1559-1629 est une séquence dramatique pour le royaume de France, profondément divisé par la question religieuse. Les protestants constituent environ 10% de la population française au début des années 1560. Les monarques sont de jeunes hommes incapables de gouverner par eux-mêmes ou des princes déconsidérés aux yeux de leurs sujets. En dépit des efforts de Catherine de Médicis et du chancelier Michel de L'Hospital, qui accordent aux protestants la liberté de culte, le royaume sombre dans le chaos:exactions et batailles se succèdent et les violences culminent en 1572 avec la Saint-Barthélemy. On assiste même à deux régicides (Henri III en 1589 et Henri IV en 1610).Temps de crise sans précédent, les guerres de Religion constituent le creuset de la monarchie absolue d'Ancien Régime. Henri IV parvient à reconstituer l'unité du royaume autour de l'idéal d'obéissance à la figure royale et son fils Louis XIII bénéficie de ses succès pour achever de créer une monarchie puissante capable de s'imposer sur la scène européenne.
En six volumes d'exceptions, publiés entre 1994 et 2002 aux éditions de Fallois, Simone Bertière a raconté l'histoire des reines, célèbres ou oubliées, qui ont fait la France de la Renaissance à la fin de la monarchie. Voici l'édition définitive - en un beau et fort volume - des deux premiers consacrés au XVIe siècle qui ont vu s'épanouir comme jamais le pouvoir des femmes avant que les tragédies des guerres de religion n'engagent une éclipse accentuée par l'application de plus en plus rigide de la loi salique. Sous la plume élégante et inspirée de l'auteur entrent notamment et successivement en Majesté Anne de Bretagne, Jeanne de France, Marie d'Angleterre, Claude de France, Eléonore d'Autriche, Marie Stuart, Marguerite de Valois, Louise de Lorraine et naturellement Catherine de Médicis.
Pour cette nouvelle édition de luxe, illustrée de deux forts cahiers hors-texte, la grande historienne a entièrement revu, corrigé et actualisé son texte qui fait, rare en histoire, a été unanimement salué par la critique tout en racontant un très large succès public.
Un maître-ouvrage qui conjugue au plus point la rigueur historique avec l'art du récit.
Rien ne prédestinait Henri de Navarre à devenir Henri IV, roi de France. Le trône de France était bien pourvu en héritiers et l'adhésion de Henri à la Réforme le disqualifiait. Il lui fallut pour y parvenir trente ans et une hécatombe. Son itinéraire est jonché de morts, par la guerre ou la maladie. Il en émerge les mains pures, sans une égratignure. Une chance ? Pour les chrétiens d'alors, tout ce qui advient est dû à la Providence, dont ils sont les agents obligés. Henri, d'une intelligence hors pair, se crut voué par elle à une mission : rétablir la concorde dans un pays déchiré par les guerres de religion.
Un récit fidèle à l'histoire, mais aussi palpitant qu'un roman, retrace au fil du temps son parcours tumultueux. Toute une époque revit, dans sa singularité. Simone Bertière déploie à nouveau son talent de conteuse, rendant clair ce qui est compliqué, redonnant vie aux personnages, restituant le climat des temps anciens. Bref, faisant du lecteur un complice pour un plaisir partagé.
Au début du XVIe siècle, quatre jeunes princes hors du commun montent sur les principaux trônes d'Europe. Henri VIII en Angleterre, en 1509 ; François Ier en France, en 1515 ; Charles Quint en Espagne puis dans l'Empire, en 1516 et 1519 ; Soliman le Magnifique dans l'empire ottoman, en 1520. Cette nouvelle génération qui prend le pouvoir a la tranquille arrogance de la jeunesse, mais Henri VIII se distingue de ses contemporains. Car le roi pénètre bientôt dans des territoires où aucun de ses prédécesseurs n'a jamais osé s'aventurer. Si c'est un jeune roi pieux au coeur de l'Europe catholique qui monte sur le trône, c'est un prince schismatique, qui a créé une Église nationale et une nouvelle manière de régner, qui meurt en 1547. Pendant ces trente ans, il aura fait sauter les unes après les autres de multiples digues séculaires : rupture avec la papauté ; exécution de sa seconde épouse, de son principal ministre, de son chancelier, d'un cardinal, de sa cinquième épouse ; tour de vis fiscal sans précédent ; suppression de tous les monastères du royaume ; confiscation de dizaines de palais, de châteaux et de demeures nobles.
