Sciences humaines & sociales
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De l'épineuse servitude volontaire
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- Miguel Abensour
- 29 Octobre 2024
- 9782845343207
Pour reprendre une belle expression de Pierre Clastres, La Boétie serait-il un « Rimbaud de la pensée » ? Qu'est-ce à dire ? La Boétie, ce tout jeune homme - quand il écrivit Le Discours de la servitude volontaire, il n'avait pas même vingt ans - deviendrait-il tel météore génial bouleversant la tradition ? Il disparaîtra aussi soudainement qu'il apparu, laissant la pensée dominante venir peu à peu occulter la vérité scandaleuse qu'il avait énoncée dans un moment d'incandescente fulgurance. La Boétie serait l'auteur d'une pensée subversive, scandaleuse. En tant que tel il est une figure d'exception dans l'histoire de la philosophie politique moderne. Figure d'exception. À l'inverse de cette interprétation, somme toute rassurante, proposons une contre-thèse, selon laquelle l'hypothèse de la servitude volontaire, loin d'être une exception, serait virale, elle ne cesse de hanter la pensée moderne, elle émerge, fait surface, à la faveur d'un événement, d'une grave crise historique, ou d'une controverse politique ?
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Le nouvel esprit utopique
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- Miguel Abensour
- 26 Novembre 2024
- 9782845342293
Au-delà des prémices d'une oeuvre à venir, la thèse, dans son économie générale, affiche un "écart absolu" si l'on compare ce texte à ceux précédemment écrits autour de l'utopie. Miguel Abensour, reprenant la formule de Marx pour qui l'utopie est "l'expression imaginative d'un monde nouveau" ouvrant à l'émancipation humaine et à la "volonté de bonheur", analyse les écrits, postérieurs à Marx, qui prennent au sérieux ces questions : ceux de Korsch, Labriola, Bloch, Landauer, Benjamin, Marcuse (il convient de noter ici l'intérêt porté par Miguel Abensour à la Théorie critique, alors méconnue en France). Cette analyse le conduit à se pencher sur le communisme critique, "secret et la vérité des utopies socialistes-communistes" selon la formule de Marx, et à "utopianiser" celui-ci. On perçoit pleinement la novation de la lecture de Marx par Miguel Abensour. Ce qui le mène à aborder la question de l'État laquelle sera largement approfondie dans des écrits futurs. Utopiques I Le procès des maîtres rêveurs Utopiques II L'homme est un animal utopique Utopiques III L'utopie de Thomas More à Walter Benjamin Utopiques IV L'histoire de l'utopie et le destin de sa critique
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Vingt-cinq ans après la première édition les propos développés dans cet ouvrage n'ont fait l'objet d'aucune modification sur le fond ou sur la pratique d'un « jardinage en mouvement ». Les urgences écologiques, aujourd'hui mieux ancrées dans les consciences qu'elles ne l'étaient à la fin du XXe siècle, tendent à valoriser ces pratiques à toutes les échelles et à les affiner. Certaines légendes d'illustrations reformulées, plusieurs images ajoutées, le texte concernant le jardin du musée du Quai Branly-Jacques Chirac développé, telles sont les ajouts de cette édition.
Vingt-cinq années de croissance végétale modifient les paysages, elles ne modifient pas forcément l'état d'esprit dans lequel ils se développent. Le message essentiel de ce livre « faire le plus possible avec et le moins possible contre la nature » demeure à tous les stades de l'évolution d'un espace incluant le vivant.
Toutefois on peut faire deux remarques importantes que seul le recul du temps nous permet d'établir :
- La première est technique et concerne la biodiversité.
La fermeture des espaces par la strate arborée en développement progressif diminue la présence visuelle des espèces herbacées pour majorité héliophiles. Un des aspects importants de la maintenance du jardin en mouvement porte sur la nécessité de maintenir l'équilibre de l'ombre et de la lumière. Parfois il faut supprimer des arbres devenus trop grands faisant disparaître la clairière, la lumière et la biodiversité qui lui est associée. Ces arbres trop présents peuvent appartenir à une série que l'on a soi-même planté quelques années plus tôt. Les éliminer n'est pas tâche facile, on peut se contenter de l'ombre et dire que la diversité désormais invisible sous les frondaisons continue de vivre à l'état de graines et de dormir en attendant les conditions de la germination : le soleil et l'eau. On peut aussi donner place à la composition paysagère et choisir les espèces que l'on peut soustraire à l'espace trop dense pour retrouver l'équilibre cherché. Ce travail serait à faire aujourd'hui dans la partie dédiée au jardin en mouvement du parc André Citroën et bientôt dans le jardin du musée du Quai Branly.
