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Fata Morgana
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Cet ouvrage, méconnu, de Roger Caillois, servi par une incroyable érudition, présente un propos original sur la guerre, et fait tomber quelques idées reçues, notamment sur l'humanisme pacifiant, l'égalité et les droits de l'homme.
La guerre, d'abord limitée, réglée par l'honneurs, et le fait d'une caste guerrière, devient, avec l'apparition de l'État moderne et de la démocratie, le fondement et la préoccupation principale de la vie politique. Pour Caillois, la guerre remplit aussi dans la société mécanisée la même fonction que la fête dans la société primitive : elle exerce la même fascination et « constitue la seule manifestation du sacré que le monde contemporain ait su produire, à la mesure des moyens et des ressources gigantesques dont il dispose ».
Bellone, écrit au début des années 1950, n'est pas seulement une dénonciation de la « guerre totale » et du nazisme, mais montre la pente qui conduit de la démocratie au totalitarisme.
En couverture : Jean-Louis-Ernest Meissonier, Allégorie du Siège de Paris, huile sur toile, 1870, Paris, Musée d'Orsay. © RMN (Musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski.
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Petit guide du XVe arrondissement aà l'usage des fantômes
Roger Caillois
- Fata Morgana
- 18 Mai 2011
- 9782851947956
Il ne s'agit assurément que d'un immeuble vétuste, promis à une destruction prochaine. Mais cette présence n'en semble pas moins de mauvaise augure. En outre, la maison sinistre présente aussi le pan coupé fatidique, le tranchant insolite qui ne paraît habitable que par des êtres plats, sans matière, comme dans la nouvelle de Fargue.
Édition nouvelle de ce récit fantastique de Caillois, qui nous entraîne dans une exploration d'un XVème arrondissement aujourd'hui disparu, à la poursuite des fantômes qui hantent les immeubles étroits, en forme de pointe à l'angle des rues.
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Nous n'avons jamais appartenu à l'aurore. Nous sommes frileux et de vol lourd, rapides à nous dissimuler dans les trous des murailles et ne guettant jamais que de petites proies. Nous sommes la chauve-souris sinistre et prudente des crépuscules, l'oiseau d'expérience et de sagesse, qui sort après la rumeur du jour et craint jusqu'aux ténèbres qu'il annonce. Il nous convient de nous appeler nous-mêmes crépusculaires.
Êtres de crépuscule, récit bref d'une longue mélancolie, au sortir de la guerre, est encore teinté de l'amitié avec Georges Bataille et des années Acéphale. Le texte (de cette langue qui rappelle les plus beaux vers des poètes italiens du début du XXe siècle justement qualifiés de crépusculaires), miroir de l'Histoire, d'une époque consumée, d'un temps regretté est un vertige littéraire où «la pensée se terrifie en s'insurgeant contre elle-même».
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Comme aux ophiolâtres, aux grammatosophistes, comme à Dürer et à Hugo, il m'arrive d'imaginer, mais sans jamais le déclarer atroce, le soleil antérieur d'où se répercutent les ondes des ténèbres essentielles. Un prince veuf en porta, dit-on, l'image sur son luth semé d'étoiles. Je suis assuré qu'en ce monde symétrique existe quelque part, qui équilibre le foyer de la lumière, une aveuglante opacité, le Castel de Sombre de la chronique infernale.
Dans l'obscurité, si intense soit-elle, je perçois seulement la réverbération moribonde d'un noir sauvage, insoutenable. De chute en chute, il se dégrade jusqu'à blanchir en une clarté fade, auprès de qui les ténèbres sont l'éclat.
Après sa longue traversée de la mer (des livres), le fleuve Alphée retourne vers sa source.
Dès les premières expériences poétiques, la nuit était là, présente dans un petit bout de tissu rose que le poète décrit comme nocturne, selon le protocole des recherches expérimentales surréalistes datées du 11 février 1933. A l'autre bout de la nuit, une des dernières agates que le poète était en train d'explorer au moment où la mort le surprend, superpose de manière inattendue le grenu au feutre duveté du velours, comme un lointain écho de cet attrait poétique pour la nuit. De la pierre au poète, d'une nuit à l'autre, Roger Caillois se demande si le vivant et l'inorganique ne sont pas régis par une loi unique, par une grammaire similaire qui ne cesse de se dérober au coeur de la nuit.
Texte établi et présenté par Stéphane Massonnet.
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Un personnage d'abord horripilant. D'une malice permanente, affichée, ostentatoire ; ne tendant aucun piège, puisque annonçant la chausse-trape. Ne disant jamais ce qu'il pensait, mais disant toutefois assez exactement le contraire, comme pour prévenir l'intelligence de l'interlocuteur, l'obliger â un détour supplémentaire (à un retour sur soi), au besoin le faire trébucher. Un goût continu du paradoxe. C'est peu dire : de la bascule, de la symétrie, de la permutation.
Les portraits - ou tombeaux - de ces trois écrivains révèlent des facettes plus intimes que celles éclairées par l'habituelle critique universitaire et jettent une lumière nouvelle sur le rapport de Caillois à l'écriture : Marcel Mauss, père de l'anthropologie française qui dirigea sa thèse dans les années trente, Paul Valéry, poète mais surtout auteur de 257 cahiers de son journal intime, et Jean Paulhan, animateur de la NRF à sa meilleure période. Derrière ces trois analyses brille un singulier autoportrait de Caillois tel qu'il se rêve.
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Quelle aubaine pour les vivants qu'une planète terraquée ! Composée d'eau pour leur soif et d'humus à plantes vivrières, à racines et à fruits, sans compter l'air qu'ils respirent, mais du même coup, et plus spécialement pour l'homme, fournie de bassins, de fleuves navigables et d'un sol spacieux, solide, pour y bâtir de simples abris comme des édifices sophistiqués à l'extrême, propres à y conserver, à y développer presque indéfiniment le savoir, la puissance ou la beauté. Des hangars ouverts à toutes les richesses et qui en multiplient le présage.
Grand amateur et théoricien du fantastique, Caillois ne l'a pourtant que peu pratiqué. Ses rares récits fantastiques: Ponce Pilate, La lumière des songes, ou les trois nouvelles réunies ici par lui-même en 1978 : D'après Saturne, Arc-en-ciel pour la Melencolia et La sécheresse n'en sont que plus précieux.
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Dans le monde antique, ce n'est pas à minuit qu'apparaissent dieux et démons, mais à midi. La thèse de Caillois, parue en 1937 (année d'Acéphale et de l'amitié avec Bataille) dans la Revue d'histoire des religions, n'avait jamais été publiée en volume. Elle constitue pourtant, en même temps qu'une étude prodigieusement érudite de la mythologie méditerranéenne, une profonde et troublante réflexion sur cette heure immobile où l'homme, confronté aux puissances mystérieuses, est exposé à tous les périls et à toutes les tentations.
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Petit guide du xv arrondissement a l'usage des fantome
Roger Caillois
- Fata Morgana
- 1 Janvier 1977
- 9782851943903