L'historienne de l'art Anne Lafont livre une étude inédite sur les relations étroites et paradoxales de l'art et de la race à l'époque des Lumières. Une nouvelle voix dans les travaux actuels sur les questions de race, d'art, d'images et de colonies.
En se fondant sur un corpus d'oeuvres d'art connues et moins connues, l'auteure revisite les Beaux-Arts au XVIIIe siècle sous l'angle de la représentation des Noirs, figures qui, non seulement, articulent savoirs anthropologiques et expériences esthétiques, mais aussi histoire du luxe métropolitain et histoire de l'esclavage colonial. Ce livre est fondé sur une recherche de plus de dix ans sur les formes qu'ont prises les figures de l'Africain et de l'Africaine dans l'art continental et colonial français d'avant l'imaginaire abolitionniste. Il couvre les cultures visuelles et artistiques qui vont de la fin du XVIIe siècle - à l'époque de Coypel, Mignard, Largillière... - quand les colonies antillaises commencèrent à percer dans le champ artistique métropolitain, au premier tiers du XIXe siècle - à l'époque de Girodet, Benoist et Léthière jusqu'à Géricault... - quand l'échec de la première abolition de l'esclavage (1802) durcit l'iconographie partisane, mettant la violence des vies dans les plantations à l'ordre du jour de la création artistique.
Si l'histoire des rapports entre Paris et New York est bien connue, celle des relations entre Paris et Dakar l'est beaucoup moins. Entre la France et le Sénégal, la circulation des objets, des artistes et des idées atteste des rapports de force qui agitèrent la scène artistique dans les années 1950 à 1970, marquées par le processus de décolonisation et la guerre froide. De l'élaboration d'un art moderne national au Sénégal, à la contestation de la politique de coopération mise en place entre les deux pays, des expositions « Picasso » ou « Soulages » organisées à Dakar dans les années 1970, à l'exposition d'art contemporain sénégalais organisée à Paris en 1974, une géopolitique des arts se mettait en place, au coeur de laquelle plasticiens et cinéastes jouèrent un rôle actif.
Transnational et transhistorique, cet ouvrage s'inscrit dans le champ d'une histoire de l'art mondialisée, et invite à décentrer les regards pour envisager l'histoire de l'art de ces années à nouveaux frais. Il permet également de repenser l'historiographie communément admise au sujet de la globalisation de l'art contemporain, en démontrant que « tout » ne commence pas dans les années 1990.
« Il est tout à fait évident, écrivait Pierre Francastel en 1937, qu'il ne faut pas confronter Japon et japonisme » : c'est cependant ce qu'on n'a cessé de faire.
À rebours d'une approche néo-positiviste qui voit dans le japonisme le résultat d'une influence, ce livre analyse à nouveaux frais un étonnant phénomène d'innutrition, dont l'histoire matérielle est indissociable du programme conceptuel : levier épistémologique, l'art japonais fonctionna comme un génial indicateur et conforta des convictions antérieures à l'ouverture du Japon. Limiter l'étude du japonisme à la France, loin de rétrécir le sujet, l'élargit en permettant de reconstituer ses capillarités et la circulation des représentations dans un milieu osmotique, frémissant d'échos littéraires et artistiques, à une époque où la presse façonnait les représentations esthétiques et sociales. La constitution d'une « planète japonisme » a occulté les débats internes auxquels répondit la révélation des arts du Japon, qu'on ne peut dissocier de l'acclimatation du préraphaélisme en France et plus généralement du médiévalisme. Écartant les « japonaiseries » (les bibelots et les toiles orientalistes), inversant la logique de l'influence, rendant un rôle moteur aux prétendus influencés, ces pages accompagnées d'une iconographie nouvelle se concentrent sur le japonisme comme « révolution de l'optique », suivant l'heureuse expression de Jules de Goncourt reprise par son frère Edmond, souvent citée mais mal exploitée. D'Ingres à l'Art nouveau dont le japonisme, contrairement aux idées reçues, n'est pas la conclusion mais en partie l'antidote, elles restituent, dans leur cadre discursif, les phases de son évolution au miroir d'une Grèce en plein bouleversement, en associant largement les écrivains et les critiques d'art, ces acteurs essentiels, grands oubliés d'une histoire qui a sous-estimé les réseaux de sociabilité de la culture d'accueil. Si le japonisme devint un phénomène international, c'est bien parce qu'il fut, d'abord, un art français quand Paris, capitale du XIXe siècle, aimantait les imaginations.
Une enquête sur les enjeux à la fois artistiques et politiques de l'art participatif, depuis les années 1990.