Henri VIII est aussi le monarque anglais le plus célèbre parce que son histoire demeure l'une des meilleures que l'on puisse raconter. Tout y est. La violence et le sexe. L'amour et la haine. Le pouvoir et la démesure. L'amitié et la trahison. Le fils écrasé par son père ; le père écrasant ses enfants. Le casting, ensuite, est absolument exceptionnel. Si l'on s'arrête un instant sur le personnage principal, au moment où il monte sur le trône, force est de reconnaître que rarement un roi d'Angleterre aura à ce point incarné la royauté. L'homme est un colosse de près d'un mètre quatre-vingt-dix. Il est jeune - il n'a pas encore 18 ans -, en bonne santé, beau et cultivé, riche et athlétique. Mais, progressivement, cette incarnation parfaite du prince de la Renaissance se mue en tyran sanguinaire ; de jeune premier, il se transforme en vieux-beau, puis en débris. Les premiers rôles féminins n'ont rien à lui envier, qui, pour s'en limiter aux épouses, incarnent différents stéréotypes: la sainte, l'intrigante, la discrète, le laideron, l'allumeuse, le bas-bleu. Les seconds rôles masculins sont également remarquables, du flamboyant et indispensable Thomas Wolsey à l'impénétrable Thomas Cromwell, en passant par le veule et arrogant Thomas Howard ou Thomas More, l'inflexible et souriant martyr. On se promène dans des châteaux tendus de tapisseries de fil d'or ; on poursuit des cerfs à bride abattue ; on voit des chevaliers en armure briser leurs lances en se percutant à pleine vitesse ; des hérétiques sont brûlés, puis écartelés, pendant que les plus brillants esprits du temps débattent sur la paix et l'harmonie ; le roi tente de réitérer les exploits d'Henri V en envahissant la France ; le peuple se soulève contre les réformes religieuses du souverain. Mais le règne est en même temps une tragédie intemporelle et universelle sur l'amour, la famille, la guerre, la liberté de l'esprit, et le pouvoir. Et dans cette histoire, tout est vrai !
Au cours des XV et XVI siècles, la péninsule Italienne fut le théâtre de onze guerres, toutes parmi les plus violentes du temps. Souvent présenté comme un affrontement voulu par des souverains français aux ambitions chimériques, de Charles VIII à Henri II, ce cycle de guerre a pourtant une réalité européenne. Toutes les grandes puissances du moment étant impliquées, qu'il s'agisse de l'Espagne et des Pays-Bas, du Saint Empire allemand, de la Suisse ou encore de l'Empire ottoman. Par ailleurs, toutes les entités politiques italiennes furent des acteurs majeurs de ces conflits, Naples, Rome, Florence, Venise ou Gênes menant des actions autonomes et tentant de survivre face aux léviathans des XV et XVI siècles.
En rassemblant les meilleurs spécialistes de chaque « pays », ce livre permet ainsi de comprendre ce que furent les guerres d'Italie en sortant d'une perception francocentrée et en donnant à lire toute l'originalité de ce qui fut bien l'un des tout premiers conflits européens. Ce faisant, il invite à repenser bien des événements - la bataille de Marignan, le sac de Rome...- ou des parcours - Machiavel, Charles Quint, le pape Jules II...
Ce livre a pour ambition de publier une source majeure pour la connaissance de l'Orient au XVIe siècle. Le codex 1889 de la bibliothèque Casanatense de Rome est un document unique, dont le grand public ne connaît jusqu'ici que quelques images. Daté du milieu du XVIe siècle, composé de 77 peintures, il est exceptionnel par la qualité de ses peintures, leur abondance et leur originalité. Commandé par des Portugais de Goa, ce codex est le seul document de cette époque à offrir une représentation des peuples orientaux - hommes et femmes - et parfois de leurs coutumes religieuses, des peuples du cap de Bonne-Espérance jusqu'aux Chinois. Nous proposons, ici, une édition commentée dirigée par l'historien Sanjay Subrahmanyam.
