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Verticales
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«Il m'a semblé que vieillir n'était ni un naufrage, ni une performance à accomplir, mais le simple, délicat et doux refuge qu'il nous fallait construire. Une cathédrale de brindilles, ouvrage commun d'un "nous" qui nous tienne ensemble, parfaitement inclusif, hommes et femmes, attaché·e·s à cette oeuvre ultime. Ici, pas de bilan, rien d'une vie n'est compté, pas même le temps, et la mélancolie elle-même finit par être suave.» J. S.
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«Ceux-là viennent de Moscou et ne savent pas où ils vont. Ils sont nombreux, plus d'une centaine, des gars jeunes, blancs, pâles même, hâves et tondus, les bras veineux le regard qui piétine, le torse encagé dans un marcel kaki, allongés sur les couchettes, laissant pendre leur ennui résigné dans le vide, plus de quarante heures qu'ils sont là, à touche-touche, coincés dans la latence du train, les conscrits.» Pendant quelques jours, le jeune appelé Aliocha et Hélène, une Française montée en gare de Krasnoïarsk, vont partager en secret le même compartiment, supporter les malentendus de cette promiscuité forcée et déjouer la traque au déserteur qui fait rage d'un bout à l'autre du Transsibérien. Les voilà condamnés à fuir vers l'est, chacun selon sa logique propre et incommunicable.
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Ils ne sont pour rien dans mes larmes
Olivia Rosenthal
- Verticales
- Minimales
- 1 Mars 2012
- 9782070137176
Dans Que font les rennes après Noël ?, on découvrait combien certains films avaient eu d'importance pour l'héroïne du livre. Partant de ce même rapport émotionnel et non savant au cinéma, Olivia Rosenthal a restitué dans Ils ne sont pour rien dans mes larmes des portraits d'hommes et de femmes à travers l'impact déterminant de quatorze films. Elle leur a posé cette question simple et vertigineuse : « Quel film a changé votre vie ? », en se soumettant par deux fois au même exercice d'introspection.
Ainsi, dans un monologue inaugural saisissant, « Le Vertige », l'auteur relate un événement biographique douloureux dans un récit diffracté qui prend sa source dans Vertigo d'Alfred Hitchcock. Croisant la fable du film relaté essentiellement sous l'angle de la peur du vide et du suicide de sa soeur, Olivia Rosenthal remonte à la source d'une terreur adolescente. Dans « Les larmes », qui clôt ce livre, elle se demande ce qui la fait pleurer systématiquement devant Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy. Pourquoi la scène finale la remet-elle toujours dans le même état ? Qu'est-ce qui la touche de si près dans ce scénario d'amour raté ? Le texte engage avec humour d'autres pistes de réflexion qui, comme toujours chez Olivia Rosenthal, se prête à un jeu d'interlocution ne laissant jamais de côté le lecteur.
Ces prologue et épilogue viennent embrasser d'autres expériences de spectateurs. En effet, enquêtant sur les « films de votre vie », Olivia Rosenthal a demandé à huit femmes et quatre hommes d'évoquer leur film fétiche. Elle s'est ensuite librement réapproprié leurs réponses. Pour chacun de ces douze personnages (Sophie, Jean, Angélique, Béatrice, Denis.), un film a agi comme une rencontre décisive : Douze hommes en colère de Sydney Lumet, Le retour d'Andreï Zviaguintsev, Rouge de Kieslowski, L'arrangement d'Elia Kazan, Nuit et brouillard d'Alain Resnais. Qu'il soit léger ou grave, connu ou inconnu, important ou mineur, ce n'est pas le jugement esthétique qui préside à ce choc cinématographique. Vivre des histoires d'amour catastrophiques dans la lignée du Dernier Tango à Paris, rêver de devenir script pour faire comme Nathalie Baye dans La nuit américaine, ou se passionner d'anglais et de pop music grâce au déclic d'une séance en VO, voilà quelques témoignages d'adolescents devenus adultes. Ils pensent ce choc comme une éducation sentimentale, un éveil politique, un modèle existentiel même où le film a servi de déclic, apportant un réconfort ou un trouble durable, au-delà du grand écran. Revu quelques années plus tard parfois, le film culte s'avère très différent du souvenir, voire décevant. Mais la pellicule a définitivement irradié la réalité de leur destin.