Jeremy Deller propose aux anciens mineurs d'Orgreave de participer à la reconstitution historique en costume de l'émeute ouvrière anglaise de 1984. Javier Téllez organise avec les patients de l'hôpital psychiatrique de Tijuana la propulsion d'un homme-canon par-dessus la frontière américano-mexicaine. Thomas Hirschhorn invite les habitants d'un quartier du Bronx à construire un monument en l'honneur du philosophe Antonio Gramsci. Une peau de cerf sur les épaules, Marcus Coates rencontre les résidents d'HLM à Londres et réalise une consultation spirituelle du lieu, en qualité de chaman.
Ces pratiques artistiques contemporaines forment une nouvelle galaxie étrange, qu'on appellera ici art en commun. Il s'agit de créer dans l'espace social plutôt que dans l'atelier ; sur une longue durée et avec d'autres plutôt qu'en son for intérieur ; de façon collective plutôt que démiurgique. L'oeuvre n'est pas le fruit du travail de l'artiste seul, mais celui d'une collaboration en présence entre artiste et volontaires.
Ce dispositif artistique bouleverse notre conception de l'art et nos catégories esthétiques. Mais il revêt aussi une dimension politique, en s'emparant des questions de participation et de communauté qui comptent parmi les enjeux les plus cruciaux des tentatives actuelles de vivification de la démocratie, comme de la reconfiguration de nos manières de vivre.
Cet ouvrage propose d'interroger les liens entre participation en art et en politique dans le contexte démocratique et néolibéral qui est le nôtre. Et de penser comment l'art en commun peut contribuer à la réinvention des formes possibles du collectif.
Les images sont partout : à la télévision, sur l'écran de nos ordinateurs, dans les rues. Images de la publicité, images de la politique, images de la peur, images du désir : autant de noeuds historiques qu'il convient de démêler à l'aide d'outils appropriés.
Comment peut-on analyser les images ? Carlo Ginzburg, historien de l'art considéré comme l'un des plus importants de sa génération, répond à cette question en proposant quatre essais d'iconographie politique : le frontispice du Léviathan de Hobbes, Marat à son dernier soupir de David, l'affiche de propagande Your country needs you!, Guernica de Picasso. Mais toute image est une image politique.
Une mise en perspective historique de la représentation des arts extra-occidentaux dans les musées et dans l'imaginaire occidental, un point de vue comparatif avec les Etats-Unis et une mise en lumière des liens entre arts d'Afrique et avant-garde.
Privilégiant une approche transnationale et comparative, cet ouvrage invite à repenser les modes de perception des arts de l'Afrique en France, aux Etats-Unis ainsi qu'au Sénégal, de l'époque coloniale à nos jours. Développé sur le mode d'une enquête menée au coeur des pratiques muséales et artistiques, il interroge les rapports entre savoir et pouvoir, dans les musées et les galeries. De Paris à New York en passant par Dakar, l'auteur croise l'analyse des politiques culturelles françaises et américaines, avec une relecture du primitivisme et du modernisme, pour démontrer que New York ne « vola » pas seulement l'idée d'art moderne comme l'écrivit Serge Guilbaut, mais également celle d'art africain.
«?Richement documenté, foisonnant d'idées, précis dans ses analyses, ce livre fera date dans l'histoire du comparatisme en histoire de l'art.?» Marianne Jakobi, Critique d'art n° 34
Jean Dubuffet et l'Art Brut face au paradigme primitiviste.
Tordre le cou au primitivisme : voilà l'un des enjeux du travail de Jean Dubuffet (1901-1985). Le lecteur pourra trouver l'affirmation paradoxale tant l'artiste semble être le parangon du primitivisme artistique dans la seconde moitié du XXe siècle. Tout pourtant dans son travail concourt à récuser l'existence d'un art supposé « primitif », pierre de touche d'une conception européenne et raciste de l'art, repliée sur elle-même et ébranlée au sortir de la Seconde Guerre mondiale. En poussant à l'excès les codes du primitivisme de son temps, le peintre en dévoile lucidement les ressorts et les présupposés.
Considérant ensemble les trois activités de Dubuffet - la peinture, l'écriture et les prospections qu'il mène pour son entreprise de l'Art Brut - ce livre cherche à mieux comprendre cet activisme critique initié au début de la reconnaissance professionnelle de l'artiste.
Mois après mois, année après année, l'auteur retrace le cheminement intellectuel et la pratique maniaque de celui qui défendra et promouvra l'invention artistique dans tous ses états. Chemin faisant s'esquisse un portrait de l'art parisien d'après-guerre à l'heure de l'institutionnalisation de l'avant-garde : celui d'une vaste redistribution des rôles qui affecte les mondes de l'art, de la littérature, de la critique, mais aussi de l'ethnologie et de la psychiatrie.
