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Jeune militaire respecté, le prince Nekhlioudov retourne goûter à la vie civile près de Nijni Novgorod. Il mène une vie agréable entre les réceptions mondaines, un mariage arrangé avec une jeune fille noble, l'esprit serein, dans l'attente d'un brillant avenir dans l'armée. Il est alors convoqué au tribunal pour y exercer son devoir de juré. Parmi les accusés figure son premier amour, la belle Maslova, qu'il a délaissée. Maslova avait dû fuir la maison des tantes de Nekhlioudov où elle travaillait en tant que domestique afin de subvenir aux besoins de leur enfant, finalement mort-né. Accusée d'homicide avec préméditation, elle doit être jugée par Nekhlioudov qui fait tout pour la sauver, en dépit de magistrats obtus. Alors que le non-lieu parait évident, ceux-ci oublient de l'inscrire sur le délibéré, et Maslova est condamnée au bagne. Nekhlioudov va tenter de racheter sa faute. Il ouvre les yeux sur la misère spirituelle du monde de plaisirs superficiels où il vivait jusqu'alors. Maslova, elle, ne lui pardonnera jamais sa " trahison ". Le prince finit par trouver une réponse à ses angoisses, non pas auprès des hommes, mais dans le Christ qui, en une nuit de lecture, à l'heure de la repentance, illumine son existence.
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Chute de Diên Biên Phu, 7 mai 1954, les armes se taisent. Trois soldats se retrouvent dans la colonne des prisonniers : Constant Jalaire, jeune lieutenant idéaliste sorti de Saint-Cyr ; Marcel Larget, fils de paysans du Limousin ; Heinrich Schmidt, légionnaire allemand, ancien officier de la Wehrmacht.Durant cette marche vers la captivité, qui prend des allures de confessionnal, ils livrent leurs peurs, leurs égarements, leurs remords, leurs démons intérieurs... L'un a mené une embuscade ratée et meurtrière, l'autre a déserté au moment d'un assaut ennemi, le troisième a des souvenirs terribles de la campagne de Russie. Parviendront-ils à conclure un armistice avec leur conscience ? À retrouver leur dignité d'homme ?Avec ce livre choral d'un réalisme époustouflant, l'auteur fouille l'âme des soldats. Un roman âpre aux personnages saisissants, dont on comprend à la toute fin en quoi leurs destins sont liés.
Général de division, Nicolas Le Nen est l'auteur de plusieurs ouvrages de géopolitique et de stratégie. -
Jean-Paul II / Antoine Vitez ; Castelgandolfo 88
Jean-philippe Mestre
- Éditions du Rocher
- Litterature
- 2 Février 2012
- 9782268072838
"Cet échange eut lieu à l'occasion de la représentation privée, en juillet 1988 dans les jardins du Palais apostolique de Castelgandolfo, de l'oeuvre de Charles Péguy Le Mystère de la Charité de Jeanne d'Arc par la Comédie Française dont Antoine Vitez venait d'être nommé Administrateur général.
Cette rencontre où deux penseurs contemporains, l'un le successeur de Pierre, le chef de l'Eglise, l'autre l'ancien communiste, le concepteur du théâtre contemporain, ne pouvait que nous livrer ce très riche dialogue. Nous vous invitions à lire et à méditer cet admirable échange dont l'ensemble des répliques, au-delà de la rencontre, ont été prises dans l'oeuvre du pape Jean-Paul II et d'Antoine Vitez."
