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Dans l'histoire littéraire, voici le premier roman - dit policier... indispensable à votre culture livresque...
Ceux qui avaient parlé de crime ne s'étaient malheureusement pas trompés, le commissaire de police en fut convaincu dès le seuil. Tout, dans la première pièce, dénonçait avec une lugubre éloquence la présence des malfaiteurs. Les meubles, une commode et deux grands bahuts, étaient forcés et défoncés. Dans la seconde pièce, qui servait de chambre à coucher, le désordre était plus grand encore. C'était à croire qu'une main furieuse avait pris plaisir à tout bouleverser. » Emile Gaboriau est le premier à créer la figure romanesque du policier enquêteur qui aura, comme on le sait, une descendance féconde.
Il faut évoquer le plaisir qu'on a à relire ce classique du roman policier, au-delà de la résolution de l'affaire elle-même. L'Affaire Lerouge, et les autres livres de Gaboriau, héritiers des romans populaires, ce sont des digressions, des chemins de traverse, des péripéties compliquées, l'exploration du passé des protagonistes, l'explication des motifs du crime et du modus operandi. Cela possède un charme véritable, qui faisait les délices d'André Gide, grand amateur de polar, comme Cocteau ou Mac Orlan. » (extrait de la préface d'Hervé Delouche) -
Paul Feder soulève le couvercle sur des trafics en tout genre... il est temps de nettoyer la pourriture...
UNE FOIS L'ECHELLE convenablement posée, le vieux grimpa sur la cuve. Le banyuls avait débordé et coulé sur le dessus, ça n'aurait pas dû se produire, la fermentation était finie depuis longtemps. Il déverrouilla les fixations de la trappe et se pencha prudemment. Le vin affleurait le bord supérieur de la cuve, quelque chose de bizarre flottait sous la surface. Alfons tendit la main et tira l'objet à lui. C'était un tissu, genre veste. Le vieux mit quelques secondes à réaliser que dans la veste il y avait un corps, un corps sans tête.
Il se redressa et eut un début de vertige. La cuve avait été collée par le sang, le sang du cadavre... Il découvrit alors le visage de Romain, qui l'observait d'en bas avec curiosité.
- Tout va bien, pépé ? demanda le jeune qui avait remarqué le teint livide du vieux.
- Oui... euh, je viens de me souvenir d'un rendez-vous important à la Chambre d'Agriculture, à Perpignan. Tu peux rentrer chez-toi, va, annonça-t-il d'un ton incertain.
Avec Tsunamis on retrouve les ambiances rythmées de Gildas Girodeau, sombres mais pleines d'humanité. Ce polar marque le grand retour de Paul Feder et de tous les personnages de la saga initiée en 2005. -
La Castille profonde, ses élevages de taureaux de combat et son passé franquiste qui pèse lourd, un retour aux sources sous haute tension... LE RAGOUT commence à bouillir. Ana verse lentement le contenu de la casserole dans une soupière. Le manche est brûlant. Ses mains de servante ne sentent plus le chaud ni le froid. Elle empoigne les anses, se dirige vers la salle, ouvre la porte à double battant d'un coup de rein, à reculons, se présente à l'unique table occupée.
Sourires narquois. Regards fouineurs.
La crasse ordinaire.
Elle se tourne vers la fenêtre. La silhouette du patron qui l'a mariée se détache de dos, à contre-jour, dans l'encadrement. Les pales du ventilateur de plafond ondulent sa maigre chevelure. Il fume en lisant le journal et en hochant la tête.
- C'est pas trop tôt ! maugrée-t-il en écrasant son mégot avec le talon, sans se retourner. On ne peut pas éternellement faire vivre toute une population sous la menace et dans le silence : la vérité finit par sortir, et tant pis pour les dégâts... Une version papier est disponible chez The Book Edition -
Paul Feder, menant jusque-là une existence confortable, se transforme en marin marginal quand il se retrouve plongé dans une aventure tragique au rythme soutenu. Incapable de rester à quai lorsque rodent l'injustice et le danger, Feder, le catalan, s'entoure d'une bande chaleureuse et solide prête à tout risquer à ses côtés.