Célébrant l'opération artistique en partant de l'informe, Dubuffet cherche alors à déjouer les procès de catégorisation qui sévissent dans le champ de la création, tout comme dans celui des sciences humaines et sociales. Là est la pointe de la critique de Jean Dubuffet, là est la besogne de l'Art Brut.
Voir aussi Jean Dubuffet ; Hubert Damisch & Jean Dubuffet ; Pierre Leguillon : Dubuffet Typographe.
Prenant appui sur un ensemble d'archives largement inédites, cet ouvrage se concentre sur le rôle joué par les marchands d'art, au tournant du siècle dernier, dans la définition, la promotion et la circulation d'objets africains en tant qu'oeuvres d'art, en Europe et aux États-Unis.
En Occident, le regard esthétisant posé sur les objets venant d'ailleurs n'est ni neutre ni spontané. Pour ce qui est des arts d'Afrique, ce regard construit s'est forgé au début du XXe siècle, dans le contexte d'une Afrique colonisée, par le biais d'actions concrètes et délibérées initiées par un petit groupe d'acteurs, mené par Guillaume Apollinaire : artistes d'avant-garde, critiques, collectionneurs et marchands. Prenant appui sur un ensemble d'archives largement inédites, le présent ouvrage se concentre sur le rôle joué par les marchands d'art au tournant du siècle dernier, dans la définition, la promotion et la circulation d'objets africains en tant qu'oeuvres d'art, en Europe et aux États-Unis. Cette fabrique du regard fut activée par un cercle étroit d'individus qui peuvent être considérés comme les principaux protagonistes de la création du marché des arts africains des deux côtés de l'Atlantique avant 1920 : Joseph Brummer, Robert J. Coady, Marius de Zayas, Paul Guillaume et Charles Vignier. Par le choix des oeuvres qu'ils opérèrent, les expositions qu'ils organisèrent et les ouvrages qu'ils publièrent, ils furent largement responsables de la construction du « canon » des arts africains, et influencèrent leur perception en Occident jusqu'à ce jour.
Les cas de micro-histoire développés ici prennent en compte acteurs et oeuvres, les trajectoires internationales non-linéaires de ces dernières ainsi que leurs modes de représentation complexes. Ils nous permettent de mettre en avant l'existence d'un marché actif et fondateur, et de définir la place de ce commerce comme foyer d'un jugement esthétique embryonnaire. En rétablissant les étapes de sa formation, au croisement de l'histoire des collections, du marché, du goût et de l'histoire coloniale, ce livre propose de réévaluer les concepts utilisés en histoire de l'art depuis des décennies pour appréhender la réception des arts de l'Afrique.
Une enquête sur l'histoire des expositions temporaires, au travers d'un ensemble d'entretiens menés avec 38 commissaires.
Ce livre est le résultat d'entretiens menés avec 38 commissaires, entre 2014 et 2017, dans le cadre d'une recherche sur l'histoire des expositions temporaires depuis 1945 en France.
Les témoignages réunis ne visent pas à imposer une vision globale des expositions ou des commissaires, mais forment un premier corpus qui permet de mieux cerner les articulations entre les parcours et les pratiques. Les expositions temporaires font oeuvre « en société », elles sont une façon de construire un monde, d'accéder à une scène publique, d'utiliser un médium dont l'audience peut varier, de raconter une histoire, de délivrer des messages, d'offrir une interprétation.
Quelles sont les expositions qui les ont marqués ? Quels sont leurs objectifs ? En quoi le lieu, l'institution influent-ils ? Quelles sont les contraintes auxquelles ils doivent faire face, les évolutions remarquées au cours de leur carrière ? Telles sont les diverses questions auxquelles ils ont bien voulu répondre.
Cette étude historiographique consacrée au théoricien de l'art, écrivain et militant anarchiste allemand Carl Einstein (1885-1940), contemporain des avant-gardes, acteur de quelques-unes de leurs opérations les plus marquantes (Dada à Berlin, le cubisme, etc.), qui fut aussi leur premier historien, explore plusieurs couches de l'histoire du début du XXe siècle et ouvre une réflexion critique sur quelques tropismes épistémologiques d'aujourd'hui.
Si l'art a pour tâche d'organiser le sensible afin de former des hommes libres, cette liberté ne peut surgir que de formes symboliques contraignantes, aux antipodes du libéralisme moderne : cet impératif paradoxal fut commun aux avant-gardes historiques et à leur premier historien - Carl Einstein, intellectuel allemand qui a circulé entre les disciplines et qui s'est consacré autant à l'écriture qu'à l'action politique. Constante durant les trente années traversées par ce livre (1910-1940), la tension entre contrainte et liberté s'est exprimée selon cinq temporalités différentes : apocalypse primitive, présentisme, dialectique du tragique, mythe et longue durée. Chaque fois, ces temporalités se glissaient dans des dispositifs formels précis et véhiculaient des rapports changeants entre l'art, les sciences de l'homme et l'action politique. Cet ouvrage est une étude historiographique, une sonde explorant plusieurs couches de l'histoire de cette période et, enfin, une réflexion critique sur quelques tropismes épistémologiques d'aujourd'hui.
