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La Contre Allee
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Mêlant le témoignage de Gabriele à ses propres réflexions, et utilisant comme toujours son humour et son sens de la formule, Amandine Dhée atteint l'objectif qu'elle s'était fixé : « écrire un livre réconfortant sur la mort ». L'occasion de réfléchir avec elle sur nos propres angoisses, sur notre désir de transmission, sur les pertes et les liens qui unissent les êtres et qui marquent les générations. Liant l'intime au politique, Sortir au jour est aussi un texte qui questionne nos façons de faire société... On pourrait lire Sortir au jour comme un texte qui parle de la perte, mais c'est exactement l'inverse. Sortir au jour raconte ce qui nous lie.
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Des personnages aux destins imbriqués...
Ville de M., le 12 novembre de l'an deux mille quelque.
Ils et elles se côtoient, dans l'intimité parfois, ou se croisent dans la rue, au supermarché, dans le hall d'un immeuble ou dans un autobus, en route pour leur labeur quotidien, ou au retour du travail... Le chauffeur de bus, la caissière du supermarché, le professeur d'université, l'étudiante, l'agent de sécurité, le truand... Ces personnages cheminent dans leurs existences respectives lorsqu'un grain de sable vient soudainement gripper les rouages de la machine, chamboulant leurs parcours et liant leurs vies à jamais...
... un roman inventif, audacieux et plein d'humour
Roman choral, histoires imbriquées comme des poupées russes, narration qui avance avec des allures de passages de relais entre les personnages d'un chapitre à l'autre... la forme de Labeur est d'une inventivité remarquable. Ses chapitres, de plus en plus courts, nous entraînent irrémédiablement vers la fin de la journée, une journée de labeur, avec une issue paroxystique.
Julie Bouchard, avec ce roman vif et intelligent, se pose des questions aussi ordinaires que cruciales : avons-nous la maîtrise de nos destins ? Nos choix peuvent-ils réellement influencer notre parcours ? Avons-nous les vies que nous méritons ? -
La narratrice explore la question du désir et de l' attachement à la lumière du parcours d' une femme et de ses expériences sexuelles et affectives.
Comment devenir et rester soi-même dans une société où les discours tout faits et les modèles prêts à penser foisonnent? La narratrice revisite toute sa vie, de l' enfance à l' âge adulte et se projette aussi dans la vieillesse.
La réflexion féministe apparaît à chacun de ces âges de la vie.
Amandine Dhée poursuit ainsi la réflexion entamée en 2017 avec La femme brouillon sur la représentation des femmes dans l' imaginaire collectif et leur émancipation.
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À la fin des années 1970, à Buenos Aires, deux adolescents passionnés de musique, inséparables et complices à la vie à la mort, fondent un magazine sportif artisanal. Armés d'un vieux magnétophone, l'enthousiasme de la jeunesse en bandoulière, ils partent interviewer leur idole, un certain Fangio.
Faster, c'est le récit de l'enfance, de l'amitié, des alliances, des vocations et des choix pour la vie. C'est aussi le roman des modèles et des idoles, héritées ou choisies en opposition à son histoire, à sa famille.
Eduardo Berti s'amuse de la réalité toute fictionnelle du souvenir des lieux et des époques, pour nous confier un roman émouvant sur ce qui marque la fin d'une adolescence et l'entrée dans l'âge adulte.
D'abord écrit en espagnol - et publié aux éditions Impedimenta en Espagne, et aux éditions Hibrida en Argentine -, Faster a été réécrit en français par son auteur, qui en a créé une version subtilement différente. -
Écrivaine et féministe, Amandine Dhée témoigne de sa maternité avec laquelle elle doit composer sans véritable modèle familial, mais dont elle fait nalement une force.
Enceinte puis jeune mère, l'auteure raconte la norme qu'on tente quotidiennement de lui imposer et sa lutte pour préserver son émancipation : son éveil politique et la création. Elle s'interroge sur la perception de son propre corps: où dire la violence d' être habitée par un autre ? Sur son métier d'auteure : mon cerveau est colonisé. Même absent, le bébé m' accapare. Mais aussi sur sa sexualité, la répartition des rôles au sein de la famille, la transmission ou encore sur ses propres contradictions...