Fin août 1572. À Paris, des notaires dressent des inventaires après décès, enregistrent des actes, règlent des héritages. Avec minutie, ils transcrivent l'ordinaire des vies au milieu d'une colossale hécatombe. Mais ils livrent aussi des noms, des adresses, des liens.
Puisant dans ces archives notariales, Jérémie Foa tisse une micro-histoire de la Saint-Barthélemy soucieuse de nommer les anonymes, les obscurs jetés au fleuve ou mêlés à la fosse, à jamais engloutis. Pour élucider des crimes dont on ignorait jusqu'à l'existence, il abandonne les palais pour les pavés, exhumant les indices d'un massacre de proximité, commis par des voisins sur leurs voisins. Car à descendre dans la rue, on croise ceux qui ont du sang sur les mains, on observe le savoir-faire de la poignée d'hommes responsables de la plupart des meurtres. Sans avoir été prémédité, le massacre était préparé de longue date - les assassins n'ont pas surgi tout armés dans la folie d'un soir d'été.
Au fil de vingt-cinq enquêtes haletantes, l'historien retrouve les victimes et les tueurs, simples passants ou ardents massacreurs, dans leur humaine trivialité : épingliers, menuisiers, rôtisseurs de la Vallée de Misère, tanneurs d'Aubusson et taverniers de Maubert, vies minuscules emportées par l'événement.
Lorsque l'on aborde la vie de Léonard de Vinci, deux écueils sont à éviter : placer l'artiste au-dessus de la condition humaine et en faire une sorte de génie aussi énigmatique qu'impénétrable ou, au contraire, réduire son existence à quelques épisodes incertains voire fantasmés de sa vie privée - comme sa prétendue sexualité débridée.
Loin des idées reçues et légendes tenaces, cet ouvrage nous invite à emprunter le véritable parcours de Léonard, du petit village toscan de Vinci dans lequel il naît en 1452, à Amboise, en France, où il s'éteint en 1519. Tout en suivant ses progrès dans les nombreuses disciplines auxquelles il s'essaye (dessin, peinture, bronze, architecture, mathématiques, etc.), nous voyageons au coeur de l'Italie renaissante : nous découvrons l'atelier de Verrocchio, à Florence, dans lequel le jeune peintre fait ses armes ; nous visitons Milan, où il se met au service de la puissante famille Sforza ; à Rome, nous rencontrons les Médicis (le pape Léon X et le duc de Nemours) qui admirent et protègent ce polymathe hors du commun ; enfin, dans la vallée de la Loire, à la cour de François Ier, nous revivons les dernières années du maître.
S'appuyant principalement sur des sources primaires - notamment les foisonnants Carnets du peintre -, Jean-Yves Boriaud se place ici en historien de l'art et analyse finement les conditions de réalisation des oeuvres magistrales de Léonard (Cène, Joconde, Saint Jean-Baptiste, etc.), mais aussi l'histoire de ses nombreuses productions inachevées (cheval des Sforza, portrait d'Isabelle d'Este...). Ainsi, il parvient à nous offrir le premier portrait fidèle et authentique de cette figure emblématique de la Renaissance.
Marignan, 1515. François Ier est le grand vainqueur de cette mémorable bataille, et son succès érige la France en première puissance européenne. Mais en quelques années, l'équilibre des pouvoirs se renverse totalement : en 1519, Charles Quint ravit le trône impérial au roi de France et, en 1525, il le bat à Pavie et le fait prisonnier.
Dès lors, plus rien ne semble s'opposer à ce que l'empereur victorieux devienne le maître absolu de toute l'Europe. Son ambition est désormais simple : revenir à une parfaite unité chrétienne en restaurant un empire universel sur le continent. S'appuyant sur une historiographie renouvelée, cet ouvrage passionnant éclaire d'un jour nouveau son véritable dessein politique, et montre qu'il s'est joué en trois temps.
De 1525 à 1529, le Habsbourg s'évertue à ravaler définitivement la France (ce qu'il parvient à faire lorsque le roi Très Chrétien perd la bataille de Landriano). De 1529 à 1540, l'héritier des rois Catholiques touche son espoir du doigt car le Saint Empire rayonne sur l'Europe, et semble alors capable de rétablir durablement la paix. Mais de 1540 à 1545, l'empereur, malade et vieillissant, s'enlise dans divers conflits (Allemagne, Turquie, etc.) et ne parvient pas à endiguer les guerres de religion qui ne cessent de prendre de l'ampleur.