Un examen critique des liens entre esthétique et politique à travers la figure emblématique de Carla Lonzi (1931-1982), critique d'art novatrice et l'une des fondatrices du néo-féminisme en Italie.
Depuis quelques années, la trajectoire théorique et politique de Carla Lonzi, critique d'art, puis figure centrale du féminisme italien, fait l'objet d'une redécouverte : celle qui a pensé ensemble le féminisme et le monde de l'art, le pouvoir et l'émancipation des femmes, est en train de devenir une figure incontournable tant pour l'histoire du féminisme que pour celle de l'art.
Dans ce livre, qui se fonde sur des nouvelles recherches d'archives, Giovanna Zapperi reconstruit le parcours de Carla Lonzi à travers l'analyse de la « créativité radicale » d'une pensée et d'une pratique qui se situe dans le contexte des relations entre l'art et le féminisme dans l'Italie des années 1960 et 1970. Pour Carla Lonzi, arrêter la critique d'art n'a pas signifié arrêter de critiquer l'art : ses écrits montrent un intérêt constant pour l'art, ses institutions, ses mythes et ses langages, qu'ils ne cessent d'interroger. Ces écrits nous permettent ainsi de réfléchir aux formes de la subordination liées au genre, aux rôles sociaux qui ne cessent de se reproduire, à l'art dans son implication avec le pouvoir et la différence des sexes.
Voir aussi Carla Lonzi.
Les différentes dimensions du paysage - mental, culturel et idéologique, réel et pictural - dans la peinture française du XVIIe siècle.
À travers plusieurs paysages emblématiques de Poussin, du Lorrain, de Bourdon et de quelques-uns de leurs contemporains du XVIIe siècle, ce livre se propose de faire apparaître ce que nous désignons comme le paysage du paysage. À savoir le paysage mental, culturel, idéologique, entrelacé au paysage réel ou représenté, et co-constitué par lui dans une simultanée émergence.
Les représentations discursives naguère dominantes, formées par la littérature artistique, la théorie de l'art et l'esthétique, tendaient à absolutiser et à réifier le paysage dans une illusoire et apaisante clôture. Sans doute, comme nous y incitent nombre de recherches, faut-il désormais le considérer davantage comme un espace relationnel, pluriel, voire conflictuel - une Oïkologie, ouvrant sur une écologie culturelle - où s'articulent non seulement de multiples êtres ou objets mais également d'autres champs référentiels décisifs pour l'historien.
La philosophie naturelle permet ainsi d'envisager la question des météores et des divers accidents atmosphériques chez Nicolas Poussin ; la littérature spirituelle réformée est rapprochée de la peinture de Sébastien Bourdon ; un certain nombre de discours mais aussi de pratiques - agraires, sociales, économiques, politiques et diplomatiques - constituent le cadre de référence dans lequel certains des tableaux du Lorrain ont été produits.
Le paradoxe de ce paysage construit, dénaturalisé, culturalisé, rendu à sa puissance dialectique, est l'existence qu'il semble reprendre. Il s'impose avec la force à nouveau de l'évidence sinon de la violence, et renverse la relation de l'objet (paysage) à son sujet premier : un spectateur devenu paysage.
Un regard critique sur la place et les enjeux des représentations de la guerre d'indépendance dans la construction contemporaine de la scène artistique française et algérienne.
Entre 1954 et 1962, la guerre d'indépendance ou d'Algérie, selon que l'on se place du côté de la victoire ou de la défaite, marque durablement plusieurs générations d'artistes internationaux, tout en traversant et bousculant des questionnements esthétiques quant à la représentation de l'innommée. Cet ouvrage, qui récolte les traces de cette déchirure franco-algérienne au travers du prisme de l'art, révèle l'importance d'un sujet historique, ignoré par l'histoire de l'art, dont les répercussions sur la politique contemporaine de la France sont encore perceptibles. Terreau d'une génération d'artistes en devenir, qui confortera son engagement social et artistique dans les événements de Mai 68, mais aussi d'artistes de l'hybridité postcoloniale, qui revendiquent une modernité non hiérarchisée et l'écriture d'une histoire du non-dit, la guerre d'Algérie revêt des enjeux fondamentaux dans la construction contemporaine de la scène artistique française et algérienne. Or, alors que la proscription historique d'une cinquantaine d'années est maintenant révolue, il semble que les conflits mémoriaux inhérents à cette défaite française continuent à entraver l'écriture et l'exposition sereines d'une séquence historique, qui apparaît pourtant matricielle dans la construction de la France contemporaine. Aussi, cette étude se propose de porter un regard critique sur la place des représentations de cette « non-histoire » dans les institutions muséales françaises et tente alors de mesurer l'impact d'une histoire encore non consensuelle dans la création artistique actuelle, aujourd'hui percutée par des enjeux de mémoire et politique, et qui de fait interroge la notion même d'identité(s) et d'« intégration ».