Cette remarque sur la diversité héliophile dans la strate herbacée concerne les climats non tropicaux. Sous les tropiques la diversité botanique s'exprime très bien dans la strate arborescente. Un jardin en mouvement en zone tropicale serait celui des singes et des oiseaux dans l'enchevêtrement des canopées, il n'y aurait rien d'autre à faire que d'édifier des passerelles en suspens pour s'y promener. Nous parlons ici des forêts primaires rélictuelles, celles que le Stupidocène oublieux a laissées çà et là, éparses et perdues sur la planète anthropisée.
- La seconde est culturelle et concerne la composition dans l'espace.
À l'exception des cultures animistes et totémistes pour qui le jardin est un territoire naturel pourvu des richesses que l'on va glaner ou chasser, les sociétés humaines ont organisé le jardin en donnant aux formes, aux lignes, aux perspectives et à la scénographie générale un droit absolu de composition. Cette façon de dessiner le jardin place la question du vivant en second rôle.
Le jardin en mouvement se positionne à l'opposé de cette perception du monde, il ne doit aucune de ses formes à une vision cultuelle idéalisée de l'espace mais à une préséance donnée au vivant. Si les formes sont changeantes c'est précisément parce que « toujours la vie invente ».
Ces pratiques se multiplient et placent les concepteurs au-devant d'une question à laquelle aucune école ne les a préparé : comment accepter l'abandon ou le partage de la signature de l'espace qu'ils pensent avoir dessiné avec maîtrise ? Comment déplacer le rôle de la forme pour la mettre en position de résolution esthétique temporaire sous la dynamique du vivant et non en dispositif inchangeable telle une architecture sacrée ?
Il est à prévoir que l'enseignement dispensé pour atteindre ces objectifs s'orienterait alors une connaissance approfondie du vivant. Ceci afin d'initier un processus de conception des espaces qui nous lient à notre environnement, non en se soumettant à une dictature formaliste ou fonctionnaliste, mais en développant un dialogue avec le vivant par un accès à la compréhension et à l'acceptation du génie naturel.
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Le contre Hobbes de Pierre Clastres
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- Miguel Abensour
- 12 Janvier 2024
- 9782845343092
La guerre serait revenue !
On l'aurait, bien mal nous a pris, oubliée...
Elle se tenait ailleurs. Tout, d'ailleurs, se tient ailleurs : chez les sous-développés, les émergents, enfin ceux qui apprennent l'histoire et oubliant la leur.
Le dédain, les erreurs d'appréciations (ou d'analyses) ne font que gonfler les refus, poussant à des déstructuration : du génocide, au massacre, à l'annexion et autres joyeusetés...
Toute cette situation ouvre à un horrible absolu, à une vengeance aveugle, à une sorte de sauvagerie qui n'exista jamais, construite à dessein ouvrant à la terreur (nous en fûmes-nous pas les inventeurs) et la fabrication de la peur.
Le Léviathan (Hobbes) réveillé refaçonne des États durs, met en place par la démocrature ses opportunistes politiques comme religieux ne jurant que par une paix qui attrape les mouches avec du vinaigre.
Il nous a semblé qu'aller revisiter quelques pensées solides (Abensour, Sahlins, Clastres) en luttes contre les exploitations et les cache-sexes que sont domination, soumission, abondance, aliénation et addiction planquées derrière des mirages (dont le métavers n'est pas le moindre) pouvaient nous être très utiles et remettre un peu les idées en place (si cela est encore possible). Ainsi, ce texte de 1987 est à lire avec l'expérience des cinq dernières années en vue de les décrypter afin de percevoir l'avenir au-delà des pleurnicheries qui envahissent notre quotidien, qui brouillent nos entendements et entretiennent une prétendue nécessité d'un État de Guerre fondateur, de tout temps, d'Histoire. -
Cet Abécédaire est le prolongement d' une conversation de l'auteur avec le philosophe Gilles A. Tiberghien.