Avec le talent narratif qu'on lui connaît, Guillaume Frantzwa analyse la façon dont le rêve impérial paraît triompher, avant d'être définitivement battu en brèche durant la deuxième moitié du règne de Charles Quint. Une synthèse essentielle.
Rendre compte au plus près des navires et des hommes, «?au ras du pont?», de la réalité du combat sur mer entre le début du XVIe et le milieu du XVIIe siècle, tel est le pari de ce livre profondément original et novateur. En cette époque de transition, le combat naval s'accomplit encore aussi bien «?par le fer?» des armes blanches que «?par le feu?» d'une artillerie variée. C'est le temps de l'évolution entre le progrès technique des navires et de l'artillerie et des pratiques toujours tournées vers l'abordage. On ne peut comprendre l'un sans l'autre, l'abordage restant l'acmé de l'engagement sur mer, moment de l'affrontement face à face où la mort revêt un visage que la destruction à distance par l'artillerie ne saurait présenter. Pour témoigner du vécu des hommes avant, pendant et après le combat, Alexandre Jubelin a puisé aux rares sources disponibles tant en France qu'en Angleterre ou en Espagne. Il offre ainsi un récit vivant et sensible de ce que furent les réalités du combat sur mer, embrassant pour la première fois aussi bien les questions techniques et que les enjeux humains.
On a longtemps dit de Diane de Poitiers, non sans une certaine misogynie, qu'elle fut la maîtresse de deux rois de France, François Ier et son fils Henri II, et qu'elle n'intrigua que pour son propre profit financier.
Mais Didier Le Fur nous explique ici simplement, et avec style, que cette image est faite d'une accumulation d'erreurs et d'approximations - volontaires ou non - reprises puis amplifiées, en fonction des modes, pendant quatre siècles. Il rend ainsi à cette femme passionnante sa réalité, loin des fantasmes entourant les maîtresses royales et décrypte comment sa vie, qui reste sur bien des aspects mystérieuses, a pu prendre une telle place dans l'imaginaire collectif et le roman national.
C'est un nouveau regard sur la sortie des guerres de Religion que ce livre propose : au lieu de redire les hauts faits d'Henri IV, comme maintes biographies les répètent à l'identique, il fait ressortir la grande incertitude liée à l'avènement d'un protestant pour révéler les mécanismes qui ont permis à la monarchie de se réinventer au moment où elle fut confrontée à une crise sans précédent. Ainsi, par le biais des acteurs de l'ombre, des hommes d'Église aux côtés d'Henri, il est possible de se détacher de la figure figée du roi vainqueur, et de redonner leur dimension problématique à des événements comme le sacre royal. L'étude du travail de légitimation du premier Bourbon permet alors d'appréhender la monarchie en tant qu'oeuvre collective d'acteurs travaillant à assurer sa survie.
L'univers est gouverné par une loi générale de la putréfaction. Dieu, les anges et toutes les créatures naissent du chaos, comme les vers apparaissent à la surface du fromage. Nous sommes des dieux, et tout est Dieu : le ciel, la terre, l'air, la mer, les abîmes et l'enfer...
Tel est le credo qu'un certain Menocchio, meunier du Frioul dans l'Italie du XVIe siècle, eut à défendre devant le Saint-Office avant de périr sur le bûcher. Lecteur infatigable, exégète à ses heures, hérétique malgré lui, il s'était constitué une bibliothèque au hasard des rencontres, hors de toute discipline culturelle, prélevant librement dans les textes, élaborant sa propre vision du monde.
Avec cette étude magistrale, devenue un classique de l'historiographie, Carlo Ginzburg inventait la micro-histoire et renouvelait la connaissance d'un monde resté longtemps mystérieux, celui de la culture populaire.