Il faisait un vrai temps d'hiver dans le midi. Le vent du nord soufflait en tempête dans un ciel cristallin où aucun nuage ne parvenait plus à s'accrocher. Le petit cimetière était noir de monde. Paul frissonna, il avait oublié les morsures du vent. Le cercueil descendait au bout de ses cordes. Les fossoyeurs avaient du mal car son ami était lourd, lourd comme cette peine qui l'écrasait. C'était cette nuit, dans l'appartement du XIVe arrondissement de Paris où Paul vivait depuis dix ans, un téléphone avait sonné. Au bout du fil il n'avait pas reconnu la voix, tant elle était cassée, rompue. Cette voix venait d'ailleurs, d'un monde de tristesse lointain et monotone qu'il ignorait.
- Paul ?
- Oui ... qui est-ce ?
- Paul, François est mort.
Paul Feder, vrai de vrai Catalan basé à Paris, aime les femmes, la cuisine et les bons vins. L'amitié et la fidélité sont sa religion. Clairement engagé du côté du coeur, cet humaniste ne supporte pas l'injustice. Sur mer comme sur terre, cette fiction réjouira les amateurs d'aventures. Gildas Girodeau sait écrire comme personne une palpitante fiction instructive, porteuse de valeurs qui au lieu d'alourdir le propos le dynamise avec bonheur. La suite des aventures de Feder viendra bientôt réjouir les lecteurs.
Noir Côte Vermeille rassemble les deux premières aventures de Paul Feder : Rouge Tragique à Collioure et Malaguanyat. La Suite catalane comprend également Nuclear parano et La Dans des Cafards parus chez Horsain. -
Les troubles d'un ex prof plongé dans une paranoïa éblouie sous le soleil d'Italie. Une villégiature riche et débilitante à la fois, un roman original arrosé au limoncello et baigné du bruit des cigales...
[...] Pensez, se souriait-il en haussant involontairement les épaules, il fallait, entre autre, qu'il la rencontre, elle, et dans la plus grande discrétion, cette magnifique pute de luxe, si redevable en haut lieu de tant d'intelligentes compassions.
Il ne put pas s'empêcher de produire un petit rire sarcastique à peine étouffé.
Eh oui cette bombe humaine était paradoxalement le catalyseur indispensable de l'histoire, une effigie vivante du raffinement libidinal.
En définitive, se marmonnait-il de plus en plus grassement, elle n'a pratiquement rien su cette diablesse. Elle avait le feu vert sommital c'est tout. Et comme lui, le compagnero, elle avait circonstanciellement carte blanche.
Elle serait la « chèvre-émissaire », ça l'avait fait sourire l'expression, le temps d'une séduction éclair.
Il fallait vite charmer, dévoiler...
Elle, elle avait dit avec un petit accent de l'Est qu'elle allait : « Dessiner avec son corps des courbes asymptotiques », c'était exactement ses termes. Asymptotiques, putain !
Maintenant qu'il y pensait, il lui apparut qu'elle était sans aucun doute possible du type péripatéticienne, mais très cultivée, en tout cas beaucoup plus que ce qu'il en avait pu imaginer au premier contact...
Elle avait même rajouté avec une moue enfantine : « Autour d'une érection concupiscente de macho gras »...
Dingue !
Un beau jour sur une petite île, un type est débarqué d'un hélico avec une oreille en moins, et un petit trou en plus dans la tempe. Sur le point de trépasser, on le ranime avec toutes sortes de petits cailloux blancs aiguisés comme les dents des requins du même métal. Doucement, avec plus ou moins de tact, on ressuscite sa surprenante réalité. Entre flashback émoussés et thérapies de pointe, notre homme, ex professeur de lettres, va revivre, dans tous les sens du terme, le parcours de son existence rocambolesque. Aussi le voyage autour du monde de ce drôle de zigoto est-il à cataloguer dans le registre : pertes et fracas...