Autonomie - Brassage planétaire - Continent théorique - Désobéissance - Étonnement - Faire avec - Génie naturel - Herbe - Initiative - Jardin - Kangourou - Lisière - Mouvement - Nuage - Optimisme - Patience - Q.I. - Résistance - Silence - Troc - Utopie - Variable - Wikipédier - X - Ying-yang - Zizanie
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Ce dernier livre prévu par l'auteur voyant son état de santé décliné montre l'importance qu'Emmanuel Levinas avait prise dans la vie philosophique de Miguel Abensour. Le sommaire, constitué de textes «bruts» ou «sans ambages», montre parfaitement les multitudes d'angles que cette pensée inspirait à M. Abensour, il l'imaginait comme l'une des plus libres qui soient, y compris sur des questions aussi délicates qu'inextricables qui se posaient en son temps et se posent toujours dans le nôtre.
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" Pour qui veut bien regarder, tout fait art. La nature, la ville, l'homme, le paysage, l'air du temps, ce qu'on appelle humeur et sur toute chose enfin, la lumière.
Par ailleurs, chacun connaît l'art des artistes, celui qui porte signature. Peintres, sculpteurs, musiciens, écrivains, cinéastes, danseurs etc. sont convoqués sur la question de l'art à propos de laquelle, on le sait, il y a toujours beaucoup à dire.
Il existe cependant une plage indéfinie où se croisent le champ brut de la nature - les circonstances - et le territoire authentifié de l'homme.
Ce terrain de rencontre produit des figures à la fois éloignées et proches de l'art suivant les définitions que l'on en donne. Pour ma part je considère comme art involontaire le résultat heureux d'une combinaison imprévue de situations ou d'objets organisés entre eux selon des règles d'harmonie dictées par le hasard. " De la confrontation de la nature et de celle de l'homme se dégage une synergie qui crée accidentellement des tableaux souvent d'une terrible beauté. Gilles Clément a, au long de ses voyages, décelé dans ces signes du croisement la présence d'un art involontaire.
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Agonie du monologue dans la société française : la crise du téléphone
Yves Stourdzé
- Sens Et Tonka
- Yves Stourdze
- 12 Janvier 2024
- 9782845343085
Le souhait d'Yves Stourdzé était d'explorer l'introduction des nouvelles dans la société française. Il s'y consacra, dans les années soixante-dix, quatre-vingt, convaincu que les formes et détours du pouvoir devaient s'y révéler en modelant ces nouvelles inventions. C'est ce qu'il avait nommé généalogie. À ce moment, la grande crise du retard français en matière de téléphonie l'incita à mettre à jour le télégraphe, à fouiller plus profondément ce qui s'était fomenté lors de son invention. Il put alors découvrir, qu'après la poste présente depuis le Moyen Âge, le modèle du pouvoir en plus se devrait alors de maîtriser ces techniques et en garder le contrôle.
Il nous a semblé nécessaire de faire connaître le travail concernant le téléphone qui éclaire enfin la crise des années soixante-dix et permettra à la société française d'être présente dans le nouvel «ordre» du monde. Il complète "Scopie du pouvoir dans la société française. Le cas du télégraphe optique", paru en 2021 aux éditions Sens&Tonka. -
Pour reprendre la fameuse formule d'Anacharsis Cloots, «Ni Marat, Ni Roland», la ligne directrice de cet essai sera : «Ni Soboul, Ni Furet». Le pari est fait que le temps est venu de proposer une lecture qui se tienne à l'écart des idéologies qui ont cours, soit l'identification du jacobinisme à une préfiguration du léninisme, soit la glorification de Thermidor. Autrement féconde nous apparaît l'approche de R. Bodei qui, dans La Géométrie des Passions, en confrontant le projet jacobin à Spinoza dévoile une nouvelle constellation dans laquelle le recours à la crainte et à l'espoir, loin de viser à l'asservissement du peuple travaille à sa libération. Aussi cet ouvrage aura-t-il pour ambition de «s'expliquer avec Saint-Just» en faisant de la question politique le lieu critique par excellence ?
