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GALLIMARD
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« Je parle de pierres qui ont toujours couché dehors ou qui dorment dans leur gîte et la nuit des filons. Elles n'intéressent ni l'archéologue ni l'artiste ni le diamantaire. Personne n'en fit des palais, des statues, des bijoux; ou des digues, des remparts, des tombeaux. Elles ne sont ni utiles ni renommées. Leurs facettes ne brillent sur aucun anneau, sur aucun diadème. Elles ne publient pas, gravés en caractères ineffaçables, des listes de victoires, des lois d'Empire. Ni bornes ni stèles, pourtant exposées aux intempéries, mais sans honneur ni révérence, elles n'attestent qu'elles. » Roger Caillois.
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Imaginons que Ponce Pilate ait décidé de faire libérer Jésus. Ainsi le Sauveur est sauvé par le courage inattendu d'un fonctionnaire romain, connu pourtant pour sa prudence, sinon pour sa faiblesse. De sorte que Jésus vit jusqu'à un âge avancé, qu'il n'y a pas de christianisme et que presque aucun des événements des deux derniers millénaires ne se produit. Pilate n'a d'estime que pour la sagesse. Il se méfie des religions. Mais est-il sage de compter sur la sagesse pour transformer le monde ?
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«Mes livres, qui sont très disparates, qui parlent de la guerre, du rêve, de la poésie, des insectes, de la fête, etc. représentent des préoccupations qui peuvent sembler différentes et parfois même incompatibles. Aussi j'ai été frappé de cela et même un peu inquiet. Je n'ai pas voulu les aligner comme dans un échiquier; mais en essayant de trouver ce qu'elles avaient de commun, ce que l'on pourrait nommer le tissu conjonctif ou tissu interstitiel, je me suis aperçu que mes livres créaient également des relations obliques entre eux, de sorte que leurs relations étaient plus complexes que ce que j'avais d'abord imaginé.» Roger Caillois.
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Selon la mythologie, le fleuve grec Alphée, amoureux de la nymphe Aréthuse, traverse la Méditerranée et redevient fleuve en Sicile. Pour Roger Caillois, «les hommes, eux-mêmes, passent ainsi par des pertes souvent durables, et en resurgissent ensuite, recouvrant mystérieusement, souvent à la fin de leur vie, leur paysage premier... [...]» D'une enfance quasi sauvage à l'océan livresque des connaissances humaines, pour aboutir au dernier refuge, l'indestructible monde minéral - tel est le parcours dont l'écrivain fait ici la confidence en nous livrant, au passage, son interprétation du monde.
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Les textes de Roger Caillois sur l'art, réunis ici, permettent de suivre l'évolution de son goût et de sa pensée, depuis ses premières études, proches du surréalisme, jusqu'à sa controverse avec André Malraux sur le Musée imaginaire. De L'Escamoteur de Jérôme Bosch, aux oeuvres fantastiques de Dalí, de la confrontation de Dürer et d'une agate, du rapport entre Hélion et les « vanités », de « l'orgueil cosmique » de Picasso, en passant par des études sur Carzou, Fenosa, Milshtein, Alechinsky, Ubac, Zao Wou-ki, Roger Caillois nous montre comment la signification et la fonction de l'art ont changé. C'est toujours la pensée, le jeu de l'esprit que Caillois cherche à pénétrer.
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Approches de la poésie
Roger Caillois
- GALLIMARD
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 21 Novembre 1978
- 9782070283880
Voici cinq oeuvres dispersées dans le temps (de 1944 à 1977), mais dont l'évidente unité est celle de l'obscure préparation d'une «poétique généralisée», parallèle de l'«esthétique généralisée» dont Roger Caillois a avancé l'idée en établissant une continuité entre «la turbulence encore secrète» de l'univers inerte et le monde de l'autre turbulence que représente l'imaginaire humain, et particulièrement la poésie. Dans Approches de l'imaginaire, l'auteur avait examiné le phénomène poétique comme un cas particulier de l'imaginaire. Ici, il soumet la poésie française contemporaine à une analyse critique, il en incrimine parfois les postulats dans Les Impostures de la poésie et dans Aventure de la poésie moderne. En même temps, lui qui avait adhéré au surréalisme «pour en finir avec la littérature», il avoue dans ces essais déjà anciens sa méfiance à l'égard de «l'inspiration absolue et incontrôlée», de l'image «in-imaginable». Toutefois, sans se déjuger, il insiste désormais sur l'importance de «l'image juste», «efficace», dans l'Art poétique et Reconnaissance à Saint-John-Perse. Exactitude et surprise, désarroi suivi de fascination, énigme posée en défi et bientôt accueillie comme signe d'intelligence, «occasion de tressaillir et d'admirer» : ces vertus de l'image tiennent à une propriété essentielle de l'univers, que cerne, à partir d'une leçon faite au Collège de France, le Résumé sur la poésie.