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Une vie « au pieu »
Réveil, café, pieuter - comme un métro, boulot, dodo en huis-clos. Au pieu souligne la difficulté de se mouvoir parfois, la sensation de s'engluer dans sa propre existence. Agir n'est pas si facile quand les murs semblent se refermer sur nous, quand les obstacles semblent infranchissables... Alors on tente de prendre de bonnes résolutions : aujourd'hui, on fait les choses bien. On se couche tôt, on mange sainement, on range, on nettoie, on arrête le café et la clope... Alors tout ira mieux, on pourra se mettre au travail, on pourra mieux faire... Mais comment tenir quand l'appel du « pieu » est plus fort ?
De l'autodérision au désespoir
Si ce texte fait bel et bien écho à une forme de désespoir, il n'en est pas moins doté de l'humour et de l'autodérision auxquels l'autrice a le plus souvent recours lorsque les émotions et l'anxiété la submergent, et que la gagne la léthargie, le sentiment d'enfermement mental, tout comme l'impression d'être piégée par un système.
Dans ce poème-fleuve emprunt d'oralité et de références pop, le lit est le lieu d'une constante tension, d'une lutte sur le fil entre un désir de mouvement et l'attractivité de l'immobilité, symptomatique de certains troubles psychiques. -
Les apparences d'un roman historique...
Habilement cousu d'histoires intimes, de remèdes, de croyances, de sororités, de coutumes et de soins, La Morelle noire est un sémillant roman, formellement inventif, au propos vif et mâtiné d'humour, dont le héros n'est pas celui que l'on croit... Dans La Morelle noire les protagonistes s'emparent de leur liberté et, pour cette fois, les « sorcières » gagnent, et vont à l'encontre de la pensée chère à Descartes selon laquelle il faudrait se « rendre maître et possesseur de la nature ».
... écoféministe & écocritique...
Avec Christine de Suède, qui refusera de prêter son corps pour donner un héritier au trône, Hélène Jans, l'herboriste qui défie l'ordre établi, et Inés Andrade, l'étudiante irrévérencieuse, La Morelle noire met en avant des protagonistes qui se soustraient au discours patriarcal, livrant une autre lecture de la sphère domestique, ce lieu déconsidéré par l'histoire vue et racontée par les hommes, où les femmes se sont le plus souvent retrouvées réduites et assignées. Ce que l'on va lire et apprécier au fil des pages nous rappelle combien cet espace est aussi et surtout source d'apprentissage, de transmission et de savoirs tout aussi mal considérés.
... poétique, politique et incisif : un patchwork stylistique particulièrement dynamique
La Morelle noire est fait d'humour et d'ironie, d'amour et de sagesse, y apparaissent des lettres d'il y a trois cents ans, des courriels du xxie siècle, des recettes de sortilèges pour attirer les amants réservés, des brouillons de poèmes, des fragments d'essais et de réflexions scientifiques, des histoires et légendes anciennes, un herbier... autant de formes qui témoignent de la richesse de la diversité des voix, des façons de dire et de faire, contre la pensée unique et le discours historique patriarcal. -
La poésie apparaît certainement comme le langage le plus adapté pour rendre compte d' expériences de l' ordre de l' indicible. Loin des discours médicaux, psychologiques ou sociologiques qui chercheraient à expliquer ou comprendre, Perrine Le Querrec nous entraîne dans l' intimité de ces femmes. Le lecteur est amené à vivre une expérience brutale, au plus proche, s' il est possible de l' être, des sensations et des émotions de celles qui subissent ces violences.
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Se libérer de la violence sur le corps.