L'ouvrage comprend deux volets : l'un consacré à la philosophie politique de Saint-Just, l'autre à l'héroïsme et à sa prégnance dans l'agir révolutionnaire.
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Les mots apparurent. Ils se multiplièrent, crûrent, s'enflèrent.
Certains devinrent gênants pour les uns et/ou pour les autres, pas toujours d'accord sur le sens à leur donner, sur leurs usages et utilités. Ils remplirent le disque dur de l'existence, devinrent parfois étouffants.
Alors un Grand moralisateur décide d'en effacer certains, il créa, pour ce faire, l'effaceur.
La tâche n'est pas sans risque.
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Contre Lévi-Strauss : une philosophie du malencontre
Olivier Jacquemond
- Sens Et Tonka
- 11 Février 2022
- 9782845343030
Étreindre pour mieux trahir, n'est-ce pas le sens qu'il faut conférer au célèbre baiser de Judas? Ce geste est, nous semble-t-il, celui que commet le célèbre anthropologue structuraliste Claude Lévi-Strauss en 1950 lorsqu'il rend hommage à Marcel Mauss dans une introduction devenue un canon du genre, longtemps demeurée une porte d'entrée incontournable à Marcel Mauss, et particulièrement à son texte le plus connu et commenté, l'Essai sur le don, dont le contenu semble devoir s'éclairer grâce aux lumières lévi-straussiennes.
Est-ce le charme de ce texte précisément ou est-ce le propre de toutes les grandes oeuvres que d'offrir une expérience vivante de pensée? À notre sens, c'est vrai de tous les philosophes du malencontre (terme issu de Le Discours de la servitude volontaire, et érigé en concept par Pierre Clastres), ces auteurs inclassables qui font le pari de l'incertitude, qui prennent le risque de la pensée pour remonter le cours du temps et se poser la question matricielle formulée par Nietzsche dans La Généalogie de la Morale : «Quel(s) événement(s) se sont-ils produits pour que nous soyons devenus ce que nous sommes aujourd'hui?».
Claude Lévi-Strauss, avec toute son autorité, a, semble-t-il, préempté le texte, y posant ses scellés et fixant sa lecture pour plusieurs générations de lecteurs. Ce sera donc le regard médusant de Lévi-Strauss que nous chercherons ici à détourner comme Persée pour approcher le point aveugle et originaire dont l'oeuvre tire son exceptionnelle et irrésistible puissance.
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Jean Baudrillard : les paradis artificiels du politique
Jean Baudrillard
- Sens Et Tonka
- Jean Baudrillard
- 20 Avril 2018
- 9782845342514
Jean Baudrillard dans sa période utopienne a publié et dans la revue et sous volume dans la collection «Les Cahiers d'Utopie» ces trois textes. Globalement il s'agissait du parti communiste français (P.C.F., dit le PC) dans ses rapports avec le gauche socialiste et l'ensemble des partis politiques, le PC, à l'époque, était un diapason qui donnait le la.
Il poursuivra cette pensée dans Au royaume des aveugles (Sens&Tonka, rééd. 2002), mais cette fois-ci avec l'autre extrême, celle d'à droite toute, le FN ; dès 1997 il a saisi que le référent allait être celui-là : De l'exorcisme en politique ou la conjuration des imbéciles, le titre est clair, non ? qu'il complétera par Au royaume des aveugles , c'est-à-dire notre actualité (2017).
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Utopiques II ; l'homme est un animal utopique
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- 1 Avril 2013
- 9782845342156
L'homme est un animal utopique! Mais que signifie cette affirmation si elle est plus qu'un simple paradoxe, ou la tentative de s'approprier une formule célèbre pour en découvrir le sens ?
L'objet de ce livre, c'est précisément de montrer que le foisonnement de l'utopie à travers les âges représente rien moins que la volonté toujours renouvelée de donner à l'émancipation un nouveau visage. Alors que les uns s'emploient à dissocier l'utopie de la politique, les autres à tout rabattre sur la politique, l'idée centrale des différentes écoles utopistes, l'idée d'Association, dément ces simplifications : elle est en réalité une idée politique qui rejoint l'inspiration de la vraie démocratie. Chaque moment des luttes suscite une nouvelle sommation utopique qui inscrit au sein même de l'Histoire l'aspiration à un au-delà du présent.