Ce livre retrace le parcours de Kara Walker (née en 1969), l'artiste afro-américaine la plus internationalement reconnue depuis Jean-Michel Basquiat, et revient sur l'histoire de la réception d'une oeuvre qui affronte les limites de la représentation, en posant la question de la figuration du corps noir.
Puisant à la fois dans une méthode d'analyse formaliste et dans l'histoire politique de l'histoire de l'art, ce livre regarde les plus grandes oeuvres de la plasticienne comme les plus confidentielles. Il revient sur l'histoire de la réception de l'oeuvre de Kara Walker aux États-Unis, notamment en éclairant les controverses qui ont marqué ses grandes expositions depuis les années 1990. De ses incontournables silhouettes découpées dans du papier noir montrant des visions ricanantes et horrifiques d'un Vieux Sud esclavagiste, dont le kitsch emprunte à l'étourdissant imaginaire raciste au fondement de toute la culture visuelle américaine, jusqu'à sa géante éphémère en sucre dans un Williamsburg gentrifié (2014), Kara Walker affronte dans son travail les limites de la représentation. Comment intégrer la conscience de l'impossibilité de représenter les traumas collectifs dans le dispositif artistique, dans un contexte social et politique pollué par le racisme ? Comment figurer les corps noirs : c'est la question que nous pose Kara Walker et que ce livre tente d'explorer.
Les échanges historiques et les terrains communs (d'entente ou de dissension) entre littérature et anthropologie.
Dans le second XXe siècle, comment la question de l'écriture se pose-t-elle pour les anthropologues?? Quel rôle la littérature comme idée, corpus ou pratique, joue-t-elle dans leurs enquêtes et dans leurs écrits?? Et que font les écrivains du savoir anthropologique?? Quelle place trouve-t-il dans leur bibliothèque et dans leurs démarches??
Des échanges entre Georges Condominas et Georges Perec aux travaux d'Yvonne Verdier, de la Chronique des Indiens guayaki de Pierre Clastres aux essais de Gérard Macé, cet ouvrage s'attache à éclairer, à partir d'un corpus mêlant écrits d'anthropologues et d'écrivains, la reconfiguration de leurs rapports de 1945 à nos jours. Le propos n'est pas tant de mettre face à face littérature et anthropologie que de montrer comment, historiquement, des terrains communs, d'entente ou de dissension, ont pu se dessiner, faisant apparaître des tensions, des porosités, des convergences nouvelles. Ces compagnonnages ont relancé la réflexion anthropologique en même temps qu'ils ont modifié la littérature.
Une analyse détaillée de l'émergence d'une culture visuelle chrétienne spécifique au royaume du Kongo depuis le XVIe siècle.
Entre les XVIe et XIXe siècles, dans l'ouest de l'Afrique centrale, le royaume du Kongo était un territoire cosmopolite et indépendant, pratiquant le christianisme et actif dans les réseaux commerciaux, diplomatiques et religieux du monde atlantique. À partir d'un vaste ensemble d'objets, d'images et de documents pour la plupart inédits, Cécile Fromont examine l'émergence, au tournant du xvie siècle, d'une culture visuelle chrétienne spécifiquement kongo et retrace son évolution au cours de quatre siècles marqués par la guerre, la traite atlantique des esclaves et, enfin, au XIXe siècle, la montée du colonialisme. L'auteur livre une analyse détaillée des innovations religieuses, politiques et artistiques qui ont permis l'adoption du christianisme par le Kongo et montre que sa conversion s'est déroulée de manière dynamique sur plusieurs centaines d'années.
Les élites du royaume ont peu à peu, de manière indépendante, entremêlé pensées religieuses, formes visuelles et concepts politiques nouveaux ou anciens, d'origine locale ou étrangère, pour forger une vision chrétienne du monde inédite, évolutive et spécifiquement kongo.
Ce volume jette un nouvel éclairage sur les échanges interculturels qui se sont produits entre l'Afrique, l'Europe et l'Amérique latine, échanges qui ont façonné le monde au début de l'ère moderne. Il dresse ainsi le tableau de l'univers religieux, artistique et social des hommes et des femmes arrachés par l'esclavage à l'Afrique centrale et envoyés aux quatre coins du monde atlantique.