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gabriele d'annunzio (1863-1938), l'un des premiers poètes d'italie, fut tour à tour romancier décadentiste, ascète, hédoniste, inventeur de parfums, bâtisseur de palais, révolutionnaire, député, cinéaste, exilé, amant des plus célèbres femmes de son temps, colonel, aviateur héroïque, prince de monte nevoso.
parmi toutes ses vies, la plus extraordinaire est sans doute celle qu'il mena à fiume, de septembre 1919 à décembre 1920. après avoir conquis la ville les armes à la main, il y proclame la régence italienne du carnaro et rédige la première - et dernière - constitution poétique de l'histoire. pendant une longue année, intellectuels, patriotes, utopistes, anarchistes, bolchevistes, fascistes, drogués, prostituées, damnés de la terre se donnent rendez-vous dans cette ville libre mais assiégée, pour y réaliser leur rêve ou y suivre leur cauchemar - jusqu'à l'assaut final.
fiume redevient ainsi la cité enchantée où tout est possible, où les artistes se font soldats et les légionnaires poètes. ceux qui ont connu l'horreur des tranchées veulent que la fête dure infiniment. dans l'éclat des nuits, des cérémonies grandioses, des audacieux coups de main, dans l'ombre des trafics et des complots, les corps se mêlent, les esprits s'aiguisent. tour à tour ironique, prophétique ou désespéré, face à la souffrance et à l'absurdité du monde, d'annunzio tente, en dépit du temps qui presse, de faire de l'esthétique la morale de son gouvernement, et de sa défaite un triomphe littéraire.
alessandro barbero, historien des mondes qui basculent, romancier des chants du cygne, dresse le portrait criant de vérité d'un homme vieillissant - le poète par excellence - qui ne sait plus résister à ses démons, mais veut encore incarner pendant quelques mois ce génie qui subjugua son temps.
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Oeuvre tardive, Le Cygne (1994) fait partie avec Sur mes traces (1997) des derniers textes importants encore publiés du vivant de Rezzori.
Si elle s'en distingue par son caractère délibérément fictionnel, elle partage avec l'autobiographie et les nombreux autres textes de l'auteur qui relèvent des autres formes d'écritures du moi une dimension fortement introspective. Un narrateur anonyme parvenu à l'automne de sa vie relate avec le recul de la maturité les deux expériences fondatrices de toute existence : l'éveil à la sexualité et la première confrontation avec la mort.
Situées deux décennies avant la Seconde Guerre mondiale dans un village proche de la frontière russe, les premières pages réunissent le personnage principal et sa soeur Tania autour du cercueil de leur oncle Sergueï qui s'est donné la mort d'un coup de feu dans la tempe. Evocation à la fois mélancolique et ironique d'un monde finissant - celui des confins de l'empire austrohongrois qui a vu naître Rezzori -, le récit, interrompu à intervalles réguliers par des commentaires du narrateur, dans la perspective tantôt de l'enfant, tantôt de l'adulte, suggère la fragilité des existences ballottées par l'Histoire.
Le vol brisé du cygne ne marque pas seulement la sortie brutale de l'enfance, source de tous les déchirements, il scelle aussi une vocation d'artiste et d'écrivain qui inscrit le récit dans une longue tradition de la littérature de langue allemande.
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Le bruloir de don patricio ; souvenirs de squelette
José Bergamín
- Rocher
- Litterature Rocher
- 20 Mars 2002
- 9782268041889
Telle est la grande chose, la cause de notre être : partager, être ou être là, " nous-mêmes partagés de sorte moitié-moitié, toujours à moitié en tout, comme l'amour du couple humain, perpétuellement condamné à la mise en balance de sa fidélité, soit à ne jamais pouvoir être rien d'autre que la moitié de lui-même.
" 1939-1958. Comme tant d'autres républicains espagnols, José Bergamin endure à Mexico, puis à Montevideo, les souffrances de l'exil. Lui revient alors en mémoire, avec une cruelle ironie, le Madrid de son enfance et de son adolescence, qu'il tente ici de faire renaître de ses cendres. Or, bien que la colère ait tendance à céder le pas à la mélancolie, bien que la confusion règne en tous lieux et que guette le désenchantement, jamais autant qu'en ces pages son extrême liberté d'esprit et son génie d'écrivain n'ont déferlé avec une telle volubilité.