Après Villa confusione, José Noce nous entraîne à nouveau dans son imaginaire frappadingue. Il a emprunté son titre à Nietzsche. À lire, à l'ombre des pins, un limoncello à portée de gosier... Que du bonheur ! -
Paul Féder, sa goélette, son équipage et ses amours : aventures au rendez-vous quand les nuisibles se pointent...
Le thonier fonçait à pleine vitesse dans la nuit noire, au moins dix-sept noeuds, la mer semblait calme. Pourtant, une imperceptible houle commençait à l'agiter, menaçante respiration de la tempête approchant par le nord. En cette fin mai la lune n'était qu'un mince croissant que l'on apercevait encore vers l'ouest, entre les nuages. Le jour ne tarderait plus maintenant. Dans la timonerie éclairée par la lueur orange des instruments de bord, José sentait une boule d'angoisse durcir peu à peu dans son ventre. Décidemment ce commandement ne lui plaisait pas. Il ne l'avait accepté que contraint par la misère où il se trouvait, la crise de la surpêche du thon l'ayant privé d'embarquement. Cette année-là, tous les navires sous pavillon français étaient restés à quai, ayant largement dépassé les quotas fixés par l'Europe. Enfin, c'est ce qu'ils avaient dit, car José n'y comprenait plus rien à ces histoires de quotas. Les espagnols, eux, pouvaient encore pêcher un peu et certains bateaux passés sous pavillon Libyen continuaient tranquillement à travailler sans limite. Ils faisaient fortune avec les navires usines japonais, pendant qu'eux cherchaient désespérément à s'embarquer, même sur une « estrasse » ! Réédité aux Editions du Horsain sous le titre La danse des Cafards ce roman appartient à la Suite Catalane. Un polar mais pas que. Une réflexion sur la fameuse Françafrique qu'à tort l'on croit morte. Ce roman a reçu le Prix Delta Noir 2015. (Edition papier chez Horsain, distribution Pollen) -
Qui n'a jamais rêvé d'une nouvelle virginité intellectuelle dans la fleur de l'âge ? Mais attention, recouvrer son identité n'est pas forcément un cadeau...
De minuscules vagues berçaient mon corps sur le rivage. Echoué dans la douceur de l'aube, je revenais à moi peu à peu. Les rayons obliques du soleil levant irradiaient tendrement à travers mes paupières closes. Cette sensation de voile laiteux, la tiédeur de l'eau, une brise caressante, la finesse du sable quartzique au creux duquel ma tête s'était moulée, le susurrement de la mer, tout concordait à mon maintien dans cet état second. J'aurais pu rester là des heures, semi conscient, dans l'ignorance totale de l'heure, du jour, du lieu, croyant ouvrir les yeux dans l'obscurité de ma chambre ou la promiscuité encensée d'un cours de yoga. Soudain une infime vibration vint troubler la quiétude de l'air. Insidieuse comme les prémices d'une rage de dents. Cette sensation désagréable se reproduisit à plusieurs reprises. Elle perdura. D'intermittente et lointaine, elle devint entêtante. Un bourdonnement saccadé, agressif, croissant. Le fracas d'un rotor, enfin identifié, vint définitivement briser cette fragile harmonie. J'ouvris les yeux sur un hélicoptère en stationnement à la verticale. Ses pales brassaient mon espace vital avec une énergie furieuse soulevant des paquets de sable. Mon rythme cardiaque s'emballa. À ce moment seulement je me rendis compte que j'étais nu. Nu comme un ver ! Quelle était donc cette mauvaise blague ?
Survivre au passage d'un tsunami et se réveiller totalement amnésique. C'est le point de départ d'une aventure aux multiples rebondissements. Car le retour de la mémoire peut rimer avec dangers. Un suspense millimétré de Franck Membribe en grande forme romanesque.