Récit d'une émancipation, Basculement-mère questionne le rapport au corps et les violences qui lui sont faites. Opposant à une généalogie des violences commises sur les femmes une mythologie de guerrières reprenant possession de leur corps, Irma Pelatan nous livre un hymne à l'acceptation de soi. Tout à la fois lettre à la fille adoptive, adresse aux « soeurs » et carnet de création poétique, Basculement-mère est un texte puissant et salvateur d'un corps qui se raconte pour survivre, pour surmonter la violence, les épreuves, et pour s'accepter tel qu'il est.
... de la maternité à la maternéité
Dans Basculement-mère, Irma Pelatan questionne la maternité (ou maternéité) : faut-il avoir porté un enfant en son sein pour être mère ? Comment se transmettre sans transmettre ses propres doutes, ses propres peurs ? Comment conserver l'héritage d'une autre culture, d'une autre langue ? Doit-on transmettre le risque d'être fille ?
... un corps en eau
Basculement-mère, en eau. L'eau qui lave du passé et des blessures ; l'eau qui porte, qui fait oublier le poids du corps ; l'eau et ses courants qui emportent vers d'autres destinées... Pour Irma Pelatan, au-delà se son rôle symbolique déterminant, l'eau est aussi un élément quasiment constitutif de l'écriture de Basculement-mère. Un récit littéralement écrit « en eau ». -
Née dans une tribu amérindienne du Canada, Fille-Rousse grandit avec les garçons, s' adonnant avec joie à la chasse, la pêche et la course.
Lorsqu' elle observe les groupes de femmes, elle pense que rester au campement n' est pas fait pour elle !
Dans l' esprit du chamane de la tribu émerge alors l' idée que la petite fille, dont la naissance est nimbée de mystère et dont le parcours étonne, pourrait être une Peau-Mêlée, un être à part, homme et femme à la fois.
Si certains dans la tribu acceptent sa nouvelle condition, d' autres doutent et ne cessent de mettre la jeune fille à l' épreuve.
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S'appuyant sur de nombreuses sources d'archives journalistiques, matériaux essentiels à son travail, Perrine Le Querrec explore l'histoire du danseur Nijinski. Dépassant la légende grâce à des années de recherches, écoutant les mille voix qui évoquent le danseur, cherchant la vérité au milieu des interprétations, démêlant l'intime et le public, l'autrice questionne le parcours et la fin d'un homme qui sombre dans la folie.
Mais surtout, d'un point de vue psychanalytique, l'autrice met en avant « la danse immobile » de Nijinski, apaisant ainsi la souffrance d'une vie d'internement, et replaçant Nijinski toujours au coeur d'une création, d'une avant-garde, dont les années d'asile l'ont privé.
Des salles de spectacle aux couloirs d'un hôpital psychiatrique, Nijinski passe de la lumière de la célébrité aux ombres de la honte ; Perrine le Querrec dresse le portrait de son Nijinski... Soudain Nijinski...
De Nijinski on sait qu'il fut danseur étoile
De Nijinski on sait qu'il sautait plus haut que quiconque
De Nijinski on connaît les Ballets russes, Diaghilev, L'Après-midi d'un faune
De Nijinski, Dieu de la danse, sans doute connait-on l'incroyable carrière
De Nijinski on connaît peut-être ses Cahiers
De Nijinski on connaît beaucoup la légende, les récits, les approximations
De Nijinski on croit connaître
De Nijinski sait-on qu'il dansa jusqu'à ses 29 ans
De Nijinski sait-on la dernière danse le 19 janvier 1919 à l'hôtel Suvretta en Suisse
De Nijinski sait-on ensuite l'effondrement
De Nijinski sait-on qu'il fut interné plus de 30 années
De Nijinski connaissons-nous le grand oubli où il fut abandonné
De Nijinski sait-on l'immobile comme une autre danse
Perrine Le Querrec -
Une langue au rythme maîtrisé...
La protagoniste de La Fenêtre, illustratrice trentenaire au chômage, observe le monde depuis la fenêtre de son appartement, dans un immeuble d'un quartier populaire. Enfermée, comme le reste du monde, dans son « chez-elle », elle subit de plein fouet la violence de l'isolement.
