à 1908 l'expédition française au Turkestan oriental (l'actuel Xinjiang). A Touen-Houang, aux portes de la Chine, il emporte plus de six mille manuscrits et peintures trouvés dans la bibliothèque du monastère des Mille Bouddhas. Accusé d'escroquerie à son retour à Paris, il se retrouve au coeur d'une violente controverse qui oppose aussi catholiques et francs-maçons. Professeur au Collège de France, mobilisé en 1914, Pelliot devient l'agent secret du 3e Bureau de l'armée française en Chine et en Sibérie, où il organise les maquis antibolcheviques de l'ataman Semenov et du baron fou Roman Ungern-Sternberg. Académicien, vilipendé par les Chinois qui l'accusent d'avoir pillé Touen-Houang, Paul Pelliot aura fait de sa vie un conte oriental, digne de Marco Polo - il a en effet établi la première édition intégrale du Livre des merveilles.
Editions du Rocher, 24*15.5 cm, 266 pages
Février 2001 : dans la vallée de Bamyan, en Afghanistan, un peloton d'exécution tire au canon sur quatre Bouddhas monumentaux sculptés voici quatorze siècles.
Le lendemain, la destruction des corps criblés est achevée à la dynamite. Pendant ce temps, au musée de Kaboul, des mollahs martèlent les portraits des princes et des saints de l'Antiquité bouddhique. Cette mise à mort de l'art survient après vingt années de pillages et de destructions. L'Afghanistan et le monde subissent là une perte irréparable, au nom d'une conception aberrante de l'islam. Situés au carrefour de la Méditerranée, de la Mésopotamie, de l'Inde et de la Chine, la Bactriane, le Gândhâra et les autres provinces qui constituent aujourd'hui l'Afghanistan engendrèrent une synthèse exceptionnelle de civilisations.
Après le passage d'Alexandre le Grand, au Ive siècle avant notre ère, l'art gréco-bouddhique s'y est épanoui jusqu'en l'an mil. Ressuscité au XXe siècle par les archéologues français, cet héritage aura disparu en quelques années à peine tant sous les coups des pillards - paysans affamés et seigneurs de la guerre - que de marchands d'art cupides, experts auprès d'une clientèle internationale fortunée.
Témoin depuis vingt ans de la lente destruction de l'Afghanistan, Philippe Flandrin nous livre la terrible et fascinante histoire de l'âge d'or, de la redécouverte et de l'anéantissement d'une civilisation sans égale.
Un certain Georges Charalambouk, égyptologue brillant, aurait disparu depuis quatre jours dans les tréfonds de la Grande Pyramide de Gizeh. Voilà tout ce que je sais, au moment où je débarque au Caire pour le retrouver. Pour commencer, je découvre un milieu où tout le monde se hait. La guerre est totale entre Abdessalam Yacoob, star mondiale de l'égyptologie, et son ennemi juré, Gontran de Zébulon. Qui sait si Charalambouk n'est pas la victime collatérale de ce combat digne des dieux : Horus le vengeur et Seth l'usurpateur ? Pour m'y retrouver, je dispose d'un papyrus fort vénérable. Selon le scribe Himioumiou, Khéops cultivait une double personnalité, tantôt Horus et tantôt Seth ; sa pyramide serait la porte de l'enfer. L'ennui est que je ne comprends rien aux hiéroglyphes. Heureusement, il y a Aenigma, une vieille dame qui dit parfois la vérité, et aussi Bérénice, une jeune beauté qui ne ment pas tout le temps. Alors, bon voyage en enfer. Ah ! j'allais oublier : je m'appelle Lucifer Typhon. Typhon, ça ne vous dit rien ?
quand la belle elsa, spécialiste zurichoise des monnaies et bijoux antiques, vient faire une expertise à rajkot, une principauté tribale proche de la vallée de l'indus, aux confins de l'inde éternelle et de l'afghanistan ravagé par la guerre, la tragédie peut commencer.
au château de rajkot, la bégum zyba succède sur le trône à son mari assassiné, le nawab behram shah, et les couteaux sont tirés. c'est la querelle des héritiers aux dents longues, une affaire d'or dont elsa aurait mieux fait de ne pas se mêler. car les terroristes, surtout s'ils croient en dieu, ne plaisantent pas avec la plus belle, la plus précieuse, la plus désirable de toutes les pièces de monnaie du monde ! dix-sept grammes d'or frappés à l'effigie de roxane, par alexandre le grand, son divin mari, à vendre pour des millions de francs suisses...
qui, du terroriste play-boy arefan khaun, de l'éblouissante et narcissique bégum zyba ou du machiavélique général naseerullah khan rabab l'emportera au jeu subtil et impitoyable livré pour la conquête du pouvoir et du portrait de roxane, la monnaie qui vaut tout l'or du monde ? kidnappée, elsa va devoir lutter pour sa survie. c'est le début d'un voyage extraordinaire au pays des zélotes, des grands nomades et des génies de l'inde ancienne, où l'amour reste plus fort que la mort.