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Approches de l'imaginaire
Roger Caillois
- GALLIMARD
- Bibliotheque Des Sciences Humaines
- 26 Septembre 1974
- 9782070290604
Approches de l'imaginaire rassemble certaines études écrites par Roger Caillois entre 1935 et 1950 et non réunies jusqu'à présent en volume. L'ouvrage reprend également trois essais épuisés et devenus introuvables : Procès intellectuel de l'art, Puissances du roman et Description du marxisme. Il est divisé en quatre parties : «L'équivoque surréaliste», «Paradoxe d'une sociologie active», «Sciences infaillibles : sciences suspectes», «Puissances du roman», qui apportent souvent d'autres témoignages sur les mouvements auxquels l'auteur a participé, notamment le groupe surréaliste dont il fut membre de 1932 à 1935 et le Collège de Sociologie qu'il fonda en 1937 avec Georges Bataille. Ces études reliées par des arguments qui en précisent situation et signification s'efforcent, chacune à sa manière, de définir la logique de l'imaginaire. Elles racontent une sorte d'éducation intellectuelle toujours orientée vers un même but : défricher l'univers sensible afin «d'y déceler des corrélations, des réseaux, des carrefours, des régularités, en un mot quelques-unes des réverbérations mystérieuses dont se trouve marqué ou illuminé l'épiderme du monde, depuis les dessins des pierres dans la matière inerte jusqu'aux images des poètes dans le jeu apparemment libre de l'imagination». Cases d'un échiquier (1970) constituait par anticipation le second tome de ces Approches de l'imaginaire. Il correspond à la période 1950-1965. Obliques (1975) a rassemblé les dernières analyses de Roger Caillois, décédé en 1978.
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Ce recueil d' essais s'inscrit à la suite d'Approches de l'imaginaire et de Cases d'un échiquier. Le titre même d'Obliques renvoie à l'idée, chère à Roger Caillois, de «sciences diagonales». Il s'agit de compenser le découpage parfois dangereusement parcellaire des divers domaines de la recherche par des coupes transversales dans le savoir acquis. Dans ces essais fort excitants pour l'esprit, Caillois parle aussi bien de l'erreur de Lamarck qui crut un moment au transformisme des minéraux que des conceptions diverses du temps : circulaire ou rectiligne. De Phèdre et de l'Enfer. Du fantastique et du merveilleux. Et l'on suit avec curiosité sa démonstration : si c'étaient bien les chrétiens, comme les en accusait Néron, qui avaient brûlé Rome ? Obliques est précédé d'Images, images... qui comporte trois études : «De la féerie à la science-fiction», «Prestiges et problèmes du rêve», «L'agate de Pyrrhus».
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Si la correspondance entre Alexis Leger/Saint-John Perse et Roger Caillois ne frappe pas par son abondance, elle retient pourtant l'attention par le témoignage qu'elle offre sur la vie littéraire des écrivains ou critiques en exil, et sur les conceptions poétiques du poète et de son critique. On peut ainsi suivre les étapes de la publication d'Exil et, plus tard, celles de la rédacion de la Poétique de Saint-John Perse. Mais surtout, cette correspondance confirme que l'oeuvre de Saint-John Perse n'est pas seulement constituée de ses recueils de poésie et de tous les fragments de prose qu'il a accueillis dans le volume de la «Pléiade», mais qu'elle s'étend jusqu'à la moindre lettre privée, car toutes sont écrites avec le même soin et selon les mêmes procédés que les textes destinés au public. Il n'existe pas d'opposition entre un échange amical et spontané, délivré de tout souci de publication, et une correspondance fabriquée comme une oeuvre littéraire pour les besoins de l'édition. L'abandon que requiert l'amitié ne supprime pas le contrôle de qui veut faire de sa vie une oeuvre.