Avec un sens de la narration bien à elle, et une langue toute en économie, Isabel Alba livre un roman au style percutant qui rend avec force, page après page, les émotions qui submergent la narratrice/protagoniste.
... un regard politique et critique
Le « chez-soi » des un·es n'est pas le « chez-soi » des autres... Cela s'est confirmé pendant la pandémie. À travers le regard, les pensées et les émotions de la protagoniste, Isabel Alba nous invite à réfléchir sur le pouvoir que peut conférer l'espace : plus on a d'espace, plus on a de pouvoir. La Fenêtre rappelle combien l'enfermement causé par la pandémie a souligné les rapports d'inégalité.
... la création pour atténuer la solitude et l'angoisse
Dans La Fenêtre, Isabel Alba interroge également le rôle de la création - dessin, écriture... - pour surmonter les épreuves et les tragédies. Comment reprendre le cours de sa vie après de tels événements, après avoir perdu des êtres chers...? La protagoniste livre ses réflexions les plus intimes dans un carnet, sous forme de collage, pour tenter de maîtriser la douleur de ce qu'elle a subi durant cet enfermement. -
Bassoléa : ou de l'herbe dans le ventre
Juliette Mezenc
- La Contre Allée
- La Sentinelle
- 18 Avril 2025
- 9782376651680
Suivre Bassoléa dans son antre enterrée, étrange mais pas inquiétante, c'est accepter de l'écouter, de prendre sa voix, parfois révoltée, plein les oreilles. Dans sa « veranda sous terre », Bassoléa cherche à échapper aux autres, au monde, à cette société qui détruit tout sur son passage. C'est qu'elle est en colère, Bassoléa, une colère qu'elle raconte dans une logorrhée ininterrompue, foisonnante et hypnotisante. « c'est fou ce que le monde est fou » Bassoléa s'oppose au monde, de toute son énergie juvénile, mais en s'opposant elle cherche des issues, des solutions, des échappées. Et ce qu'elle finit par créer l'enchante au plus haut point, et lui fera dire que, désormais, elle se « shoote à la vie ». Parce que la colère ne suffit pas à la caractériser. Bassoléa est avant tout enthousiaste, curieuse, avec la folle envie de comprendre la vie, d'y participer, de l'inventer plus vivante, plus intense. « tout ce que j'ai appris comme ça, à juste contempler la terre » Et c'est cet instinct de vie phénoménal qui la poussera à construire cette drôle de véranda-sous-terre. Et c'est de là, de ce lieu si particulier, que nous allons prendre, avec elle, le temps d'observer le vivant, le sol, par le dessous.
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Stockholm, hiver 1962. Deux hommes de mondes adverses se font face. Arturo Pomar, l'enfant prodige espagnol, affronte sur l'échiquier Bobby Fischer, un jeune Américain excentrique et ambitieux.
En pleine guerre froide, l'un était le pion du régime franquiste, l'autre sera celui des États-Unis.
Au fil des 77 mouvements de la partie qui les oppose, se trame une histoire à la forme originale entremêlant les portraits de ces deux maîtres des échecs et ceux de nombreux autres pions. Des personnes sacrifiées, comme autant de mythes fabriqués et utilisés à des fins sociopolitiques, qui en paieront le prix fort ; celui de la mort, de la prison, de l'exil ou de la solitude. Mais un pion n'est jamais seulement un pion... -
D'abord, il y a la rencontre avec Arden et Jeff - cette grande femme aux mains d'araignée et cet homme à l'oeil de verre -, alors qu'ils tentent de sauver une orignale sur les berges d'un lac gelé de l'Ontario, au Canada. Touchée par cette rencontre, notre narratrice décide de les suivre et de rester avec eux dans le refuge dont ils s'occupent, soignant les animaux blessés.
Au coeur de cette nature marquée par les saisons, où humains et non-humains tentent de cohabiter, notre narratrice, suffisamment énigmatique pour que l'on puisse y trouver une part de nous-même, apprivoisera ses propres fêlures tout en apprenant à soigner les bêtes sauvages, et à écouter et interpréter les sons de la forêt et de la rivière.
