Filtrer
Rayons
Support
Langues
Prix
GOJKO LUKIC
-
Parfois certains livres traversent des décennies, et paraissent avoir sombré dans l'oubli. C'est l'un d'eux, à la reliure de maroquin rouge, qui tombe entre les mains d'Adam. À peine tourne-t-il ses pages qu'il est fasciné par les jardins merveilleux, la villa majestueuse et l'atmosphère enivrante du grand parc et de son kiosque à musique.
Adam se laisse emporter par la magie de cet univers et son imaginaire, tout en s'étonnant de l'absence de personnages. Peu à peu, quelques-uns apparaissent, et Adam s'éprend passionnément de Iéléna. Il n'a plus qu'une hâte, y retourner, la retrouver sous les rosiers de la pergola. Mais l'a-t-elle seulement reconnu ? Car lui sait que Iéléna n'est autre que la jeune fille au chapeau cloche de la bibliothèque... dans la vie réelle.
Il comprend alors que les personnages du roman sont les autres lecteurs, et qu'ils s'y croisent pour peu qu'ils lisent le même passage en même temps. Il devient dès lors aisé de s'y donner rendez-vous. Mais Adam ne saurait s'en contenter, et n'a de cesse de vouloir transposer son bonheur dans la réalité...
Le roman culte de tous les amoureux de la lecture, une ode au pouvoir de la littérature, somptueuse et libératrice.
-
Entreprise nourrie du désir juvénile et mystique d'étreindre l'univers entre les pages d'un livre, ce roman pratique un ludisme radical en jouant avec les divers éléments constitutifs de la construction narrative.
Avec la langue elle-même et avec le genre, également : almanach, fable morale, grimoire, livre des mystères, encyclopédie, récit utopique, conte philosophique, ce livre se présente avant tout comme un atlas, et l'auteur, sous les traits d'un cartographe, lance au lecteur-voyageur une invite inusitée. On y joue encore avec la structure romanesque, qui se déploie en un entrelacs de trois axes narratifs.
Le premier des axes évoqués raconte les aventures d'une bande d'amis, famille utopique composée par affinités électives. Ces huit hurluberlus partagent une maison à laquelle ils ont ôté le toit afin de supprimer une barrière entre eux et l'harmonie des sphères. Grands rêveurs, ils partagent également leurs songes. Au sujet de ceux-ci, on peut lire dans ce roman régi par un onirisme flamboyant : « Au cours de la vie les rêves peuvent rapetisser, grandir, se transmettre, se perdre, se prêter, s'offrir, se voler. Il convient de les garder soigneusement. Ils ne conditionnent pas seulement la dimension d'un individu, mais, additionnés les uns aux autres, celle de l'humanité. »
-
Un rien de lumière ; roman omnibus
Vladan Matijevic
- Noir Sur Blanc
- Notabilia
- 7 Février 2019
- 9782882505477
Hilary écrit à Donna, dont elle est follement amoureuse. Donna reçoit-elle ses mails ? Hilary a-t-elle toute sa tête ? Les feux de l'amour prennent peu à peu la forme d'un lance-flammes.
Miloutine, alias Anthracite, ex-ministre, désormais revendeur itinérant de raticide, écrit lui aussi, mais des testaments - passion qui l'anime depuis son adolescence. À qui, agonisant dans la neige, lèguera-t-il finalement ses biens terrestres ?
Georges Vérité, lui, écrit des ouvrages de vulgarisation théologique. Pour survivre. Mais, pour vivre, il expie un crime dont on n'est pas certain qu'il l'ait commis : l'autodafé d'Iouliana, son amour de jeunesse, toujours ardent, toujours incendiaire.
Triptyque crépusculaire où il ne reste qu'un rien de lumière, provenant de divers feux qui dévorent les restes, encore séduisants, du monde.
Après Les aventures de Minette Accentiévitch et Le Baisespoir du jeune Arnold, Un rien de lumière est le troisième roman de Vladan Matijevic publié en français. Vladan Matijevic est considéré comme un auteur serbe contemporain majeur.