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Qu'est-ce qu'une correspondance, si ce n'est un effort pour dissiper les malentendus, vérifier une entente, c'est-à-dire aussi la remettre
constamment en jeu. Si Jean Paulhan et Roger Caillois ont correspondu si fidèlement, c'est sans doute dans la conviction que chacun appréhendait une face irréductible à l'autre de la même vérité. Et cette conviction n'a pas été sans raisons. Car, au-delà de ce qui oppose leurs intuitions, on ne peut qu'être sensible à ce qui les a réunies : à savoir, la contradiction elle-même. Car il y a beaucoup de profane dans le sacré de Paulhan, alors même que Caillois fait surgir une horreur et une fascination bien propres au sacré de la Nature profane. La symétrie de leurs positions est moins le signe d'une séparation radicale que celui d'une nécessaire ambiguïté de la vérité. C'est à l'élucidation de cette vérité que Paulhan et Caillois se sont assujettis. Et la rigueur qu'ils ont constamment exigée l'un de l'autre jusqu'à la fin marque assez qu'ils attendaient de leur dialogue une avancée commune dans l'entente de ce qui se dérobe à toute clarté. -
La présente anthologie réunit et confronte des récits fantastiques de terreur issus des différents pays du monde. Elle présente une anthologie de la peur imaginaire, un catalogue des motifs d'épouvante non point réels, mais inventés par l'homme, de toutes pièces, sans obligation, par plaisir. Le tome I de l'Anthologie rassemble les chefs-d'oeuvre d'inspiration fantastiques de la littérature anglo-saxonne (dans ses trois branches principales : anglaise, irlandaise et américaine) et ceux des domaines flamand et germanique. Dans le tome II, le lecteur trouvera, avec l'apport français (de Balzac à Fargue et à Jouhandeau), des récits italiens, espagnols, mexicains, argentins, haïtiens, polonais, russes, finnois, vietnamiens, japonais et chinois. Cette anthologie, sans inclure aucun récit de science-fiction, fait place pour la première fois à des récits récents qui, purement fantastiques au sens traditionnel du mot, ont du moins été influencés par cette littérature nouvelle.
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«Qu'est-ce que la civilisation? Telle est la question à laquelle j'ai tenté de répondre dans ce petit ouvrage. La civilisation, m'est-il apparu, n'est rien d'autre qu'une conquête continue de l'homme sur lui-même. Elle représente un risque, un abandon volontaire et périlleux de forces, d'avantages, de moyens également sûrs, pour des biens qu'il est toujours possible de perdre, qui ne sont pas indispensables et dont la valeur même est, si l'on veut, de convention. C'est enfin le destin nécessaire de la civilisation de donner contre elle des armes à la barbarie. Il m'a semblé que la civilisation demeurait partout identique et qu'il n'était époque si révolue ou contrée si lointaine où l'on puisse trouver gravement altérées les conditions de sa naissance, de son renouvellement ou de son déclin. Pour étudier ces différents moments, j'ai donc pris soin d'appliquer ma réflexion à divers âges et continents du monde, et j'ai examiné tour à tour les légendes de l'antiquité chinoise touchant l'instauration d'un ordre nouveau, la faiblesse de la démocratie athénienne devant le barbare macédonien, les premiers et misérables établissements de l'homme en Patagonie. Je voulais montrer ainsi qu'il s'agit de problèmes de tous les temps et de tous les lieux, insolubles par nature. Je voulais manifester que la civilisation est un effort toujours à recommencer, toujours en danger, dont le progrès n'est guère sensible, mais où beaucoup s'accordent à reconnaître la meilleure gloire de l'homme. Qu'est-ce que la civilisation? Des menus codes de travail, de civilité et d'étiquette, qui forment la conscience et lui apprennent à résister aux tentations de la grossièreté. En face des avantages qui reviennent naturellement à la violence, à la ruse et à l'argent, ils fondent un autre prestige que ni la brutalité, ni la fraude, ni la richesse ne savent tout à fait réduire. Ils rendent possible toute gloire. Ils permettent l'existence de biens dont ni l'achat ni le mensonge ne peuvent assurer la possession ; et le sort ni la puissance n'en établissent pas davantage la propriété. Ils habitent l'âme et sont justement ceux qui, la rendant ferme et incorruptible, lui confèrent comme une grâce qui la garde au moins de céder à la peur ou à la convoitise. Mais c'est mal s'exprimer peut-être que de dire ainsi qu'ils habitent l'âme. Ils la constituent. Car je ne sais ce que désigne ce mot sinon précisément un pouvoir que l'homme petit à petit peut faire mûrir en lui, un refus qu'il sait toujours mieux opposer à la fureur des monstres qu'il porte comme aux menaces et aux appâts dont dispose le monde pour l'effrayer ou le séduire. La civilisation n'est rien d'autre que l'habitude de rendre hommage à la qualité des choses et des êtres.» Roger Caillois.