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Pour la première fois, avec Sur mes traces, Gregor von Rezzori livre ses Mémoires complets. Richesse d'une écriture, d'un caractère et d'un destin la vie de Rezzori coïncide presque parfaitement avec le XXe siècle. Né citoyen austro-hongrois en 1914 à Czernowitz en Bucovine (cet entredeux politique, entre la Mitteleuropa et les Balkans, où est aussi né Celan et qui va être ensuite divisé entre la Roumanie et l'Union soviétique), ayant grandi dans une famille disloquée dont la brisure devient métaphore, il a été longtemps apatride avant de devenir citoyen autrichien, alors même qu'il avait déjà fait de l'Italie sa terre d'élection. Traversant les pays et les cultures, Rezzori reflète dans le prisme d'une ironie rebelle les événements qui le transportent successivement à Vienne, Bucarest, Berlin, Hambourg puis dans ce coin de Toscane où il est mort en 1998. Comme Zweig et Musil, le regard qu'il porte sur l'Europe dont il a vécu tous les grands bouleversements le hausse au rang de témoin de notre siècle. Souvent propulsé dans les situations les plus invraisemblables, il fait son miel de toutes les circonstances, transfigurant par son talent d'écrivain une vie marquée par l'exil et la perte d'identité. Car Rezzori est un conteur aventureux qui tisse les fils épars de son existence sur la trame de l'histoire, donnant ainsi aux désordres politiques une touche familière et tragicomique qui fait comprendre, mieux que toutes les analyses, les ambivalences d'un siècle qui n'a pas fini de nous hanter. Et si le réel parfois se dérobe, c'est pour mieux ressurgir, chatoyant, fascinant. Sur mes traces est l'odyssée sans retour d'une vie pourtant magnifiquement accomplie.
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« Le fleuve de la vie s'était arrêté de couler dans mes veines sans daigner même faire entendre un doux clapotis au contact du bloc de matière inerte contre lequel il butait.
Ce barrage avait un nom.
Retraite.
Je croyais qu'il suffisait de tourner la page pour aborder une nouvelle expérience, qu'il était malin de parier sur un changement de vie radical. Je n'aurais pas voulu croiser un ancien collègue sur le parking du supermarché, échanger trois mots, une poignée de main, une claque dans le dos en déclinant l'offre d'un café pour la raison qu'il n'était pas dans mes intentions de faire perdre le temps, précieux, de ceux qui travaillaient. » Piégé par une retraite au pays basque, le petit comptable à la retraite marié à une brillante journaliste, sombre doucement, lesté par l'oisiveté et l'alcool.
Une lumière dans la maison d'en face, abandonnée, l'attire dans une histoire qui va changer le cours de son destin.
Voilà le lecteur happé dans une histoire, comme en porte les terroirs de France, à la fois inquiétante et lourde de récits scellés.
Au fond ne se contente pas d'être un polar efficace, il nous entraîne sans le vouloir dans un cheminement intérieur.
Le style sobre et limpide de l'auteur permet de suivre les méandres des sentiments amoureux d'un sexagenaire confronté à la dernière étape de sa vie comme à l'histoire d'un village basque.
La grande réussite de ce roman, jamais à cours de malice et de poésie, nous met face au destin extraordinaire de tout homme ordinaire : affronter la fin de vie, comprendre les autres, réussir à aimer.
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Qui suis-je ? J'ai très mauvais réputation, je fais des miracles, je meurs à trente-quatre ans, je ressuscite régulièrement, et je suis célibataire.
Qui suis-je, si ne ne suis pas celui que vous croyez ? Après plus de trois mille ans d'absence, l'assassin d'Agamemnon revient sur les lieux de son crime et les lieux du souvenir. On ne reste pas impunément loin des projecteurs sans vouloir rectifier sa légende, dénoncer les complots, ou régler quelques très vieux comptes. Le temps d'une vie, le Palais de Mycènes retrouve ses stucs, ses ors et ses fantômes : Sa Majesté Clytemnestre, son chat persan, ses plumes d'autruche et ses visions étranges, Princesse Electre en pleine crise d'adolescence, le bel Oreste, et Pylade le méchant sont conviés pour un ultime bal masqué.