-
Haya Tedeschi, une jeune femme d'origine juive dont les parents se sont convertis au catholicisme, travaille comme vendeuse dans un tabac. Quand la guerre touche Gorizia, cette ville frontalière italo-slovène récemment intégrée dans une nouvelle province allemande, elle rencontre l'officier Kurt Franz. Haya ne demande pas d'où il vient ni pourquoi il a été muté dans la région adriatique : elle est impressionnée par ce bel homme grand et blond, et en tombe amoureuse. C'est donc avec Kurt Franz, ancien commandant du camp de Treblinka, qu'elle aura un enfant, Antonio. Mais au bout de quelques mois, Antonio est enlevé : il fait partie du projet nazi Lebensborn.
Après la guerre, Haya devient professeur de mathématiques et refuse d'abdiquer. Elle veut retrouver son fils, mais veut aussi savoir ce qui s'est passé pendant la guerre dans cette région un peu négligée par les historiens. Elle rassemble un nombre impressionnant de documents qui sont intégrés dans le récit de sa propre histoire, dont les noms des 9 000 juifs déportés d'Italie, la biographie d'un certain nombre de nazis qui ont échappé à la justice, ou encore des épisodes moins connus comme celui de ces trains italiens qui passaient par la Suisse pour atteindre les camps de la mort.
Le roman de Daša Drndic procède par collage entre des faits historiques et le récit fictionnalisé, très personnel, de Haya Tedeschi, dans un jeu que les écrivains anglo-saxons appellent « fiction and faction » afin de confronter l'histoire collective refoulée ou oubliée au prisme de l'individu souffrant. Sonnenschein ne nous offre ni héros ni rédemption, mais plutôt l'addition bouleversante de micro-récits concernant tant de destins individuels broyés par la lâcheté de la majorité silencieuse autant que par la violence des meurtriers. Daša Drndic a réussi un grand roman sur les conséquences du mal plutôt que sur sa prétendue banalité.
-
Les quatre romans de Goran Petrovic que l'on peut lire en français sont tous portés par un souffle épique. Ce choix de nouvelles de Tout ce que je sais du temps donne à voir un autre aspect de son univers narratif, plus intime, autobiographique, autofictionnel. Si ses romans nous restituent sa merveilleuse imagination, ces nouvelles nous font davantage découvrir l'homme qui les a imaginées. Nous le suivons dans une multitude d'événements, petits ou grands, cocasses ou tragiques, de son enfance à son âge mûr. Nous apprenons de sa bouche tout ce qu'il sait du temps et de bien d'autres choses apparemment simples mais si mystérieuses, et assistons même à ses rencontres avec les Vierges...
Par un après-midi de l'année 1988, j'ai ôté de mon poignet ma montre-bracelet. Plus précisément, par un après-midi nuageux du mois d'avril, aussitôt après avoir terminé la lecture d'un livre de Borgázar que l'on m'avait prêté et qui parlait des chronâtres, créatures parasites qui se nourrissent de temps humain.
-
Solstice d'hiver est l'unique roman de Basara que l'on pourrait qualifier de roman d'amour. La thématique amour-sexualité prend toute la place. Ce qui ne n'empêche pas l'auteur de dire (page 46) : « ' je me méfie des romans d'amour. Ils sont mensonge pur ou pure horreur. Selon affinité. On ne saurait dire laquelle de ces deux options est la pire. Oui, il en va bien ainsi de l'amour. Afin de fuir notre angoisse, nous nous laissons ensorceler par l'autre pour un moment. Puis nous retombons dans l'angoisse, qui s'est entre-temps compliquée de mauvais souvenirs. Il n'est pas de haine plus répugnante qu'un amour charnel au stade de la décomposition » Or, dans cette histoire, pourtant pleine de stupre, ce stade ne sera jamais atteint car nous ne saurons pas s'il y a véritablement eu amour charnel entre Nana et le narrateur.