(Edition papier chez Horsain, distribution Pollen) -
Sauver la planète en dézinguant les affreux...
[...] La lettre I peinte en rouge sang sur le capot d'une Tesla Roadster blanche fait le tour du monde. Le groupuscule a encore frappé. Dans le comté de Tarant, état du Texas cette fois-ci. Sa nouvelle victime : Richard Wyatt JR, magnat du gaz de schiste sans scrupule. Une photo volée de la scène de crime circule sur les réseaux sociaux : l'homme ligoté et bâillonné sur son siège en cuir, les yeux révulsés par l'imminence de la mort. L'autopsie en révélera sans difficulté la cause insolite : une injection de Pentobarbital, solution à usage vétérinaire. De quoi abattre un boeuf musqué. [...]
De Marseille à la Russie, de la Palestine à l'Irlande, un roman picaresque où « l'écologie punitive » à la papa est déclassée au profit de l'éradication active des pollueurs. -
Le meurtre d'un ami lors des fêtes à la Havane va entrainer le héros dans une enquête pleine de risques... mais l'amour est en embuscade sous les Tropiques... DANS LE GRAND HALL de l'aéroport José Marti, les verrières centrales du plafond tubulaire diffusent une lumière blafarde. Vincent, trentenaire débraillé tire nonchalamment sa valise à roulettes jusqu'à une baie vitrée. La pluie diluvienne d'un orage tropical se déverse à jets continus comme d'épaisses cordes translucides. Un fracas métallique en provenance du toit, provoqué par l'averse, accompagne ce spectacle. Le jeune Français, mal réveillé après un vol transatlantique, semble fasciné. Les brochures touristiques lui avaient vendu un ciel bleu azur et la douceur hivernale des Caraïbes. La touffeur ambiante le pousse à retirer son blouson. La veille à Paris un épais brouillard maintenait la température proche de zéro. Un éclair aux ramifications multiples déchire l'horizon. Il est suivi de peu par un coup de tonnerre d'une rare violence qui fait trembler la structure entière de l'aérogare. Vincent se tourne vers Hervé son compagnon de voyage qui déjà se dirige vers les guichets des compagnies de loueurs de voitures. L'homme d'âge mûr ne se laisse pas distraire par la première anomalie météorologique venue. Cuba et ses caprices il a déjà connu en d'autres temps. Vincent le rejoint sans conviction. Le décalage horaire le rend d'humeur maussade. Les formalités pour prendre possession de la berline coréenne s'éternisent à cause des coupures de courant qui obligent à relancer le système informatique. L'employé au sourire imperturbable parait doté d'une patience à toute épreuve. La troisième tentative sera la bonne. Il leur tend enfin les clés et le carnet de bord tout en faisant une moue dubitative en direction du tarmac inondé. Il faudra attendre une accalmie avant de partir à l'assaut du long lézard vert... La Cuba d'aujourd'hui, entre pénuries de tous ordres et dictature persistante, sur fond de musique et d'orages tropicaux est restituée avec justesse et saveur par Franck Membribe, observateur avisé. Quand se déchaînent les passions, mort, amour et violence se conjuguent au son du reggae. Havanaise, Franck Membribe, roman, collection Noire Soeur, prix 5,99 EUR La version papier est parue aux éditions du Horsain EAN 9791023409031 Fiction, tropiques, Cuba, La Havane, meurtres, enquête, police politique, manipulation, violence, enquête, trafics, amour, tourisme
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Il y a des professions qui n'offrent pas de garantie en matière de retraite : tueur professionnel par exemple...
[...] - Tu peux tomber la veste, tu sais.
Marvin tombe la veste. Ici, il peut. Ce n'est pas Albert qui se formalisera de voir le Colt à canon long dans le holster qu'il porte sous l'aisselle droite, crosse en bas, revolver maintenu en place par une languette de cuir à velcro épousant le percuteur. Marvin est gaucher, déteste les automatiques et ne cherche plus à défourailler express depuis belle lurette - depuis qu'un plus rapide que lui a démoli sa rotule.