Dans ce classique de l'historiographie du XVIe siècle français, le grand historien Abel Lefranc revisite la Renaissance en nous faisant découvrir ses aspects les plus inattendus. Ce que les contemporains connaissent le mieux de leur époque, écrit-il dans la préface, c'est apparemment, ce que nous en connaissons le moins. L'historien veut ainsi restituer dans toute son épaisseur historique le quotidien des hommes et des femmes à la Renaissance, ces menus faits qui marquent les contingences de la vie de chaque jour... Histoire sociale et politique à la fois, l'ouvrage ne fait pas seulement revivre le temps des princes et des rois - même si l'on trouve dans ces pages des tableaux remarquables de la vie des souverains, Henri II, François Ier et Henri IV en particulier. Tel un miniaturiste, Abel Lefranc dépeint la vie dans toutes les couches sociales pour dresser, en une suite de tableaux, une esquisse magistrale de toute la société française durant cette période. Pour les différentes classes du royaume, il retrace les occupations de chaque jour. Redonner vie à l'époque, aux habitudes, aux moeurs, aux façons de penser et de voir le monde, c'est aussi comprendre le rapport au temps de ses contemporains : on découvre par exemple l'attention particulière de Catherine de Médicis au quotidien de son fils le roi Charles IX, pour lequel elle souhaitait établir un véritable programme de vie, une Journée du Roi conforme à celle qu'elle avait connue et admirée durant ses premières années à Cour de France, au temps du Grand Roi François.
Abel Lefranc (1863-1952), ancien élève de l'école des Chartes, est un universitaire français, historien de la littérature française, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres.
Cette nouvelle biographie redonne sa juste place au plus grand adversaire de François 1er. Les historiographies nationales ont souvent négligé le « phénomène européen » qu'incarne cet empereur polyglotte, né aux Pays-Bas, héritier de la couronne d'Espagne puis du Saint Empire romain germanique. En 1520, le chancelier Gattinara saluait pourtant l'élection impériale comme providentielle et prévoyait la « monarchie universelle », mythe sur lequel reposa la complexité de la stratégie géopolitique de Charles Quint. Son projet impérial témoigne d'un ambitieux programme d'unification rationnelle des territoires dans un contexte de grande tension politique et religieuse et de conflits militaires. Dans la lutte pour l'hégémonie européenne, la rivalité avec le roi de France apparaît comme l'un des aspects marquants du règne, les territoires italiens constituant un enjeu de premier plan pour des raisons aussi bien stratégiques que symboliques. L'empire carolin, construction originale et unique en son temps, fut en définitive un véritable laboratoire politique de l'Europe moderne. oeuvre cependant jamais pleinement réalisée car, entravé par les rivalités de pouvoir et par les conflits religieux qui minaient l'unité du monde chrétien, Charles Quint fut constamment contraint de reporter ses plus hautes ambitions, qu'il emporta avec lui dans sa dernière demeure, au monastère de Yuste.
Le 18 août 1572, Paris célèbre avec faste le mariage de Marguerite de Valois et d'Henri de Navarre, événement qui doit sceller la réconciliation entre catholiques et protestants. Six jours plus tard, les chefs huguenots sont exécutés sur ordre du Conseil royal. Puis des bandes catholiques massacrent par milliers «ceux de la religion» - hommes, femmes, vieillards, nourrissons...
Comment est-on passé de la concorde retrouvée à une telle explosion de violence? Comment une «exécution préventive» de quelques capitaines a-t-elle pu dégénérer en carnage généralisé? Quel rôle ont joué le roi, la reine mère, les Guises, le très catholique roi d'Espagne? De ces vieilles énigmes, Arlette Jouanna propose une nouvelle lecture.
La Saint-Barthélemy n'est l'oeuvre ni des supposées machinations de Catherine de Médicis, ni d'un complot espagnol et encore moins d'une volonté royale d'éradiquer la religion réformée. Charles IX, estimant sa souveraineté en péril, répond à une situation d'exception par une justice d'exception. Mais en se résignant à ce remède extrême, il installe, sans en faire la théorie, une logique de raison d'État.
Cette tragédie, vécue comme une rupture inouïe, suscite une réflexion foisonnante sur les fondements du pouvoir, les limites de l'autorité, la légitimité de la désobéissance ; sur le danger aussi que font courir les divisions religieuses aux traditions du royaume. Mais cet effort de restauration politique va se heurter à la sur-sacralisation du roi, qui ouvre la voie à l'absolutisme des Bourbons.