Comment expliquer le croisement, au cours du XXe siècle, de l'idéologie et des théories sur la violence et la créativité ? Mark Antliff examine la rencontre entre esthétique et violence en étudiant le rôle peu connu mais essentiel joué par les théories sur les arts visuels et la créativité dans le développement du fascisme en France.
Mark Antliff se penche sur la dimension esthétique des mythes fascistes dans le cadre de l'histoire de l'avant-garde. Au cours de la période 1909-1939, un nombre surprenant de modernistes ont été impliqués dans le projet, notamment des figures aussi importantes que le peintre symboliste Maurice Denis, les architectes Le Corbusier et Auguste Perret, les sculpteurs Charles Despiau et Aristide Maillol, la photographe de la « Nouvelle Vision » Germaine Krull, ainsi que le fauve Maurice de Vlaminck.
Les fascistes français étudiés ici se sont approprié, entre autres, l'esthétique avantgardiste du cubisme, du futurisme et du surréalisme, en prônant le fameux « retour à l'ordre » et l'un d'entre eux, est même allé jusqu'à rapprocher le « dynamisme » de l'idéologie fasciste de la théorie du montage du cinéaste soviétique Sergueï Eisenstein. Pour tous ces personnages, l'art moderne est le précurseur mythique d'une révolution régénératrice destinée à balayer les institutions en place, inaugurer un nouvel ordre anticapitaliste et éveiller le potentiel créateur et artistique du « nouvel homme » fasciste. Pour définir la matrice idéologique mêlant esthétique et violence, ils s'inspirent avant tout des écrits du théoricien politique Georges Sorel (1847-1922), dont le concept de mythe révolutionnaire occupe une place centrale dans les théories fascistes sur la régénération culturelle et nationale.
Trois figures sont plus particulièrement influencées par cette théorie sorélienne du mythe dans l'entre-deux-guerres : Georges Valois (1878-1945), Philippe Lamour (1903-1992) et Thierry Maulnier (1909-1988). Valois est le fondateur du Faisceau, premier mouvement fasciste français (1925-1928). Lamour, proche de Valois, crée en 1928 l'éphémère Parti fasciste révolutionnaire, avant de lancer deux revues, Grand' Route (1930) et Plans (1931-1933). Quant à Maulnier, il est l'inventeur d'une théorie du fascisme sous les auspices des revues Combat (1936-1939) et Insurgé (1937). Tous trois se réclament à la fois de Sorel et de l'avant-garde artistique, mais développent des formes radicalement différentes de fascisme. À l'instar de Sorel, ils considèrent que l'art et la culture font partie intégrante de la théorie de la révolution totale.
Une anthologie.
Au cours des trente dernières années, l'émergence d'un nouveau discours critique sur le cubisme a refaçonné notre point de vue sur le mouvement et le modernisme en général ; uniquement constitué de sources primaires, ce livre est la première anthologie à prendre acte de ce nouveau matériau critique. Afin de minorer l'influence des a priori qui conditionnent l'interprétation des éditeurs (même si ces a priori ne peuvent pas être complètement évités, on peut leur résister), ces documents ont été reproduits dans leur quasi-intégralité.
Chaque document est suivi d'un commentaire qui replace le texte (et, le cas échéant, l'auteur) dans une perspective historique et qui tient compte de l'historiographie du cubisme. Même si le corpus sur le cubisme est trop vaste pour donner à notre sélection un caractère encyclopédique, nous nous sommes efforcés de lier ensemble quatre aspects, dans un ordre chronologique, des écrits d'artistes ; un large éventail de types de critiques (manifestes d'artistes, correspondance et préfaces de catalogue) ; rapports gouvernementaux ; articles extraits de la presse populaire, de revues littéraires, de journaux satiriques et de revues spécialisées dans les beaux-arts ; des critiques négatives sur le mouvement, comme indicateur du grand débat public autour du cubisme avant la Première Guerre mondiale ; et des écrits abordant des questions sociales, politiques, scientifiques, philosophiques et littéraires en lien avec le cubisme. Nous avons choisi de circonscrire cet ensemble déjà conséquent de documents à des textes produits pendant les premières années du développement du cubisme - entre 1906 et 1914 - de manière à minorer l'impact de mémoires et de commentaires plus tardifs qui, inévitablement, furent écrits sous la pression d'événements historiques postérieurs.
Ce choix éditorial révèle toute l'importance de la Première Guerre mondiale qui bouleversa les termes du discours sur l'art et la culture. Ces changements eurent pour effet d'orienter le mouvement cubiste dans une nouvelle direction ; sous l'influence du climat culturel et des événements qui avaient transformé l'Europe en guerre, les artistes et les critiques livrèrent une interprétation très différente du cubisme d'avant-guerre.