Border la bête est un roman magnétique, tant par les impressions fortes que génère l'évocation sensible et incarnée des paysages, que par celles que nous procurent ses personnages aux silences éloquents et aux caractères forgés par l'existence. -
Envoyée à l'église par son père, dont elle craint la fureur et qui est convaincu que, là, il n'y aura aucune tentation, la narratrice tombe immédiatement amoureuse du prêtre.
Il faudra beaucoup de patience à la jeune fille pour vivre enfin, pleinement, son histoire d'amour. Beaucoup tenteront de lui mettre des bâtons dans les roues, les obstacles seront nombreux... Les amitiés et les soutiens aussi, qui l'aideront à traverser les épreuves.
Six ans, et encore une année. Six ans plus un pour que le prêtre prenne conscience que cette histoire doit être vécue, malgré l'Église, malgré tout...
Poignante histoire d'amour, Nuits de noces a été écrit dans une prose poétique qui s'est immédiatement imposée à l'autrice : des vers libres pour jouer des répétitions, des ressassements, des ruptures. L'amour, les sentiments, les émotions... autant de sujets qui sont comme la marque de fabrique de Violaine Bérot, qui excelle à les mettre en mots et en rythme. -
Par l'entremise de micro-scènes, Passer l'été nous précipite au coeur d'un été caniculaire, alors que la sécheresse et les feux de forêts font rage. Au-delà du cadre qu'offre le jardin d'une maison familiale où l'on subit, dans l'impuissance et le repli, la brûlure de cette chaleur écrasante, c'est à un mouvement à l'oeuvre beaucoup plus vaste que l'on assiste, page après page, avec les mutations profondes et inquiétantes de notre environnement.
Du personnel au social, de l'intime à l'universel, Passer l'été est un texte pressant, dans lequel il n'est question ni d'imaginaire, ni de lyrisme ou d'onirisme, mais plutôt de la force du réel meurtri, par le prisme d'une poésie du dicible, quasi documentaire, à la fois poignante et percutante, pour ce qu'elle laisse entrevoir comme avenir proche.
À l'écoute du vivant, Irène Gayraud emploie le pronom « on », à la fois personnel et impersonnel, individuel et collectif, comme dans un récit-choral qui engloberait chacun·e d'entre nous, mais également, et surtout, les mondes animal et végétal parmi lesquels nous nous trouvons.
Écopoétique, au ton direct, parfois empreint d'une forme d'ironie, il se dégage de Passer l'été, au-delà de la beauté des fins tragiques, un sens critique affûté doublé d'une douloureuse lucidité. -
Dans le Madrid des années 1930, Matilde cherche un emploi. La jeune femme enchaîne les entretiens infructueux : le travail se fait rare et elles sont nombreuses, comme elle, à essayer de joindre les deux bouts. C'est dans un salon de thé-pâtisserie que Matilde trouve finalement une place. Elle y est confrontée à la hiérarchie, aux bas salaires, à la peur de perdre son poste, mais aussi aux préoccupations, discussions politiques et conversations frivoles entre vendeuses et serveurs du salon.
Quand les rues de Madrid s'emplissent d'ouvriers et ouvrières en colère, que la lutte des classes commence à faire rage, Matilde et ses collègues s'interrogent : faut-il rejoindre le mouvement ? Quel serait le prix à payer ? Peut-on se le permettre ? Qu'est-ce qu'être une femme dans cet univers ?
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Fresque familiale à l'incroyable souffle romanesque, Mississippi, la Geste des ordinaires charrie près de deux siècles d'Histoire, porté par les voix particulièrement incarnées de ses personnages. Traversant les époques, les drames et les bouleversements sociétaux, cette généalogie mêle la petite et la grande histoire, du XIXe siècle jusqu'au XXIe, de la colonisation à l'ouragan Katrina en passant par la Commune, les chasses aux sorcières, les guerres mondiales... Questionnant la violence sociétale et la manière dont elle innerve les familles au fil des générations, Sophie G. Lucas dresse les portraits d'êtres qui courent après leurs rêves, qui tentent de prendre des chemins de traverse et d'émancipation, et dont les existences sont comme une mythologie de vies ordinaires.