Banquiers, maîtres de Florence, papes, humanistes et mécènes, les Médicis ont incarné la Renaissance italienne. Du XIVe au XVIIIe siècle, ils ont été des acteurs majeurs de l'échiquier politique européen. De Cosme l'Ancien à Laurent le Magnifique et Cosme Ier, premier grand-duc de Toscane, l'ascension des Médicis a été exceptionnelle : ils ont marié leurs filles à des rois, ont prêté de l'argent aux monarques, sont devenus papes et ont été au coeur des grands courants sociaux, culturels et politiques de leur temps. Rois sans couronne, ils ont été les maîtres de la République de Florence.
Encourageant et subventionnant les génies naissants, la Renaissance toscane a rayonné grâce à eux du plus magnifique éclat. De la Florence de Dante à la veille de la Révolution française, Marcel Brion fait revivre les passionnants destins de cette captivante lignée.
Comment une institution prend-elle son essor en période de guerre civile, de conflit politique et religieux?? Comment l'information politique et diplomatique circule-t-elle dans le champ de force des relations internationales de l'Europe de la première modernité?? Quelles techniques administratives nouvelles les souverains mobilisent-ils pour faire face aux contestations radicales et violentes de leur légitimité?? Quel rôle, enfin, l'administration joue-t-elle dans la mise en ordre politique d'une réalité rétive et oppositionnelle??
Jérémie Ferrer-Bartomeu pose ces questions à la foisonnante production écrite des hommes de plume de la monarchie des derniers Valois et du premier Bourbon et relit l'histoire politique de la première modernité. Il montre comment ce conflit civil puis européen devint le creuset d'une nouvelle gouvernementalité. Au bruit des armes s'ajouta progressivement le crissement de mille plumes au renfort de la gloire du roi, participant ainsi à la réduction à l'obéissance et à la pacification d'un royaume déchiré par la guerre. Secrétaires de la main, des commandements, clercs du secret et du conseil privé, espions, transfuges et grands officiers allaient former le socle de l'État.
Temps de chaos et de confrontation politique et religieuse, le second xvie siècle est ici relu comme une séquence d'innovations administratives majeures. Les professionnels de l'écrit forment la pointe avancée de la société politique. Ils contribuent à l'élargissement des domaines d'intervention de l'État et assurent, concrètement et quotidiennement, l'exercice de l'autorité. Cette république européenne des bureaux en formation traduit la mise en circulation transnationale de savoirs administratifs et le transfert de modèles de gouvernement entre puissances adverses et alliées.
Au XVIe siècle, de profondes transformations vont bouleverser le christianisme occidental : avec les Réformes protestantes, un monde religieux unifié sous la houlette de la papauté laisse place à une chrétienté éclatée, bientôt meurtrie par les guerres de Religion. Au monde médiéval succède la modernité.
C'est cette histoire que retrace Pierre-Olivier Léchot plus de cinq cents ans après l'affichage (supposé), le 31 octobre 1517, des 95 thèses de Luther. En présentant les conditions d'émergence des Réformes protestantes et leurs destins à travers l'Europe, en insistant sur leur diversité et en s'arrêtant sur les grandes figures du mouvement réformateur (Luther, Zwingli, Calvin), il ne raconte rien de moins que des changements culturels et intellectuels qui ont durablement modifié le visage de l'Occident.
Le dernier jeudi du Carnaval de l'année 1569, au coeur d'un hiver féroce, sept jeunes patriciens florentins s'assemblèrent pour faire académie. La sodalité ainsi fondée devint vite l'une des académies florentines les plus dynamiques - au point de laisser, lors de sa disparition, six décennies plus tard, des milliers de folios d'archives consignant ses travaux (registres d'activités, discours, poèmes, etc.). Comprendre ce qui motiva ces hommes à oeuvrer ensemble avec tant de diligence reste néanmoins malaisé, tant l'institution cultiva le secret. Un élément frappe pourtant : la plus grande partie des Alterati étaient issus de familles qui s'étaient autrefois opposées au démantèlement de la République oligarchique. Le pouvoir médicéen tint leurs rejetons à l'écart des offices communaux comme des charges de cour, les poussant sans doute indirectement à investir leurs énergies dans les arts et les savoirs.