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Dans une étude sur la mante religieuse, j'essayai, il y a presque vingt ans, d'établir une relation entre certains faits, en apparence, et peut-être en réalité, sans rapport : les moeurs sexuelles de la mante femelle qui dévore le mâle pendant l'accouplement ; l'intérêt exceptionnel généralement porté par l'homme à cet insecte, qu'il tient pour divin ou pour diabolique presque partout où il le rencontre. Au thème de la mante, qui affirme l'équivalence de la fabulation chez l'homme et de l'instinct chez l'insecte comme solutions opposées et correspondantes, j'ajoute aujourd'hui deux thèmes nouveaux, plus téméraires encore. Le premier, celui des ailes des papillons, est prétexte à introduire le problème des rapports entre l'esthétique naturelle et l'art humain. Le second, celui du mimétisme, se présente sous plusieurs aspects différents, qui ont chacun leur harmonique chez l'homme : travesti, camouflage et intimidation. Les mythes de métamorphose et le goût du déguisement répondent au travesti (mimicry proprement dite) ; les légendes de chapeau ou de manteau d'invisibilité au camouflage ; la terreur du mauvais oeil et du regard médusant, l'usage que l'homme fait du masque, principalement, mais non exclusivement, dans les sociétés dites primitives, à l'intimidation produite par les ocelles et complétée par l'apparence ou la mimique terrifiante de certains insectes. II s'agit chaque fois d'un même contraste entre l'insecte et l'homme, entre le mécanisme et la liberté, entre la fixité et l'histoire. Cet ouvrage est un manifeste en faveur de ce que j'ai appelé les sciences diagonales. Il en est aussi une première et sans doute présomptueuse illustration.» Roger Caillois (1960)
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Cohérences aventureuses ; esthétique généralisée, au coeur du fantastique, la dissymétrie
Roger Caillois
- GALLIMARD
- Idees
- 26 Novembre 1976
- 9782070353590
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La thèse que défend et illustre Roger Caillois dans cet essai est certes audacieuse. Répudiant la psychanalyse tout autant que la clé des songes, il s'attache à démontrer (et il y met toute la force d'une pensée que l'on sait robuste et rigoureuse) que «les rêves n'ont ni plus ni moins de sens que les formes des nuages ou les dessins des écorces des arbres». L'auteur écrit:«Je ne crois pas que les songes soient prémonitoires, ni qu'ils donnent accès à un monde merveilleux, ni qu'ils renferment ou trahissent des secrets graves et indiscutables. Je n'apprécie guère leurs prétendues vertus poétiques. Enfin, le moins que je puisse dire est que j 'estime dérisoire la consolation qu'on prétend qu'ils apportent.» Mais on aurait tort de ne voir ici qu'un essai de négation. L'analyse de Roger Caillois est impitoyable mais équitable. Refusant certaines théories, il a su cependant mettre en lumière un aspect essentiel du rêve, celui qui donne son titre à l'ouvrage:le sentiment d'incertitude qu' il suscite. Le rêve manifeste en effet quelle souveraine aisance jaillit quand sont éliminés les contrôles qui permettent l'oeuvre constructive et diurne de l'homme. Il procure une illusion si intense et si complète de toutes les facultés et prérogatives de la conscience vigilante, qu'il jette un doute impossible à lever sur l'ensemble de son activité. Ce n'est pas par ceux de ses aspects qui l'opposent à la réalité que le rêve est redoutable et insidieux, mais tout au contraire par ceux qui l'en rapprochent et qui parviennent à la fin à faire planer sur elle aussi un soupçon décisif d'irréalité.
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La présente anthologie réunit et confronte des récits fantastiques de terreur issus des différents pays du monde. Elle présente une anthologie de la peur imaginaire, un catalogue des motifs d'épouvante non point réels, mais inventés par l'homme, de toutes pièces, sans obligation, par plaisir. Le tome I de l'Anthologie rassemble les chefs-d'oeuvre d'inspiration fantastiques de la littérature anglo-saxonne (dans ses trois branches principales : anglaise, irlandaise et américaine) et ceux des domaines flamand et germanique. Dans le tome II, le lecteur trouvera, avec l'apport français (de Balzac à Fargue et à Jouhandeau), des récits italiens, espagnols, mexicains, argentins, haïtiens, polonais, russes, finnois, vietnamiens, japonais et chinois. Cette anthologie, sans inclure aucun récit de science-fiction, fait place pour la première fois à des récits récents qui, purement fantastiques au sens traditionnel du mot, ont du moins été influencés par cette littérature nouvelle.
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Babel ; orgueil, confusion et ruine de la littérature
Roger Caillois
- GALLIMARD
- Blanche
- 23 Juin 1948
- 9782070211487
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Cet ouvrage est une étude des principaux problèmes posés par la littérature : la littérature dans la société, la littérature devant la morale, la littérature et le langage. Il est né d'une réflexion sur l'évolution des Lettres depuis le romantisme, sur l'état de paroxysme où elles se plaisent, sur la sorte de fureur destructrice où elles se consument présentement. Mais cette enquête (ou, si l'on veut, ce réquisitoire) n'est pas seulement une mise en cause - esthétique, morale et sociologique - de la littérature contemporaine, elle s'ouvre à la fin en une manière de traité des fins dernières de la littérature.