- Je me doutais que ce serait toi qui viendrais, Marv'.
- Mieux valait pour toi, non ? Un autre serait venu en bagnole, discrètement...
- J'aurais été averti quand même ! Depuis le temps, je me suis fait des amis dans la région. Les têtes inconnues sont vite repérées. Les gens d'ici ne sont pas méchants, seulement curieux... Tu as fait bon voyage ? [...]
Jean-Hugues Oppel continue à jouer avec les situations archétypales du polar : le tueur fatigué, le contrat de trop, et en quelques pages vous offrent un condensé d'humanité très noire... Pourquoi se pastiller 300 pages alors qu'un shoot de 20 pages d'Oppel vous offre un pied identique ?... -
Une fille ravissante, un jeu de séduction et un mystérieux secret à la révélation fatale qui tranche dans le vif du sujet...
Je suis mort ce matin. Tout doucement la vie m'a quitté, le sang s'est écoulé, mon coeur de battre s'est arrêté.
Je l'ai mérité.
Un an plus tôt.
Comme chaque matin, je descendais les deux étages de mon immeuble. Je partais pour une longue journée de labeur un sac poubelle à la main que j'abandonnais lâchement dans un container sur le trottoir. Des effluves nauséabonds me montèrent au nez, déchets des habitants de tout un bâtiment. Des jeunes, des vieux, des grands, des petits, des gros, des minces, des soignés et des crados. On se connaît un peu, on se fait signe parfois, un hochement de tête, un petit sourire à peine ébauché, rien de plus. Pas d'apéros entre voisins, rien. Triste constat. Je tournai au coin de la rue, le temps était plutôt agréable et la température clémente. Nous étions en avril, les arbres commençaient à fleurir. Cette perspective me mit en joie et c'est avec bonne humeur que je pénétrai dans l'estaminet où chaque matin Francis me servait un café. [...]
Quand des faits très anciens brûlent toujours la mémoire de celle qui les a subis alors que leur auteur a tout oublié, presque tout, la pulsion vengeresse vous étouffe, à moins qu'un simple ustensile vienne vous libérer... Odile Marteau-Guernion emprunte la voie noire avec conviction et talent... -
Big Data, réseaux sociaux, des dangers réglés à la manière N... N comme Nettoyage à sec... d'une impitoyable efficacité...
[...] Il s'assied, désactive le mode avion de son portable. Rapide check des nouvelles sur le fil d'actualité de Libé.fr. L'appli s'ouvre sur la photo d'un homme d'une cinquantaine d'années, type caucasien marqué, yeux en amande, teint blafard, barbe naissante poivre et sel. « Yaroslav G., directeur général de FaceApp, sauvagement assassiné devant son domicile parisien. »
Il clique, parcourt l'article en diagonale. 3h du matin. Seizième arrondissement. Pied à terre parisien. Le russe brûlé vif. Garde du corps abattu (sniper ?). Acte signé d'un grand N tagué à la peinture jaune sur le trottoir. Vidéo agression postée sur Snapchat. Virale...
Dans la collection «Il est N », Nils Barrellon signe le #4. Où N affronte les voyous du net. À sa manière décapante. S'il est possible de l'approcher, le pister n'est pas sans danger. -
Personne ne l'a vu, personne ne le connaît. Violent, dangereux, il est le mal incarné, il est l'ennemi public N°1...
Quand la porte encadre ce beau mec avec ses boursoufflures musculaires appétissantes sous son t-shirt siglé « J' Le Havre », je lui cale dans les dents :
- Ça urge, panique maxi au sommet, j'ai besoin que tu m'allumes de tes lumières.