C'est l'histoire d'Egisthe, le Petit Prince de Mycènes aux yeux bleus. C'est l'histoire d'un prince charmant, amoureux d'un autre prince charmant, dans un Palais enchanté. C'est l'histoire éternelle. C'est une histoire de dieux, de destins, avec ce qu'il faut d'amour, de bagarre, de sang, de meurtres et de champagne millésimé. Egisthe le Magnifique est de retour.
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Savoureuses expressions québécoises
Marcel Beliveau, Sylvie Granger
- Éditions du Rocher
- Litterature
- 3 Mars 2000
- 9782268035208
Dans ce livre-promenade au ton plein d'humour, Marcel Béliveau et Sylvie Granger nous livrent quelques clés pour comprendre le langage parlé utilisé par les Québécois.
On trouvera ici de surprenantes expressions imagées : " Se tirer une bûche " signifie non pas s'échiner à porter un tronc, mais prendre une chaise ! Si " le diable est aux vaches ", la situation va dégénérer. Lorsqu'une personne est " assise sur son steak ", cela signifie qu'elle tire au flanc. Un " mangeux de balustres " est une grenouille de bénitier. L'histoire du Québec explique l'abondance de jurons d'inspiration religieuse : outre le fameux " Tabernacle ! ", on trouve des expressions fleuries telles que " T'es vert, calvert " ou " Ostie de calice ".
Voici un petit manuel instructif et amusant, à feuilleter au gré de son humeur pour découvrir des expressions originales et inventives.
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Pièce intermédiaire de cette autobiographie inavouée en forme de triptyque, dont deux volumes, Neiges d'antan et Sur mes traces ont déjà précédemment paru en français, Murmures d'un vieillard est le bilan d'une vie livré par un homme déjà âgé et malade qui observe le monde et ses contemporains avec lucidité et détachement depuis la tour de sa maison toscane. Mêlant des réflexions très intimes sur la mort et ses amis disparus - l'écrivain voyageur Bruce Chatwin ou le photographe Ugo Mulas -, aux récits de ses voyages en Roumanie après la chute de Ceausescu, à Pondichéry, dans l'ashram fondé par Sri Aurobindo, l'auteur fait retour sur sa vie mouvementée et sa carrière d'écrivain. Au coeur de ces souvenirs, leur servant de dénominateur commun, se trouve la lancinante question du pouvoir dans un monde en déliquescence. Longtemps apatride, le lecteur averti de Canetti qu'est Rezzori montre à partir des cinq entités politiques qui ont servi de cadre à son existence - la Double Monarchie, la Roumanie, le Troisième Reich, la République fédérale d'Allemagne et l'Italie -, comment l'individu aux prises avec l'Histoire est sans cesse menacé par la formation de la masse. Qu'il aborde ses débuts de journaliste et auteur à la radio allemande - pour laquelle il couvrira le Procès de Nuremberg -, ou la foule débridée du Carnaval de Cologne, le spectre du 12 mars 1938, jour de l'annexion de l'Autriche au Reich hitlérien, hante ces pages où l'auteur juge son immaturité politique d'alors sans concession. Un regard aiguisé sur le monde d'hier et d'aujourd'hui.
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Écrivain dubitatif, Paul de Salles arrive à un tournant de son existence où même les satisfactions d'amour-propre ne compensent pas l'ennui qu'il éprouve. Son échappée belle : prendre le tragique du quotidien avec légèreté. Par le plus heureux des hasards, Paul tombe sous le charme d'Erika, piquante, sophistiquée, stoïcienne. Elle travaille sans ardeur pour une « ravissante idiote » qui veut passionnément devenir présidente de la République. Cette confrontation entre un certain « esprit français » et une bêtise tristement contemporaine promet d'être riche en étincelles.Que les lecteurs se rassurent : rien dans ce marivaudage satirique n'appartient au registre de la littérature « probante », comme disait Flaubert. Il n'y a dans La Montée des périls que de l'observation et de l'imagination.