Leur académie devint ainsi le lieu d'une ambivalence fondamentale : imitant par ses structures les institutions de la Florence communale, elle permit à ses membres de célébrer la République disparue en action comme en pensée - et toujours en vase clos. Mais, parce qu'elle donnait aux académiciens la possibilité de s'exercer avec constance à parler et à écrire, tout en les incitant à évaluer constamment les travaux d'autrui, elle leur offrait aussi l'occasion de travailler collectivement à leur intégration progressive dans la société de cour médicéenne, où les princes prisaient leurs savoir-faire et ne dédaignèrent pas d'en user.
Elles vivent dans un monde d'hommes. Reines, favorites ou paysannes, peu importe leur statut : les femmes de la Renaissance connaissent la tutelle d'un père ou d'un mari, la pression d'enfanter, les difficultés du veuvage...
Les femmes du siècle des humanistes sont facilement exposées aux dangers et à la vindicte. La réalité de la Renaissance, période d'ouverture au monde et de diffusion des savoirs, coexiste avec la violence des guerres de Religion qui embrasent le royaume de France. Toutes les femmes éprouvent cette brutalité, quand elles n'y participent pas elles-mêmes. Elles peuvent être accusées de tout : adultère, égoïsme, manque de discernement, cupidité, sorcellerie, intrigues et manipulations. En lutte pour leur liberté, elles défendent leur statut et leur patrimoine comme leur réputation. Plus encore, elles se battent pour vivre leurs passions, leurs amours, pour faire respecter leurs droits d'épouses et de mères, pour faire reconnaître leurs talents de femmes de lettres, de patronne de librairie-imprimerie, d'architecte ou de sage femme.
Sylvie Le Clech, spécialiste du XVIe siècle français, explore le destin de quinze femmes, pour certaines jamais étudiées, issues de toutes les couches de la société. Avec les portraits de Marguerite de Navarre, Catherine de Médicis, Vannina d'Ornano ou Jacquette Saddon, sorcière du Berry, elle nous éclaire sur la vie précieuse, mouvementée et intime des femmes de la Renaissance.
En 1543, les Portugais sont les premiers Européens à débarquer au Japon. Cet archipel lointain et mystérieux, plus ou moins localisé depuis 1515, est très vite identifié à la Cipango du récit de Marco Polo (c. 1300), représenté sur le globe de Behaim (1492).
Aussitôt les Portugais y introduisent les armes à feu et nouent de fructueux liens commerciaux. En 1549, François Xavier et quelques jésuites débarquent à leur tour et fondent la mission chrétienne du Japon, pays dont ils seront deux ans durant les premiers explorateurs.
Un riche cahier cartographique retrace l'historique de la représentation de l'archipel, d'abord sous la forme de la mythique Cipango, de 1459 à 1571, puis du Japon nouvellement découvert, de sa première apparition en 1550 jusqu'à sa forme presque définitive au début du xviie siècle, en passant par ses multiples avatars.
Le livre rassemble ensuite les évocations de Cipango dans les sources historiques occidentales depuis 1300, puis du Japon dans les récits narrant la rencontre entre les Européens et Japonais de 1543 à 1552.
Ces textes, écrits par des navigateurs, des aventuriers ou des jésuites témoignent de la fascination des Européens - non sans incompréhension - devant cette nouvelle civilisation, qu'ils jugent aussitôt supérieure à toutes celles qu'ils ont découvertes jusqu'alors.
En miroir, un texte japonais, jamais traduit en français, raconte l'arrivée de ces hommes blancs, avec de longs nez et aux manières rustres, qu'ils appellent péjorativement les nanban-jin, les «barbares du Sud».
Épouse de Henri IV, Marie de Médicis ne bénéficie guère d'une réputation flatteuse. On la dit indolente, lourde tant au physique qu'au moral, entichée de ses favoris italiens... Philippe Delorme présente une tout autre image, vivante et savoureuse, de la première reine de la dynastie des Bourbons. Princesse de la Renaissance, femme d'un roi plus que volage, soucieuse néanmoins de sa dignité de femme, inébranlablement fidèle à ses amitiés, elle saura, au cours d'une régence difficile ponctuée de péripéties dramatiques, préserver la paix civile pour transmettre à son fils Louis XIII, à l'aube du Grand Siècle, une couronne intacte.
Une HISTOIRE de France AU FÉMININ, qui est contée ici avec pittoresque et véracité : une histoire bruissante de passions, d'intrigues, d'anecdotes intimes.