C'est un type réglo, et pas compliqué, il se désape recta. Un petit cul musclé d'enfer et une teub à tomber à genoux. Un profileur de ce gabarit, elle n'est pas née celle qui voudrait me le dérober. L'avantage, avec Jmamba, c'est son mode de réflexion, la forme de sa cogitation, le lieu d'extraction de ses intuitions. Il possède un mode opératoire pas banal. Pour émulsionner sa cervelle en vue de profiler les criminels, il a besoin d'une sieste crapuleuse à l'issue de laquelle ses idées naissent dans les volutes de sa Pall Mall. C'est le genre d'exercice intellectuel propice à contenter, et ma libido, et mon professionnalisme. Je n'ai pas le temps de lui faire un topo de la situation qu'il est déjà au lit, chapiteau dressé, les bras tendus vers moi dans une prière touchante et un voussoiement hiérarchique qui m'électrocute :
- Henriette, auriez-vous l'obligeance d'agiter mes grelots !
Le pays est au bord de l'implosion. Depuis quelques semaines un ennemi public se déchaîne, les attentats sanguinaires qu'il commet se multiplient. Les médias le surnomment la « Bête » tant la bestialité de ses crimes qu'elle signe d'un grand « N » traumatisent l'opinion. L'agente spéciale Bulot est chargée de « traiter » la « Bête » avec l'aide de Jmamba, le profileur spécialiste de la traque des humanoïdes déréglés. Le cortex de « N » aurait-il été hacké, transformant ce brave petit soldat du capitalisme mondialisé en soldat de l'« e-monde » ? La chasse à « N » est ouverte !
« Il est N » est une collection de récits courts, noirs, inscrits dans notre époque. Périodiquement un nouvel épisode du feuilleton par un nouvel auteur. Jérémy Bouquin qui a créé cette série dans l'esprit des feuilletons de la grande époque de la littérature populaire renoue avec l'esprit du mauvais genre. N serait-il un nouvel avatar de Fantômas qui aurait mangé du Poulpe enragé ? Max Obione a l'honneur d'ouvrir la série, d'autres auteurs piaffent pour apporter leur contribution de chaos et de fureur.
Version papier sur la librairie de TheBookEdition. -
Quand le sourire de la serveuse est trop sucré, l'addition est souvent salée. Ce type-là aurait dû le savoir ; il va payer cher cette ignorance.
L'homme se lève. Il cherche du regard la jeune femme pour lui sourire. Elle débarrasse une table dans le fond de la salle, de dos. Il attend. Elle disparaît dans les cuisines. Embarrassé, il sort sans lui dire au revoir. Le froid glacial lui brûle les poumons à la première inspiration. Le canal de la Villette commence à geler par endroits. De fines plaques de glace épaississent les eaux grises. Il met son bonnet, allume une cigarette et commence à marcher.
- Monsieur !
L'homme se retourne. La jeune femme le rejoint...
Franck Membribe promène un oeil à la fois indulgent et sans illusion sur ses contemporains. Ses nouvelles scannent au fil de leur parution les torts et les travers de notre société contemporaine.
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Le jeu ou l'errance comme ultime échappatoire d'une vie insupportable
Le cinq, suivi du vingt-et-un... Sa date de naissance et celle de son fils ! Le neuf et le dix-neuf, qu'elle coche au hasard, sortent à leur tour. Irène ne veut pas montrer la tension qui monte en elle. Un raidissement la saisit au niveau de la nuque. Un nouveau numéro s'affiche : le deux ! Elle l'a. Le suivant également. Et le suivant aussi... Ses doigts se crispent autour de la tasse froide. Irène ne bouge pas. Elle ne veut rien montrer. Il ne manque plus qu'un numéro et elle saura... Le quatre, il lui faut le quatre !
Dans ses deux nouvelles, Frédérique Trigodet brosse avec brio le portrait de deux femmes fuyant leur quotidien étriqué, l'une dans le jeu et l'autre dans l'errance ; leur destin sera fatal. Du sombre noir, par une nouvelliste de très grand talent.
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Pianiste de bar est un métier qu'on ne peut aimer qu'à la folie...