Objets du quotidien et culture matérielle dans l'art contemporain depuis les années 1960 : une généalogie critique du postmodernisme et une réactualisation de la théorie du don.
Des années 1960 à nos jours, nombre d'artistes à l'échelle internationale ont exploré la fabrique de l'objet du quotidien en dialoguant avec un certain design dans le champ élargi de la culture matérielle. Ils interrogent la veine utilitariste des objets afin de la contrer, mais aussi le formatage des normes de goût, pour revisiter les dimensions mémorielle, affective, fétichiste, sociologique, anthropologique, de la culture matérielle. De Claes Oldenburg à Richard Artschwager, de Robert Gober à Jeff Koons, de Wiebke Siem à Rachel Whiteread, de Martin Boyce à Tobias Rehberger, de Franz West à Fabrice Hyber, entre autres, les créations mettent au jour le passage du modernisme au postmodernisme dont il convient désormais de retracer une généalogie critique. Chaque oeuvre se veut par ailleurs l'emblème de la circulation des échanges de valeurs culturelles dont on peut observer la transformation au fil du temps. Il en résulte un phénomène de mutation esthétique, politique et historique ouvrant une nouvelle appréhension de l'objet du quotidien, où la liberté de l'expérience devient fondatrice pour réinventer les modes de vie. Les artistes revisitent ces emblèmes et créent peu à peu des objets du don, dont la dimension symbolique engendre une conception des relations sociétales contemporaines porteuses de nouvelles modalités de l'échange.
Une anthologie réunissant un ensemble de textes de référence à l'approche contextualiste, dont chacun est commenté en introduction par un spécialiste de la question.
L'art est dans le monde. Tout au long du XXe siècle, des historiens d'art ont voulu montrer la possibilité et la nécessité d'éclairer la production artistique par ses conditions matérielles, sociales, économiques, institutionnelles. Mais l'histoire de l'art elle-même est dans le monde. Elle est une histoire, mais elle a aussi sa ou ses histoires, et doit elle aussi être (re)lue et pratiquée à la lumière des contextes, divers, foisonnants, parfois instables, qui la situent et la justifient. Tel est le propos qui inspire cette anthologie.
En deux volumes et trente-quatre textes, dont certains méconnus et/ou traduits pour la première fois en français, tous présentés et commentés par des historiens d'art d'aujourd'hui, l'ouvrage balaie chronologiquement le XXe siècle, de 1930 à 2000, entre Europe et Etats-Unis. De la Renaissance florentine à la photographie, de l'art des Pays-Bas à l'histoire des musées, des lectures marxistes aux gender studies, se dessine un panorama des formes et problèmes d'une histoire de l'art aux prises avec les sciences humaines, les batailles idéologiques et l'activité politique. Les commentaires contemporains démultiplient ce panorama, mettent cette histoire (ces histoires) en perspective, sans faire l'impasse sur les crises, les tensions, les apories, les silences même, qui l'ont ponctuée.
Ce premier volume, qui va de 1930 au début des années 1970, contient des textes de Jacques Mesnil, Max Raphael, Francis Donald Klingender, Gisèle Freund, Meyer Schapiro, Anthony Blunt, Martin Wackernagel, Frederick Antal, Pierre Francastel, Arnold Hauser, Jan Gerrit Van Gelder, Herbert Read, Francis Haskell et John Berger, présentés et commentés respectivement par Michela Passini, Philippe Bordes, François-René Martin, Sophie Triquet, Jody Patterson, Maria Grazia Messina, Andreas Beyer, Paul Stirton, Johan Popelard, Andrew Hemingway, Michael Orwicz, Catherine Fraixe, Philippe Sénéchal et Dorothea Dietrich.
Les relations entre l'art moderne et sa destruction.
La Destruction de l'art est le premier livre à examiner de façon systématique l'iconoclasme et le vandalisme au cours de la période contemporaine. Cette ambition est née de la chute des « monuments communistes » à partir de 1989, qui a démontré que, même en Europe, l'iconoclasme n'appartenait pas au passé. L'étude propose une vue d'ensemble, au plan international, des attaques portées contre des oeuvres d'art et des biens culturels, et recherche ce qu'elles ont en commun et ce qui les différencie, en s'appuyant sur les données empiriques et les apports de plusieurs disciplines, dont la sociologie, la psychologie et la criminologie. À l'aide d'études de cas permettant de saisir la complexité des situations et la multiplicité des acteurs, l'enquête aborde aussi bien les destructions dues à des autorités et aux propriétaires des oeuvres que le « vandalisme embellisseur » des architectes et urbanistes et que les agressions, anonymes ou revendiquées, ayant lieu dans l'espace public et à l'intérieur des musées. Attentive aux enjeux que représentent les explications, justifications et interprétations de ces actes, elle examine les changements apportés à l'iconoclasme par le « culte du patrimoine » et la condamnation politique et morale du « vandalisme », ainsi que le rôle croissant des moyens de communication et leur développement technique. Une attention particulière est apportée aux rapports paradoxaux liant l'évolution de l'art moderne à l'iconoclasme, des appels avant-gardistes à faire « table rase » de la tradition aux rejets d'oeuvres contemporaines dont on prétend les avoir prises pour des déchets. L'ouvrage interroge les liens existant entre cette histoire récente et les grands épisodes iconoclastes anciens, de la « querelle des images » byzantine à la Réforme et à la Révolution, et traite du rôle renouvelé de la religion.