Qui est donc cette Nana, cet insaisissable objet de l'amour, du roman ? Elle est une sorte de Frankenstein qui résume la fascination basarienne de l'éternel féminin. Elle est complexe, contradictoire, multiple. Elle est belle et cruelle, une mante religieuse. Elle est lubrique, mais peut-être frigide, métaphysicienne tentée par la sainteté. Elle est vénale, meurtrière, mais aussi intelligente, créative, poétesse et essayiste de talent. La seule chose qu'elle ne saurait être c'est le sage modèle marial.
-
Au XVIe siècle, la vie de deux brillants acteurs de l'Empire ottoman sous le règne de Soliman le Magnifique : le grand vizir Bajica Sokolovic, alias Mehmed Pacha Sokullu, et Josèphe, alias Sinan Mimar, le plus grand architecte de l'Empire. Tous deux chrétiens d'origine, le premier serbe, le deuxième grec, arrachés à leurs familles au nom du fameux « impôt du sang » consistant à prélever un enfant mâle aux familles non musulmanes pour alimenter l'armée des janissaires. Ces deux hommes, grâce à leurs talents exceptionnels, vont s'élever, chacun à sa manière, au sommet du pouvoir.
Peut-on devenir un autre sans trahir ses origines ? Leur histoire nous est racontée, aujourd'hui, par un narrateur omniscient qui examine la question de l'identité tout en évoquant l'Empire ottoman avec son ami Orhan Pamuk, et en se remémorant des gens qu'il a connu : Allen Ginsberg, Alexander Genis, James Laflin, David Homel, Leonard Cohen et tant d'autres.
Entrecroisant essai, autobiographie, recherche et journalisme Hammam Balkania tisse, d'Est en Ouest et à travers les siècles, un récit ample et inoubliable.
-
Un professeur de lettres entre deux âges, juif belgradois, célibataire, est amené à fouiller les archives et à explorer la période de la seconde guerre mondiale qui a vu disparaître presque toute sa famille, au point que la cime de son arbre généalogique se trouve réduite à quelques branches malingres et presque sèches.
Au cours de ses recherches, il trouve la trace de goetz et de meyer, deux jeunes sergents-chefs s. s. , envoyés de berlin à belgrade dans un but précis : à l'aide d'un camion spécialement aménagé, avec goetz ou meyer au volant, cinq mille femmes, enfants et vieillards juifs de serbie devaient être exterminés. quels sont les vrais visages de goetz et de meyer ? cette question devient l'obsession du professeur, et la quête d'une réponse s'égrène au fil des pages de ce livre oú le désespoir et l'impossible identification aux bourreaux, afin de comprendre, se disent avec une violente ironie.
-
D'une terrasse à l'autre
Mira Popovic
- Viviane Hamy
- Litterature Etrangere Hamy
- 16 Février 2012
- 9782878585025
On y croise aussi bien un homme fasciné par une paire de chaussures au gris-noir subtil, qu'un pichet au motif de fleurs kitch haï par toute une famille et qui est néanmoins subtilisé par un voleur, ou encore une clé apparemment inutile que l'auteur décide de mettre dans son texte pour ne pas la jeter... Des souvenirs d'enfance qui remontent à la surface au hasard d'une rencontre ou d'une situation : comme ce sourd-muet de son village de Serbie, écrasé pour ne pas avoir entendu le klaxon d'un camion signalant son arrivée à tombeau ouvert. Ou cette course dans Paris où une femme fixe la nuque d'un chauffeur de taxi qui lui rappelle son amant : elle lui demande de ne pas se retourner pour prolonger le plaisir de cette ambiguïté et imaginer que le voyage à deux à Paris tant rêvé se réalise... Mira Popovic nous conte des souvenirs d'enfance, des histoires d'amour ou de pures fantaisies, prenant le quotidien à contrepied. Ce recueil allie avec brio cocasserie, tendresse et humour. Divisé en trois parties, ce recueil réunit des nouvelles dans lesquelles, sous une apparente normalité, surgit le burlesque et l'absurde, des nouvelles liées à la double appartenance de l'écrivain à Paris et à Belgrade, et enfin des nouvelles évoquant l'enfance et le rêve. Une grande voix de la littérature serbe à découvrir.