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Une allée est au centre de ce texte : une allée sur laquelle vont et viennent les familles, les proches, qui rendent visite à des patient·es, dans un hôpital psychiatrique. Au bout de cette allée, se trouvent ces patient·es, des jeunes qui décompensent, comme ces baleines échouées, égarées par le bruit du monde. Si ces familles se trouvent confrontées à leur propre douleur, leurs propres difficultés, toutes forment néanmoins un ensemble, un groupe uni, un « troupeau », lit-on. Sur cette allée bordée de doutes et d'?incompréhension, théâtre d'?une histoire entre espoir et résignation, les allers et retours de chacune, comme un mouvement pendulaire, marquent un rythme propre au texte.
À la lecture de ce roman, écrit à la deuxième personne, on va et vient sur cette allée, accompagnant les allées et venues de celles et ceux qui, au fil de leurs visites, nous délivrent des informations clefs de l'histoire des patient.es interné.es. Nous sommes confronté.es à différents points de vue et à une succession de scènes fortes qui donnent la mesure de la solitude dans laquelle chacun.e se trouve au quotidien.
La langue oscille entre une poésie propre à l'?expression des sentiments et de la douleur, et une oralité qui génère un effet de proximité, d'?intimité avec les différents personnages. Une familiarité s'?instaure et, au fil du texte, on est sensibles aux changements que l'?on peut observer chez eux. -
« Au centre de cette histoire, il y a le corps d' une femme, ses hantises et ses obsessions, & il y a la nature. C' est l' histoire d' une échappée belle, d' une femme qui quitte, presque du jour au lendemain, tout ce qui déterminait son identité sociale.
Elle sort de stase et se met en mouvement. Son départ est d' abord une pulsion, une sorte de fuite vers l' avant qui tient du road movie, avec de longues traversées de paysages en voiture, en auto-stop, puis à pied.
De la fuite et l' errance du départ, cette échappée va se transformer en nomadisme et en un voyage vers la réalisation de soi.
L' Arrachée belle, c' est une échappatoire à une situation vécue comme oppressante : une vie de couple dont la violence réside dans l' absence de relation, dans le vide entre les corps, dans les non-dits, l' incompréhension, la distance qui se creuse. J' ai voulu faire ressentir la violence de ces quotidiens subis, cette perte de sens qui est devenue pour la femme une absence au monde et à elle-même, et que l' on nomme en psychologie un syndrome de déréalisation et de dépersonnalisation, une façon de s' extraire de ce qu' on ne peut pas supporter, symbolisée par l' absence de prénom de la narratrice. »
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À travers les 11 nouvelles de ce recueil, Luisa Carnés dresse le portrait de personnages en prise avec le régime franquiste : des combattant.es, des femmes emprisonnées, prisonnières politiques, des personnages en révolte, lancés dans le combat pour leurs libertés, leur dignité, poussés par le désir de voir renaître une Espagne nouvelle et juste. On ne peut qu'être profondément touché·es par Marta, qui entend les pleurs de son enfant à travers les murs de la prison ; par les membres de cette milice lancée dans une opération suicide ;
Ou encore par cette femme qui tente de passer la frontière française avec une étrange valise. Des nouvelles comme autant de coups portés au régime fasciste, des textes écrits par une autrice en exil, réfugiée au Mexique, mais qui n'aura de cesse de militer et de lutter pour son pays. -
L'instant décisif
Pablo Martin Sanchez
- La Contre Allée
- La Sentinelle
- 19 Septembre 2017
- 9782917817698
Moi et les gens de ma génération, les enfants de la Transition, nous avons grandi heureux dans les années 90, avec l'illusion que cela avait été un chemin de roses, sans violence. Depuis, nous avons découvert les ssures du conte (...). Pablo Martín Sánchez C'est le roman d'un seul jour comme le Ulysse de Joyce ou 24 heures dans la vie d'une femme de Zweig Le récit se déroule sur 24 heures et débute le 18 mars 1977, le jour de naissance de l'auteur, à minuit. Nous sommes à Barcelone, peu de temps avant les premières élections démocratiques depuis la dictature ; l'année la plus violente de la Transition. Cette année-là, il y eut plus de mille manifestations, plus de 4000 arrestations et, entre autres, la tuerie d'Atocha.