DEBAR, C'EST MON SURNOM. Je suis saxophoniste occasionnel, guitariste à mes heures et pianiste de vocation. Un type en « iste » comme dans lampiste. Bref, un employé subalterne du Stringate. Un point de suspension précédant le mot bar...
A force de nous seriner, soit on tire sur le pianiste, soit on l'enferme. Roland Sadaune s'adonne à son genre favori : la nouvelle noire, tantôt picturale, tantôt musicale, pour le plaisir des lecteurs.
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Le commissaire Francis Duval rit jaune dans Chinatown sur Seine.
Le commissaire Francis Duval, ex-cador de la Crim', se traîne sans enthousiasme dans les couloirs au 36, quai des Orfèvres. Le soir, après le service, sa vie s'illumine enfin ! La présence de Minh Tuyêt agit sur lui comme un catalyseur. Francis se réveille. Avec elle, il irait jusqu'en enfer - en passant toutefois par le septième ciel. Lorsque les mafias de Paris 13e s'en prennent à Minh Tu, Francis voit rouge-sang. La Teigne refait surface. Désormais, là où Duval passe, les malfrats trépassent.
Le divisionnaire Monteil assiste goguenard à ce jeu de massacre...
Tombé tout petit dans la marmite de l'imaginaire Patrick Bent a publié une douzaine de romans noirs et de polars. Marin, physicien, pataphysicien aussi, inlassable bourlingueur, il s'est établi en Bretagne après de longues années consacrées aux lasers. Avec Marionnettes, il apporte une contribution pimentée à la saga Noir de suiTe. 5eme de la série -
C'est fou cette manie qu'ont les amoureux des chats de faire des phrases et pire encore...
« Salut, le chat ! » Le matou se cabre, Francis occupe son territoire, empiète sur son chez-lui. Il précise sa pensée : « Maaaaaaooo ! » Francis tente une approche, le chat déguerpit du balcon, file au rez-de-chaussée. Minh apparaît, elle porte un jean, un tee-shirt. « C'était quoi ? - Un copain. - Un copain ? - Tu vois Baston, tu vois Trottoir ? Eh ben pareil, mais en plus chatouilleux. - Ça promet ! La suite du programme ? - Acheter des clopes. »
Jérémy Bouquin a l'art de brouiller les pistes et de tendre vos nerfs jusqu'à la rupture. Vos nerfs, et surtout ceux de Francis Duval, un dur de dur de la Crim' mais papa gâteau sitôt qu'on chatouille son chat, Baston. Tuer un chat, c'est un jour passer à l'homme. C'est passer l'ultime marche, tu comprends ? Un chat, c'est le dernier palier avant le massacre final !
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Amour et haine étroitement imbriquées... La famille, la meilleure et pire des choses...
« Il y a quelques heures, je semais de la monnaie du pape comme un gentil papi à la retraite et, tout d'un coup, mon vit et mes couilles me submergeaient le cerveau et les pensées les plus cochonnes me sautaient à la gueule toutes griffes dehors comme une panthère en chaleur tenue trop longtemps en captivité. De là où j'étais je ne voyais que son visage à elle qui dépassait au-dessus de sa masse à lui et j'étais saisie par la jubilation qui noircissait ses pupilles. »
Brigitte Guilhot a un talent tout particulier pour dessiner des ambiances terriblement glauques, effrayantes, suscitant la lente montée de l'angoisse. Inéluctablement noire !
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La vengeance est un plat qui se mange froid. La recette de l'Indien sera mortelle.
« - Saviez-vous que les arbres parlent ? Ils le font pourtant ! Ils se parlent entre eux et vous parleront si vous écoutez. L'ennui avec les Blancs, c'est qu'ils n'écoutent pas ! Ils n'ont jamais écouté les Indiens, aussi je suppose qu'ils n'écouteront pas non plus les autres voix de la nature.
- Pourquoi est-ce que tu me dis cela ?