-
Le baisespoir du jeune Arnold, sorte de sotie postmoderne, retrace les aventures avinées du jeune Arnold qui « n'a plus de problèmes ni de logement ni de travail ni à la fac, vu qu'il s'est fait jeter des trois ». Arnold et ses amis évoluent dans un monde désaxé, excessif, un monde impossible, dirait quiconque ne s'est jamais trouvé dans un pays atteint de folie. C'est précisément dans un tel pays que l'histoire se déroule, et bien que son nom ne soit jamais mentionné, on peut y reconnaître la Serbie des années quatre-vingt-dix, et cela en dépit du fait que les personnages du roman forment une constellation onomastique purement allemande.
D'ailleurs, cet alliage serbo-allemand ajoute fortement à l'absurde apparent de ce roman, mais ouvre également tout un champ d'allusions fécond, à la fois drolatique et inquiétant.
-
En avril 1941, Hitler attaque la Yougoslavie. Lorsque Dragan, étudiant en médecine, arrive en hâte à l'abri antiaérien de son quartier de Belgrade, ses deux parents et la plupart de ses voisins ont été tués. Les hasardsde la réquisition des logements sous l'occupation allemande le voient contraint à la colocation avec un centenaire qui, comme lui, a survécu miraculeusement. Fasciné par cet homme brillant qui a connu tout un siècle d'histoire yougoslave, Dragan essaye de voir clair dans ce destin et dans la période houleuse que le Vieillard fait défiler devant lui.
Quand une jeune fille de dix-sept ans, que fréquentent les officiers allemands, apparaît dans l'appartement d'en face, l'érotisme fait irruption dans cette relation intellectuelle. Les deux hommes si différents vont alors se révéler d'une manière inattendue.
Drame implacable entre amour et trahison, ce roman dense, grave et émaillé d'un humour mordant, confirme l'acuité étonnante du regard de Slobodan Selenic. Conçu avant les guerres de Yougoslavie des années 1990, Timor mortis est à la fois une analyse subtile à l'actualité frappante et une profonde leçon d'humanité.
-
Attention : bizarre ! Qui sait comment réussir un crime parfait ? Que se passe-t-il dans la tête d'un homme enfermé la nuit dans un supermarché ou celle d'une personne chutant de la tour Eiffel ? Dans un foisonnement d'aventures loufoques et jubilatoires, Basara explore l'absurdité de nos existences, jusqu'à cet ultime point, où du néant surgit l'humanité.
-
Un écrivain de renom reçoit un mail d'un admirateur anonyme, lequel lui fait une proposition : contre une forte rémunération, l'auteur écrira une oeuvre que l'admirateur signera de son nom. Au lieu d'exprimer son indignation et de mettre fin à l'échange, l'écrivain choisit par amusement de continuer les pourparlers avec l'admirateur. En même temps, quatre des correspondants réguliers de l'auteur, eux aussi gens de lettres, se mettent à formuler des propositions similaires : tous cherchent à le faire écrire pour leur compte, soit pour finir une oeuvre en panne, soit pour des raisons plus complexes ou plus obscures. Assiégé de toutes parts par ces solliciteurs indiscrets, l'écrivain finit par se sentir victime d'un étrange complot.
-
Connu comme romancier pour ses oeuvres publiées surtout par Gallimard, David Albahari est également un des meilleurs nouvellistes contemporains de langue serbe. Hitler à Chicago est le premier recueil de ses nouvelles à paraître en français. Les nouvelles qui le constituent ont en commun le fait que leur action se situe au Canada, pays d'adoption de l'auteur. Les principaux fils thématiques qui tissent cette prose grave - à laquelle un inimitable humour donne une apparence de légèreté - sont l'immigration, le déracinement, les échos douloureux d'une guerre fratricide, les problèmes d'identité, la solitude, le choc des cultures, les rencontres improbables comme celle d'un pope serbe et d'un Indien qui discutent métaphysique.