Membre du comité de rédaction de la Revue des Deux Mondes, Marin de Viry est notamment l'auteur de Mémoires d'un snobé (Pierre-Guillaume de Roux, 2012) et de L'Arche de mésalliance, paru aux éditions du Rocher en 2021. -
C'est une petite ville de Bohême, où les retraités viennent passer leurs vieux jours dans la verdure.
L'on y mourrait d'ennui s'il n'y avait pas quelques excentriques pour alimenter la conversation. Parmi eux, Svoboda, l'idiot local, hante la gare depuis un quart de siècle en attendant qu'un voyageur le charge de ses valises. Mais un jour de 1939, les troupes allemandes envahissent la ville, et le porteur se retrouve accusé d'attentat contre Hitler... À travers le destin de l'idiot, c'est toute l'histoire d'un pays qui est évoquée, déchirante et farcesque, dans ce roman magistral où la satire s'unit à la tendresse.
Vus par le petit bout de la lunette, les grands événements mondiaux peuvent livrer parfois leur vérité ultime : celle d'une absurde ignominie qui fabrique des lâches ou des martyrs par le mépris de toute valeur humaine.
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" Je m'installe à l'affût, sur la rive verdoyante du Nil.
La nuit est humide. La lune folâtre dans l'eau et le miroitement de ses rayons scintille de mille feux. Mon âme musarde dans les recoins chargés des senteurs de jasmin et des parfums de l'amour du quartier d'Abbassia. La question, qui taraude de temps à autre ma conscience, s'impose encore une fois à mon esprit. Pour quelle raison n'apparaît-elle donc pas dans mes rêves ? Pourquoi ne l'a-t-elle pas fait au moins une fois, une seule, depuis qu'elle s'en est allée ? Je veux m'assurer, oui, qu'elle a bien existé, qu'elle a bien été une vérité de ma vie, et non une illusion d'adolescence...
" Publiés en 2001 dans la revue égyptienne Nisf al-dunyâ, Rêves de convalescence inaugure une forme littéraire tout à fait originale dans l'oeuvre de Naguib Mahfouz. En cinquante-cinq rêves, relevant à la fois du conte et de la parabole, tantôt graves et tantôt burlesques, l'écrivain transfigure son quotidien et celui de la société égyptienne actuelle pour en restituer toute la beauté et l'étrangeté.
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" L'écriture cristalline d'Angel Bonomini s'allie avec perfection à l'atmosphère ombreuse et d'une énigmatique beauté qui se déroule dans ses trames.
Tout dans celle-ci - la manière, l'intrigue, les situations - est enveloppé dans une brume de mystère. Les personnages, en apparence ordinaires, sont étranges par nature, par silence, par regard et, en premier, par les événements dont ils sont acteurs et témoins et auxquels ils sont prédestinés. Et ces événements font autant partie de leur vie courante que de leur monde imaginaire. Si l'on évoque la littérature fantastique, épithète qui surgit en littérature au XIXe siècle, Angel Bonomini est sans doute un membre de cette famille, et un des plus remarquables.
" Silvia Baron Supervielle.