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Noémi Lefebvre réarticule ici des questions qui hantaient déjà ses trois précédents ouvrages : celle des pratiques artistiques sous un régime totalitaire, celle de la culpabilisation laborieuse qui « travaille » de l'intérieur tout chômeur, et celle du réexamen du schéma oedipien à partir de la mémoire post-traumatique des guerres au XXe siècle. Pour rouvrir ces trois pistes à l'unisson, Poétique de l'emploi part d'une situation on ne peut plus concrète : entre novembre 2016 et avril 2017 - autrement dit, de la promulgation de l'état d'urgence aux manifestation contre la Loi travail -, le personnage principal (au sexe non identifié et au prénom inconnu) profite de son statut social de « sans emploi » pour flâner dans divers quartiers de la « bonne ville de Lyon » tout en cherchant, fort de son expérience d'auteur d'un médiocre roman à succès, s'il y a encore une place dans la société ici présente pour « la poésie » et « les petits oiseaux » (sic). En chemin, elle (ou il) va croiser à maintes reprises son père, un homme d'affaires cultivé qui ne sait visiblement plus quoi dire ou faire pour exercer sa bienveillante autorité sur sa progéniture.Ce dialogue de sourds intergénérationnel sur fond de chômage de masse et d'omniprésence policière n'est qu'un prétexte pour passer de la fausse naïveté d'une vocation de poète à des interrogations abyssales : peut-on faire de la poésie sous état d'urgence ? Peut-on flâner quand on n'a pas de statut social ? Peut-on travailler sans avoir un emploi ? La poésie peut-elle échapper au langage préfabriqué de la doxa culturelle ? Peut-on échapper dans sa tête aux nasses policières ? Cette dérive psycho-géographique, conjuguée aux joutes verbales désopilantes avec un fantomatique surmoi paternel, engage en profondeur un autre débat à mots couverts. D'où les conseils poétiques en dix « leçons » qui scandent l'ensemble du livre, lui donnant la dimension fulgurante d'un « Traité de savoir-survivre à l'usage des désoeuvrés volontaires ».
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Bagdad, avril 2003. La capitale irakienne s'apprête à une guerre imminente. Posée tel un échelon entre ciel et terre, une terrasse dans la ville sert de point de rencontre à deux amants. " Lui " est palestinien, voyageur, un poète déclamant des vers d'Abû Nuwâs, d'al-Maari, de Samih al-Qassim... "Elle" est étudiante en lettres classiques et fougueuse lectrice de poésie. Comme l'orage de feu qui menace, tous deux semblent en suspension dans l'air du temps, entre un ancestral conte des Mile et Une Nuits et une guerre technologique dernier cri.
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Au début des années 1990, des sans-logis de la ville de Baltimore (États-Unis) ont fondé un journal de rue, Street Voice, périodique gratuit qui compte aujourd'hui 80 numéros.
Phénomène rare, ce journal sans visée caritative ni commerciale est entièrement écrit par ceux qui vivent en marge de l'American dream : chômeurs, homeless, junkies, etc. Il constitue une somme de témoignages sous-tendus par une critique sociale radicale, d'une authenticité exceptionnelle. Paroles de l'ombre est constitué d'un choix d'une cinquantaine de textes et d'une quinzaine d'illustrations en noir et blanc mettant en relief toutes les facettes de cette riche expérience de presse alternative.
Paroles de l'ombre est précédé d'une préface de Curtis Price, principal initiateur de Street Voice.
L'ensemble de ces textes ont été choisis et traduits de l'américain par Gaëlle Erkens.