-
Le narrateur de L'homme de neige a une idée fixe : boire du jus d'orange. Venu de l'ex-Yougoslavie, il est invité comme écrivain en résidence dans une université nord-américaine. Mais sa nouvelle vie, confortable et bien réglée, dont il note minutieusement les moindres détails, ne fait tout simplement pas sens pour lui. Ses quelques cours et conférences, ses obligations sociales et ses conversations avec les professeurs et étudiants, tout est envahi par un sentiment d'échec et d'ennui - sentiment dont il s'échappe seulement grâce à l'idée de boire du jus d'orange. Puis, cet équilibre fragile se fissure. Le narrateur a de plus en plus l'impression de flotter, voire de se désagréger. La découverte d'une armoire fermée à clef au sous-sol de son appartement tourne vite à l'obsession, et lorsqu'il cède à la tentation de l'ouvrir pour y trouver des cartes et des plans de toute sorte, il ne peut s'empêcher de les placarder sur les murs de son appartement en pleine nuit. Entouré ainsi de cartes qui illustrent les déchirures de l'Histoire et la fragilité des identités et des frontières, il sent les choses se brouiller de plus en plus autour de lui. Jusqu'à ce que les premières neiges tombent sur la ville...
-
Au début du XIIIe siècle, détournée de son but initial par l'ambition du doge de Venise qui veut s'emparer d'un manteau de plumes conservé dans le trésor des empereurs de Byzance, l'armée de la quatrième croisade prend Constantinople et la met à sac. Quelques décennies plus tard, un monastère serbe dont les fenêtres s'ouvrent sur le passé, le présent et l'avenir, est assiégé par l'armée des Bulgares et des Coumans conduite par le redoutable prince Chichman. Celui-ci convoite une plume que le supérieur garde dans sa barbe comme dans un reliquaire. A la fin du XXe siècle, dans une Serbie cernée à la fois par ses propres démons et par les forces de l'OTAN, un jeune ornithologue prend le chemin des forêts bosniaques. L'imaginaire de Goran Petrovié s'empare ici du thème de la destruction et de la résistance pour en faire surgir une étonnante oeuvre poétique qui joue avec la notion d'espace-temps, le langage, l'histoire, les genres littéraires et, de surprise en surprise, nous livre une histoire d'une beauté inouïe.
-
Qui était vraiment Friedrich Nietzsche ? Il y a dans sa biographie un trou de trois mois, et c'est au fond de celui-ci que se trouve peut-être la réponse. En effet, Nietzsche est victime d'une cabale internationale ourdie par Wagner, Lou Salomé, Freud et autres Illuminati, auxquels, moyennant une légère torsion historique, viennent s'ajouter Staline et Atatürk. En 1882, afin d'échapper à cette meute de nietzschephages, le philosophe prétend partir pour la Sicile mais s'embarque pour Chypre. Incognito. À moins que ce ne soit contraint et forcé, puisque, selon une autre hypothèse, captif du rêve d'un lecteur de Zaratoustra, il est entraîné malgré lui dans cette île au statut ontologique douteux. Quoi qu'il en soit, il y passera trois mois indescriptibles, que Le coeur de la terre s'emploie à décrire.
-
Le narrateur de Sangsues se pose des questions depuis qu'il a vu un homme gifler une jeune femme, sur les rives du Danube, sans raison apparente. Intrigué par la situation, il suit la jeune femme, puis cherche des signes pouvant expliquer ce geste. Il travaille comme journaliste dans un quotidien de Belgrade, et quand il trouve des signes géométriques sur le lieu même, son enquête s'oriente petit à petit vers un réseau antisémite. Lui n'est pas juif, mais afin d'avancer dans la compréhension des énigmes qui se présentent à lui les unes après les autres, il consulte d'abord un ancien condisciple, mathématicien de génie, puis se met à fréquenter un cercle de kabbalistes qui a pour projet de fabriquer un golem... Sa recherche prendra de plus en plus les allures d'une enquête policière, sur les traces d'un complot à tiroirs : tout n'est que faux-semblants, pièges indéchiffrables, doutes et incertitudes. L'écriture d'Albahari, toujours teintée d'une pointe d'ironie, entraîne le lecteur dans une quête labyrinthique presque ludique, à la manière d'un thriller. Derrière les apparences, l'auteur en évoquant la Serbie sous Milochévitch nous interroge sur la place de la peur dans nos sociétés et son instrumentalisation politique. Sangsues est considéré par les connaisseurs de l'oeuvre de David Albahari comme son roman le plus abouti et le plus puissant.