Au IIIe millénaire, une avancée technologique majeure, le passage de l'architecture en brique à l'architecture en pierre de taille, et l'unification du pays sous l'égide de la double monarchie de Haute et de Basse-Égypte créent les conditions d'une révolution culturelle, sociale et politique, dont le symbole et l'expression sont les pyramides de l'Ancien Empire. L'Égypte bâtit alors la civilisation qu'elle léguera au monde.
Ambition d'un peuple et de son souverain, véritable absolu de la création, la pyramide - tombeau royal - est un grand atelier où s'épanouissent à la fois les arts et les sciences, et dont les réussites permettent une constante évolution des formes et des conceptions. Quatre siècles durant, les pyramides ne cessent d'évoluer : conçues «à degrés» par Djoser et ses successeurs de la IIIe dynastie, elles sont à «face lisse» à partir du règne de Snefrou. Gigantesques sous Kheops et Khephren, ramenées à l'échelle humaine sous Mykérinos, elles abritent, à la fin de l'Ancien Empire, les Textes des Pyramides, le plus ancien corpus sacré de l'histoire de l'humanité.
Quarante-cinq siècles après leur construction, les pyramides irritent la curiosité des savants de l'Expédition d'Égypte, au point de les conduire à fonder une science, l'égyptologie. Elles sont ainsi redevenues le grand atelier où, à force de recherches, elles livrent, désormais, leurs mystères au monde. Elles sont enfin un jardin secret dont les portes se referment à l'ère du tourisme de masse et de la défense du patrimoine. C'est dans ce monde souterrain que nous sommes entrés avec Jean-Philippe Lauer, son gardien, il y a vingt-cinq ans. Sur ses murs il était écrit : «Non, ce n'est pas mort que tu es entré ici, c'est vivant que tu t'en es allé !»
En février 2011, alors que l'Égypte était en révolution contre l'oligarchie qui la dominait depuis si longtemps, Philippe Flandrin et Patrick Chapuis achevaient Le Labyrinthe des pyramides, un ouvrage consacré aux tombes royales de l'Ancien Empire (Actes Sud, 2011). En dépit de l'insécurité prévalant sur les sites, le Conseil Suprême des Antiquités de l'Égypte a souhaité dresser un état des lieux des nécropoles jouxtant Le Caire, et c'est ainsi que nos auteurs ont été conviés à étendre leur travail aux tombes civiles qui entourent les pyramides. De par les peintures, dessins, bas-reliefs et sculptures, elles révèlent l'histoire et la culture matérielle de l'Égypte au IIIe millénaire avant notre ère.
Les images des tombeaux de l'Ancien Empire témoignent d'un temps qui est également le nôtre. Les formes qu'elles proposent sont d'une diversité et souvent d'une inventivité telles qu'elles pourraient être l'oeuvre d'artistes contemporains : au classicisme des cortèges de porteurs d'offrandes répond le naturalisme de certaines compositions, le graphisme du dessin, l'abstraction des peintures murales. Sur les parois de ces sépultures, les choses, les êtres humains et les animaux sont sujets à d'incessantes transformations. Ce que nous voyons n'est pas simplement la représentation d'une époque et de son ordre, mais l'expression d'une volonté de changement, d'une nécessité d'évolution. Ainsi, comme la mort - loin d'être un échec - est le lieu où se prépare le futur, le tombeau, où l'on enterre dignitaires, vizirs, scribes, indigents et poètes, est le laboratoire de l'avenir. Sur ces images, on ne trouve qu'exceptionnellement - sauf dans la tombe d'Ankhmahor, vizir de la Ve dynastie - des scènes de lamentation, on ne voit nul cadavre, nulle dépouille mortelle ; bien au contraire, les scènes peintes ou gravées célèbrent chaudement la vie.
À côté de la personnalité du défunt - le «Maître du tombeau», expression empruntée à Pierre Montet -, on découvre aussi les témoignages de l'ensemble des acteurs de la société civile égyptienne : nobles, bourgeois, ouvriers, paysans, artisans. De même, la terre d'Égypte de cette époque lointaine est largement célébrée, avec sa faune, sa flore et ses richesses, au premier rang desquelles apparaît le Nil. Enfin, on comprend comment cette société complexe, supérieurement organisée, a pu évoluer et jeter les bases de trente-cinq siècles de civilisation et de rayonnement, en Égypte comme dans le monde antique. À travers cet ouvrage, c'est ce laboratoire que les auteurs ont voulu nous faire découvrir, à l'heure où la folie des hommes menace de le flétrir, car, outre les pillards, la foule des visiteurs qui se massent dans les tombes suffit hélas à mettre en péril tous ces chefs-d'oeuvre bien mortels.