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Passera une partie de sa jeunesse à Prague, avant de s'exiler aux Etats-Unis en 1938, pour ne revenir en Autriche qu'en 1951. C'est en 1968 qu'il publie ce recueil de trois nouvelles, sous le titre du Retour du golem. Composé de " La vengeance est mienne ", " Rien de plus simple " et " Le retour du golem ", ce livre met en lumière différentes facettes de l'écrivain, et plus particulièrement la diversité de ses sources d'inspiration. La première nouvelle, publiée en 1943, évoque l'Holocauste et l'horreur des camps de concentration, au sein d'une réflexion plus globale sur la judéité, alors même que Torberg n'avait pas connaissance de la réalité du système concentrationnaire nazi. La deuxième, rédigée après 1954, traite d'un autre totalitarisme : celui du joug communiste, imposé à partir de 1945 par l'Union soviétique à la majeure partie de l'Europe centrale et orientale. La troisième nouvelle enfin, contemporaine de la précédente, permet à l'écrivain de renouer avec sa jeunesse praguoise et les légendes ancestrales de la communauté juive de la capitale de la Bohême. Unies par une atmosphère oppressante conférée soit par les lieux, telle Prague, ville de mystère et de sortilèges par excellence, soit par les conditions politiques, en l'espèce différentes formes de totalitarisme, ces nouvelles sont particulièrement remarquables par leur finesse d'analyse, tout comme par la réflexion à laquelle elles incitent sur la condition de l'homme moderne confronté à la réalité d'un Etat devenu criminel et monstrueux.
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Le roman du juif universel
Elena Bonner, André Glucksmann
- Éditions du Rocher
- Litterature
- 6 Octobre 2011
- 9782268071947
Deux Juifs ayant échappé à la mort pendant la Seconde Guerre mondiale discutent à coeur ouvert.
Une femme et un homme, deux générations. Elle fut infirmière dans l'Armée rouge ; lui, enfant traqué, a subi l'occupation nazie en France. Elle a vécu à l'Est, lui à l'Ouest. Ensemble, ils évoquent les grands sujets d'actualité et les relations internationales, questionnent l'évolution de la démocratie, examinent l'exemple de la dissidence anticommuniste d'hier et antipoutinienne d'aujourd'hui, s'inquiètent de l'ascension du terrorisme, du nihilisme et d'un nouveau type d'antisémitisme, s'interrogent sur l'avenir d'Israël et de la Palestine.
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À l'ombre des grands bois
Annick Demouzon
- Éditions du Rocher
- Litterature
- 27 Octobre 2011
- 9782268072203
La photographie sert de cadre et de révélateur aux quatorze histoires, individuelles ou familiales, qui composent ce recueil où plane une angoisse diffuse.
Les situations en sont souvent ordinaires, renvoyant à la vie courante, aux occupations et préoccupations de chacun. Les personnages, du petit enfant au vieil homme, du citadin au paysan, du retraité au vacancier, se rencontrent, fuient, se perdent, se retrouvent, espèrent ou désespèrent, en sachant ou éprouvant, fût-ce confusément, le prix de l'existence. Toujours surprenant, caractérisé par une écriture rapide, nerveuse, déliée, qui court au but, sans s'appesantir, sans tirer à la ligne, le recueil joue sur l'ambiguïté, le décalage, les préjugés du lecteur, sème des fausses pistes et entraîne, par dévoilement progressif, vers une chute inattendue, chaque fois empreinte d'une grande humanité.
Quatorze puzzles à reconstituer ; quatorze interrogations drôles, cruelles ou tendres sur la vie.
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Eduardo Varlet participe à la révolution qui permet à Fidel, le Conducator, de prendre le pouvoir sur l'Archipel d'A.
Dissident, il émigré en France avec son frère, Adolfo. Séduit par les idéaux français, il devient une figure du militantisme extrémiste. Adolfo, de son côté, vit son homosexualité avec rage et mène un combat contre l'hétérocratie dominante. De rencontres en rencontres, il glane sur Internet les expériences les plus folles sur son corps, au risque de l'extrême.
Eduardo tente de comprendre. Ses amitiés se défont. L'humanisme à tous crins favoriserait-il n'importe quoi ? À moins que l'évolution des moeurs ne franchisse là une nouvelle et irréversible étape.
Las, Eduardo rentre dans son pays préférant l'incarcération à une liberté folle que ses contemporains ne savent plus maîtriser.
À partir d'un fait divers réel, cette histoire annonce le changement de comportement des humains. Elle permet aussi de montrer les limites du discours politique, la vanité du militantisme, la fin des liens de solidarité malgré les bonnes intentions. Elle décrit enfin la France à travers les illusions et les désillusions d'un exilé politique.