Devenu un classique depuis sa publication en anglais en 1997, traduit en allemand et en espagnol, La Destruction de l'art paraît avec une bibliographie mise à jour et une préface inédite. À l'heure où l'iconoclasme artistique prospère et où les attaques contre le patrimoine culturel sont des armes politiques de première importance, il peut aider à en comprendre la généalogie et la logique.
Une étude qui s'attache à analyser la portée du geste et des matériaux de récupération par les nouveaux réalistes dans les années 1960.
1960, la France goûte aux joies des Trente Glorieuses. Pourtant un petit groupe d'artistes se détourne des objets rutilants et des factures lisses de la société de consommation pour puiser leurs matières premières dans des décharges. Suivant le chemin des chiffonniers chers à Baudelaire et Benjamin, les nouveaux réalistes explorent leur société par ses marges. C'est tout un système de valeurs qu'ils exposent par ses rejets et ses dédains. Plus encore, en mettant au jour une part impensée de la société des années 1960, ils signalent un refoulé. Les traces recueillies par les nouveaux réalistes suggèrent des absences indélébiles au coeur même du quotidien et de la banalité. Derrière les façades flétries des choses, pointent des gestes, des familiarités qui renvoient alors à des disparus dont les légions hantent toujours la mémoire de l'Europe.
Une anthologie réunissant un ensemble de textes de référence à l'approche contextualiste, dont chacun est commenté en introduction par un spécialiste de la question.
L'art est dans le monde. Tout au long du XXe siècle, des historiens d'art ont voulu montrer la possibilité et la nécessité d'éclairer la production artistique par ses conditions matérielles, sociales, économiques, institutionnelles. Mais l'histoire de l'art elle-même est dans le monde. Elle est une histoire, mais elle a aussi sa ou ses histoires, et doit elle aussi être (re)lue et pratiquée à la lumière des contextes, divers, foisonnants, parfois instables, qui la situent et la justifient. Tel est le propos qui inspire cette anthologie.
En deux volumes et trente-quatre textes, dont certains méconnus et/ou traduits pour la première fois en français, tous présentés et commentés par des historiens d'art d'aujourd'hui, l'ouvrage balaie chronologiquement le XXe siècle, de 1930 à 2000, entre Europe et Etats-Unis. De la Renaissance florentine à la photographie, de l'art des Pays-Bas à l'histoire des musées, des lectures marxistes aux gender studies, se dessine un panorama des formes et problèmes d'une histoire de l'art aux prises avec les sciences humaines, les batailles idéologiques et l'activité politique. Les commentaires contemporains démultiplient ce panorama, mettent cette histoire (ces histoires) en perspective, sans faire l'impasse sur les crises, les tensions, les apories, les silences même, qui l'ont ponctuée.
Ce second volume s'ouvre avec Linda Nochlin et se poursuit avec Michael Baxandall, Ferdinando Bologna, Nicos Hadjinicolaou, T. J. Clark, Françoise Levaillant, Jean Laude, Klaus Herding, Enrico Castelnuovo, Michel Melot, Carol Duncan et Allan Wallach, Carlo Ginzburg, John Michael Montias, Otto Karl Werckmeister, Svetlana Alpers, Thomas Crow, Martin Warnke, Robert Herbert et Griselda Pollock, présentés et commentés respectivement par Todd Porterfield, Étienne Jollet, Jean-François Luneau, Jean Pierre Sanchez, Tom McDonough, Rossella Froissart Pezone, Laurence Bertrand Dorléac, Christian Joschke, Olivier Bonfait, Neil McWilliam, Daniel Sherman, Frédéric Elsig, Jan Blanc, Vivian Rehberg, Johanne Lamoureux, Dominique Poulot, Michele Tomasi, Mark Antliff et Giovanna Zapperi.
Un ensemble transdisciplinaire de contributions d'historiens d'art spécialistes du peintre, de scientifiques, de psychiatres et de psychanalystes qui proposent de nouvelles interpétations de l'oeuvre de Courbet à partir de ses toiles, mais aussi de sa vie, de sa correspondance et d'archives relatives à sa famille, pour certaines encore inédites.