- C'est une phrase que nous autres Indiens aimons beaucoup, cela veut dire qu'il faut écouter la nature, la regarder, apprendre d'elle, la respecter.
- Je ne suis pas venu ici pour une leçon de sagesse l'indien, mais parce qu'il se dit que tu as des vertus de sorcier, de guérisseur, et moi, je ne vais pas bien. »
Petrosky, ouvertement partisan, raconte une histoire comme il y en a eu des milliers pendant deux siècles. Mépris des autochtones, violence, génocide. Mais parfois, le « sauvage » se rebiffe.
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Prendre un bain de minuit à Barneville, même pour draguer, il faut vouloir. A aglagla ! Trop tard, le piège se referme...
« C'est pas un temps pour se baigner...
- Non, c'est vrai... C'est encore moins le temps idéal pour un bain de minuit.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Que s'il fait toujours aussi froid, et s'il y a toujours autant de vent ce soir... ce ne serait vraiment pas idéal pour un bain de minuit.
- ... à moins d'être un peu cinglé... »
Plus tard, Vincent penserait qu'il fallait être encore plus fou pour négocier un baiser d'Anne Castaldo. » Ce jeune auteur, encore proche de l'adolescence, rend compte avec justesse des affres d'un amoureux transi piégé par une petite garce qui promet. -
Refusant de se soumettre à l'initiation imposée par son entreprise, le jeune cadre dynamique sera « mouché »...
« Pourquoi est-ce que, de deux entrepreneurs, artistes ou créateurs ayant les mêmes dons, le même talent, les mêmes possibilités, l'un réussit là où l'autre est condamné à l'obscurité ? Si Van Gogh avait été initié, croyez-vous qu'il serait mort dans la misère et la maladie, incompris de tous ? Ce déchet (il désigna le malheureux) n'est rien, une loque à peine humaine, un rebut. Personne ne remarquera sa disparition, personne ne le pleurera, ce sera comme s'il n'avait jamais existé. Et qu'importe si cent, mille comme lui doivent disparaître pour donner naissance à l'élite, au sel de la nation et du monde ? »
Dans ce Noir de suiTe, Patrick Eris tire la série vers le fantastique noir avec lequel il joue de ses prédilections, la compétition à mort des cadres dans les entreprises, le jeu des forces obscures... Une structure romanesque originale et un style efficace autant qu'évocateur. -
L'Histoire est émaillée de mystères. En voici un de plus, rapporté par un témoin invisible dans le Berlin de 1945...
« Assis en face du lit conjugal, je les ai vus passer à la salle de bain chacun à leur tour, revenir se glisser sous la couette et se souhaiter bonne nuit. Encore une fois, même pas un baiser. Mais j'avoue que de l'avoir vu, lui, dans sa tenue de nuit, cela m'aurait presque arraché un éclat de rire, ce pyjama grotesque à rayures, et dire que je n'avais pas d'appareil photo avec moi, quel con ! Je ne savais pas que les « ectoplasmes voyageurs temporels » dans mon genre dormaient, je me suis assoupi... »
On se laisse embarquer dans cette histoire frisant le fantastique par un Petrosky au mieux de sa forme romanesque. Une manière de révéler les dessous d'un événement historique qui n'a pas fini de livrer son énigme...
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Une eau malfaisante sème la désolation...
« La source au fond du jardin était son seul trésor. Elle l'avait toujours été d'ailleurs. Avant les événements et encore maintenant. Où aurait-elle trouvé de l'eau sinon ? C'était bien la seule source du village et elle n'avait pas envie d'aller voir si celle du village voisin donnait encore. Elle avait entendu dire que les soldats l'avaient bouchée, condamnée. Les mêmes qui voulaient l'expulser. Mais ils ne l'avaient pas eue. Ni elle ni son eau. »
Valérie Allam possède la puissance d'évocation si nécessaire pour raconter une histoire en quelques pages, l'histoire d'une résistance désespérée contre la Malfaisante...