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hélène lanscotte
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Ma femme crie. Elle crie à petits cris plutôt qu'à grands cris. Elle crie quand elle souffre. Elle crie de surprise, de frayeur subite, de joie, rarement de colère. Ses cris racontent différemment sa voix. Elle dit qu'elle s'en étonne, s'en effraie parfois. Elle ajoute que les cris des autres l'impressionnent énormément et qu'aussi loin qu'elle s'en souvienne, elle a toujours sursauté et tremblé aux cris d'autorité ou de disputes.
Ma femme a plusieurs registres de bêtes dans sa voix. Mais surtout plusieurs oiseaux. J'ai en tête leurs inflexions, de la plus grave à la plus aiguë, leur longueur comme leur brièveté, leur mélodie aussi. -
Portraits sauvages fait étrangement pensé au " cycle des hameaux " du grand méconnu Hubert Juin.
Il s'agit d'une galerie de portraits de personnages frustes, peu " causants ", qui semblent former une communauté à l'écart du monde, avec ses propres codes, ses habitudes, refermée comme une coquille sur ses propres secrets... La terre, les pierres - surtout les pierres - sont très présentes et symbolisent la mémoire des lieux et des hommes.
" L'Homme du Gouvernement ", personnage kafkaïen, un peu passe muraille, viendra perturber cette opacité pour effectuer le recensement des hommes " bons pour la guerre "... Les secrets et les rancoeurs remonteront à la surface, comme des bulles.
L'écriture d'Hélène Lanscotte est à la fois simple et étrangement belle.
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Hélène Lanscotte n'écrit pas pour se rassurer.
Elle écrit pour amener au jour tout un monde d'inquiétudes et de questions. Comme dans ses livres précédents, elle nous laisse le choix des interprétations. Est-ce générosité ou manipulation Une seule certitude, son écriture nous capte et ne nous lâche plus...
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À 5 ans, Hélène Lanscotte reçoit le premier prix de gourmandise. La récompense détrône le péché. Sa vie sera gourmande, exigeante en goûts, curieuse de toutes les saveurs et de tous les mets.
Manger a toujours été un acte simple, naturel et vital pourtant jamais une telle évidence n'aura été disséquée, analysée et cataloguée. Regarde comment tu manges et tu sauras qui tu es. Ce pourrait être l'exergue de ce livre, tout entier consacré à la nourriture et surtout au rapport que l'on entretient avec elle. En une série de portraits, allègrement croqués, Hélène Lanscotte fait le tour de ces mangeurs qui peuplent sa vie, proches, tout proches ou inconnus, observés à la volée, dans des restaurants, des rencontres de hasard, dîners improvisés ou patiemment préparés. De la pinailleuse qui cache son jeu au glouton qui semble jouer sa vie à chaque repas, des habitudes de cuisine aux recettes transmises de génération en génération, elle dresse un panorama sensible et gourmand de ces comportements alimentaires, et ce faisant, parle de la vie tout court. Elle oscille sans cesse entre le coup de fourchette et le coup d'oeil, débusquant celle qui n'aime pas, celui qui déguste, ou encore celui qui fait de chaque repas une cérémonie immuable. De quelques miettes, elle fait son essentiel, comme si manger était bien plus que se nourrir, mais aussi se dire et se dévoiler.
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La prose d'Hélène Lanscotte est riche d'images et de couleurs.
On retrouve ici, en écho, la même présence de l'enfance que dans Rouge avril.
L'enfance qui n'en finit pas de dérouler sa nostalgie, avec ses «interdits», ses «secrets» et ses promesses.
Le livre est construit d'une succession de poèmes en prose, avec de page en page, un fil tendu comme un continuum qui permettrait de garder la note.
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Envies de jardin
Hélène Lanscotte, Franck Chauvet
- Phare
- Phare Nature
- 20 Septembre 2000
- 9782846160025
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Dans ces scènes de la vie conjugale, présentées comme autant de variations à l'humour vif, hélène lanscotte dresse la chronique tendre et grave des heurts ordinaires d'un couple.