Conte tragique sur la fin d'un monde, Les Exilés de l'Archipel, bouscule l'homme vers l'espérance.
Après La Maladie des autres et Casta Diva, Les Exilés de l'Archipel est le troisième roman de Christophe Mory aux éditions du Rocher. -
Toutes les circonstances sont aggravantes
Ricardo Paseyro
- Éditions du Rocher
- Litterature
- 16 Mai 2007
- 9782268062334
Il y a Ricardo Paseyro, le poète reconnu à sa juste valeur en Espagne et en Amérique du Sud. Il y a Paseyro qui s'installe en France en 1951, frôle Garbo et Gréco, prend un thé mémorable avec Beckett, devient ami de Cioran et sympathise avec Michaux. Il y a Paseyro diplomate qui ouvre le premier consulat uruguayen à Rouen en 1960, et dont les fonctions diplomatiques lui permettront d'observer de près la politique mondiale. Il y a Paseyro humoriste, qui nous montre Supervielle et Borges "exténués par un perpétuel échange de bonbons au miel" ou qui, voulant participer à un congrès d'inspiration communiste, se trompe de porte et manque de recevoir le baptême mormon. Il y a Paseyro l'hispanophone qui devient un styliste français en ciselant une phrase pleine de finesse, d'esprit et de subtilité. Et la pointe est féroce quand il pourfend Neruda ou en embroche d'autres. Il y a encore Paseyro grand voyageur, critique littéraire, journaliste, biographe, et tout ce qu'on découvre avec bonheur dans ces savoureuses tribulations d'un Uruguayen francophile : Ricardo Paseyro s'y surpasse.
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Igor Sevken, écrivain slovène d'une soixantaine d'années, partage son existence entre Trieste et Duino. Dans ses écrits, il se bat pour faire reconnaître la langue et la littérature slovènes comme des éléments à part entière de la culture et de l'histoire italiennes. Il effectue régulièrement de courts séjours à Paris afin d'y retrouver Lucie Huet, une jeune femme d'une trentaine d'années. Ils se sont connus autour d'un texte écrit par Igor Sevken sur l'expérience qui a été la sienne dans les camps de la mort, pendant la Seconde Guerre mondiale. Ces rencontres amoureuses, à la fois sensibles et intellectuelles, sont celles de deux êtres que l'existence a meurtris. En effet, si Igor Sevken a livré le récit de ce qu'il a vécu en déportation, Lucie, de son côté, reste à jamais marquée par la relation incestueuse à laquelle son père l'a contrainte autrefois. C'est grâce à leur amour que Lucie trouve, peu à peu, l'apaisement et l'épanouissement de son corps de jeune femme. Cependant, ressentie vivement par elle comme un obstacle à leur amour, leur différence d'âge s'impose bientôt comme un thème récurrent, au point de brouiller parfois la tendre atmosphère de leurs rendez-vous. En lisant ce roman, on pense au magnifique Au-delà du fleuve et sous les arbres d'Hemingway, d'ailleurs évoqué. Une fois de plus, Boris Pahor aborde les grands thèmes de la littérature, l'amour, le temps et l'histoire. Il le fait de cette voix si personnelle que les lecteurs ont appris, au fil de son oeuvre, à reconnaître entre toutes : douce et tendre quand il parle des relations humaines, lucide et rageuse quand il évoque les combats de l'histoire. C'est cette capacité à juxtaposer ces deux registres sans en renier aucun qu'on retrouve ici de façon magistrale. Considéré en Slovénie comme l'un des écrivains les plus importants de sa génération, Boris Pahor est né en 1913 à Trieste où il vit actuellement. Parmi ses oeuvres récemment traduites en français : Arrêt sur le Ponte Vecchio (Les Syrtes ; 1999; réédition en 10/18, 2006), Jours obscurs (Phébus, 2001) et La Porte dorée (Le Rocher, 2002).