-
Pendant que s'accomplit le sanglant et déshonorant divorce qu'a été le démantèlement de la Yougoslavie, un autre divorce, plus intime, se consomme au Canada, celui d'un couple d'immigrés yougoslaves.
Ce "roman sur l'impossibilité de devenir adulte" raconte la déchirure complexe qui part d'un pays, passe entre un homme et une femme et se prolonge dans la conscience de leur fils, un garçon de onze ans (onze ans et demi, dirait-il, presque douze), "héros d'une histoire qui ne laisse pas de place à la paix". Après Cadeau d'adieu et Pluie et papier qui, loin d'être des romans roses, étaient des romans d'amour, Vladimir Tasic fait dans Le mur de verre une troublante autopsie du désamour.
"Maintenant elle écrivait sur la criminalité, sur une vague de règlements de comptes à Belgrade, sur le purgatoire qui ferait des survivants les nouveaux seigneurs. "Les survivants seront innocents:' Trafic de pétrole, forêts, voitures, cigarettes, café, métaux précieux. Elle citait des noms, des lieux, des chiffres. On la menaçait. Un matin elle a trouvé sur le capot de sa voiture un faisan empaillé; le soir, au téléphone, un inconnu lui a dit qu'elle pourrait bientôt finir comme l'oiseau qu'elle savait
-
Les dix-huit nouvelles de ce recueil ont un fil thématique commun : le couple. Le couple dans tous ses états : en proie à l'implacable amour qui le cimente, à ta tendre cruauté qui le lézarde, à l'usure du temps qui le délite. La finesse et la drôlerie caractéristiques de l'auteur se doublent ici d'une certaine férocité que semble lui inspirer le sujet.
-
«Voilà quarante ans déjà que je porte sur la réalité serbe le regard du patient à qui l'on demande d'une voix neutre, dans le cabinet de l'ophtalmologiste, de lire les lettres placées devant lui, et en lui changeant les verres de dire s'il voit mieux, et comment. Je réponds. Sans jamais être tout à fait certain d'avoir décrit fidèlement ce que je vois.» Stevan Medakovi?, le narrateur de L'ombre des aïeux, s'interroge sur sa vie. Avec sa femme Elizabeth il vit reclus dans leur petit appartement, dans le Belgrade des années 70. Ils s'étiolent dans un lourd silence, chacun seul et impuissant à aider l'autre. Stevan revient alors sur son passé : son éducation par une gouvernante pétrie de légendes héroïques serbes, sa rencontre avec la belle Anglaise Elizabeth à l'université de Bristol, leur fréquentation de la haute société belgradoise de l'entre-deux-guerres, l'avènement du communisme et la difficile éducation de leur fils Mihajlo, écartelé entre deux cultures. À travers le récit des événements de sa vie et d'une déchirante recherche d'identité se dessine ainsi le destin tragique d'une famille, brisée par les orages de l'Histoire.
-
Une petite ville serbe, un dimanche après-midi de l'année 1980: sous le vieux plafond du cinéma Uranie où se déploie une représentation stylisée de l'Univers, une trentaine de spectateurs - cocasse Serbie en miniature - assiste à une séance mémorable. Pendant que le ciel en stuc fatigué - emblème lézardé de la transcendance collective -, s'effrite doucement mais sûrement au-dessus de leurs têtes, la séance est interrompue par une annonce sidérante, qui va marquer la fin d'un monde... Une fable légère, ironique, bouffonne sur toute une sér(b)ie noire de petits et de grands désastres.
-
Les aventures illustrées de Minette Accentiévitch
Vladan Matijevic, Gérard Dubois
- Les Allusifs
- 1 Septembre 2007
- 9782922868807