Un roman polyphonique Avec une structure narrative divisée en 6 parties, chacune habitée par les voix de 6 personnages, L'instant décisif retrace une journée d'incertitude où chaque protagoniste aff ronte une situation qui transformera sa vie.
Parmi ces 6 personnages, entre lesquels se tissent des relations subtiles, on compte une petite fi lle de 11 ans qui vit mal l'école, un enseignant et une étudiante en journalisme, un chef d'entreprise corrompu, mais aussi un chien et un tableau. « Je voulais la voix de quelqu'un qui avait vécu tout le XXème siècle et j'ai pensé qu'un tableau, ce serait parfait. » Pour parachever ce portrait d'une société convulsive qui, de surcroît, est minée par le fl éau des vols de bébés, s'ajoute un septième personnage, un foetus, qui n'a pas de voix propre. Ponctuellement, au fi l de la journée, le narrateur lui annonce les événements qui vertèbrent les autres histoires et jalonnent les 24 heures de ce jour qui s'avère être celui sa naissance.
Un lecteur impliqué Particulièrement dynamique, l'alternance des voix narratives génère également des blancs que le lecteur est alors invité à combler par lui-même. Pour l'auteur, une façon de dire que « l'ensemble des mémoires crée un récit. Qu'il n'est pas de vérité unique. Que l'Histoire est un récit, et que le roman peut apporter une grande part dans ce jeu. » Ce qu'en dit le
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Avec ce nouveau roman, Thomas Giraud s'approche peut-être encore davantage qu'il ne l'avait fait jusque-là d'une de ces figures fulgurantes et insaisissables, celles qui n'ont fait que passer, qui ont expérimenté et qui nous laissent au bout du compte avec beaucoup d'interrogations, à peu près autant de passions, de frissons même. Si de Bas Jan Ader, artiste hollandais, nous savons peu de choses, endécouvrant ce qui aurait pu être son histoire, selon Thomas Giraud, on se demande forcément d'où lui vient cette fascination pour les chutes ? Qu'entend-il montrer en tombant à vélo dans un canal ou en se lâchant d'une branche d'arbre ? Est-ce là uniquement le goût d'aller contre un ordre établi du monde matériel ? D'y trouver ce qui fait s'écouler les montagnes immobiles ? D'éprouver le fait d'être au monde ? D'aller contre l'immobilité de ce qui semble inscrit dans l' éternité...? Ou faut-il chercher du côté de la petite enfance et de cet équilibre introuvable qui fait tomber à longueur de temps ? Ou encore d'avoir grandi dans l'absence et pourtant avec la figure omniprésente d'un père héros de guerre ? Avec Bas Jan Ader, sommes-nous devant une scène sans fin de la chute du père, fusillé par des soldats allemands ? Sommes-nous pris par l' immense solitude ressentie, causée par cette absence, par le manque ? Si Bas Jan Ader semble avoir laissé peu, c'est en même temps déjà beaucoup, pour penser, imaginer, construire, inventer. Bas Jan Ader a mené bon nombre d'expériences et de performances spectaculaires. Jusqu'à cette toute dernière dont il ne reviendra pas : la traversée de l'Atlantique à bord d'un bateau trop léger sans doute, In Search of the Miraculous... Thomas Giraud s'enquiert de son histoire, traverse l'océan à ses côtés et dresse son portrait à travers les âges, de son enfance à sa vie d'adulte, sa vie d'artiste.