Pas de réalisme plat ici, au contraire un univers onirique et fantasmatique oú se dit l'éternel chassé-croisé entre les partenaires des jeux de l'amour. c'est l'homme qui tient le journal de ces situations parfois cocasses, souvent cruelles, oú il regarde, interdit et désorienté, sa femme lui échapper sans cesse.
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J'aime pas les contes
Hélène Lanscotte, Amandine Laprun
- Albin Michel
- Zephyr
- 21 Août 2013
- 9782226249388
Agathe dit qu'elle n'aime pas les contes !
Dans les contes, il y a toujours des choses insensées : des crapauds enchantés, des animaux qui parlent, un chaperon qui sort du ventre du loup... Et aussi des idées conventionnelles : un prince et une princesse qui s'aiment, des souhaits qui se réalisent à chaque fois... Pourtant, que de jeux cela lui inspire !
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Le titre, Ajours, et son sous-titre, 43 ouvertures pour commencer le jour, semblent faire référence au Livre des morts égyptien, ou Livre pour sortir au jour... 43 propositions pour une sorte de rite, de rituel, comme celui d'ouvrir la fenêtre chaque matin. La question est peut-être : sur quoi ?
Dès les premières lignes, le texte est placé sous le signe du charme, mais aussi du paradoxe : « seulement veiller à ne pas rompre le charme // mais le jeter loin devant avec la main le bras le reste ». Faut-il le rompre, ou le jeter ? Tout au long se succèdent les propositions ambiguës, selon un dispositif à variations sur le mode seulement/pas seulement, encore/mais/mais encore, pas seulement/mais/encore/encore... Mais chacun de ces adverbes ou conjonction exprime-t-il la persistance, la réitération de quelque chose, ou son attente ; le désir (l'injonction) que cette chose cesse, ou qu'elle advienne ? Est-ce surenchère ou antinomie ? « pas seulement la désolation des ajoncs la foule des arbres que l'on fend le paysage qui nous dévore la mare dans ses vagues // mais les pommes qui tombent n'importe où la beauté là par hasard [...] la blessure bleue de l'herbe que l'on veine dans les champs // encore les atermoiements ». Les phrases elles-mêmes interrogent, avec leurs images entrechoquées et leur absence de ponctuation : « le vase des admirations à la renverse » ou « la période sanguinolente des fleurs »... Conjuration ou sortilège ?
« encore le même mot son contraire gravitations de parentés ressemblances déboussolées au fur et à mesure », « le mouvant des mots réunis » : une sorte de chant, oui, résonne à la lecture, entêtant, envoûtant, qui célèbre la liberté d'être dans une attention aiguë à tout, à la seconde (l'éphémère), au tremblement de la lumière comme de l'être (« l'affolement des feuilles » / « le coeur tremblé »), au dérisoire, au vaste comme à l'infime. Ouverture des persiennes, dessillement des yeux, ajours, donc, ces jours à l'intérieur d'un motif de broderie ou de dentelle... Hélène Lanscotte le dit elle-même (site de la Mél) : « J'ai des images et le regard qui les épuise, à l'écart. Un regard d'affamée qui se contente de peu. J'attends la trouée, patiente. Je tente de saisir la fulgurance dans le suspens de ma panique. Une panique de désir qui fige, l'oeil fasciné par la phrase. » Hélène Lanscotte, née en 1960, est lectrice à haute voix depuis 1998 au sein de la compagnie La voie des livres et a rejoint en 2001 le collectif d'artistes Les Souffleurs, commandos poétiques. Après Simplement descendu d'un étage (Cheyne, 2002), elle a publié chez L'Escampette éditeur : Portraits sauvages (2007), Rouge avril (2011) et Pas prête (2014). En 2013 elle a signé un album jeunesse, J'aime pas les contes, avec Amandine Laprun (Albin Michel). Elle a publié aussi dans les revues Gare maritime (2006) et L'Intranquille et fait partie de l'anthologie poétique francophone de voix féminines contemporaines Pas d'ici, pas d'ailleurs (Voix d'Encre, 2012).