Ainsi, l'utopie s'interroge sur les nouveaux moyens de réaliser l'idée d'émancipation et de dépasser ce qui se pose à chaque fois comme horizon indépassable.
Si bien que l'homme apparaît alors véritablement comme un animal utopique.
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Utopiques Tome 1 ; le procès des maîtres rêveur
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- 1 Octobre 2012
- 9782845342040
La légende noire, qui accompagne toutes les périodes de réaction et de désarroi, a fait de l'utopie l'antichambre du Goulag, voire des camps, et elle ne nous laisse rien espérer de l'avenir. Et pourtant, un simple coup d'oeil sur l'Histoire prouve le contraire : l'utopie est inséparable d'une pensée de l'émancipation qui a trouvé dans ce « splendide xixe siècle » (André Breton) son épanouissement.
Miguel Abensour évoque ici une de ces figures les plus fascinantes, celle du « génial Pierre Leroux» (Marx), qui fut sans doute l'inventeur du mot socialisme.
Cette édition s'enrichit d'un article de M. Abensour publié en 1991, «L'Affaire Schelling, une controverse entre Pierre Leroux et les jeunes hégéliens ». S'éclaire ainsi à la lumière de l'utopie alors encore brûlante les relations entre philosophes français et philosophes allemands, qui donnèrent naissance aux Annales francoallemandes.
La préface de Louis Janover montre comment utopie n'a jamais cessé d'entrer en résonance avec poésie, et de produire ce ton inouï que rien ne remplace à l'oreille.
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Au fond de nos souvenirs dort Blanqui, exalté, allumé, tour à tour activiste, militaire, « alchimiste », « philosophe », dressant des barricades avec des mots et des mots comme des barricades. L'homme des proclamations, des éclats : « Pourquoi le drapeau de la révolution est-il rouge ? c'est qu'il fut trempé mille fois dans le sang du prolétariat ». Par ses actes, ses écarts, ses images, Blanqui devint un mythe. Celui que l'on nomma l'Enfermé est devenu l'effigie du révolté - en oubliant ce qu'il fut.
Ce bref texte sommeillait à la fin d'un volume que nous fîmes paraître en l'an 2000 (reprise d'une parution de feu les Éditions de la Tête de feuille, 1973) où se confrontaient les Instructions pour une prise d'armes, Je suis un de ces voyageurs, Contre le positivisme, mises en parallèle avec les propos de Charles Fourrier ainsi que de quelques autres (Geoffroy, entre autres) équilibristes de l'utopie, de l'écart... et de l'absolu, sans lequel nulle éternité ne s'offre; s'ensuivait donc, naturellement, L'Éternité par les astres et son dossier de presse. « Faire bleu », disaient les gueules noires. Ne pas «Oublier Blanqui» est le but poursuivi.
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La lumière et la boue ; le rouge et le noir à l'ombre de 1793
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- Miguel Abensour
- 4 Octobre 2019
- 9782845342323
Je ne puis donner la réalité des faits, je n'en puis présenter que l'ombre.
Stendhal.
«Le Rouge et le Noir est une oeuvre énigmatique. Énigme plurielle. D'abord, il y a le titre.
Classiquement, en s'appuyant sur les propres déclarations de Stendhal, on l'interprète comme si le Rouge évoquait les carrières militaires et le Noir les carrières ecclésiastiques. Mais est-ce bien sûr ?
Méfions-nous des explications de Stendhal dont nous savons qu'il avait un goût prononcé pour la mystification.
En outre, il s'agit d'un roman écrit « à l'ombre de...» : certains protagonistes agissent et se déplacent sur une double scène, la scène contemporaine du roman, la France de la Restauration, et une autre scène située dans une époque passée qui a valeur d'exemple. Double scène donc, dans la mesure où les protagonistes trouvent la source de leur conduite dans l'identification à un modèle choisi dans le passé et dont ils s'efforcent d'imiter les hauts gestes et les grandes actions, en dépit de la résistance du temps présent. »
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Scopie du pouvoir dans la société francaise : le modèle du télégraphe optique
Yves Stourdzé
- Sens Et Tonka
- 19 Février 2022
- 9782845343009
Il s'agit de l'histoire d'un nouvel équipement de communication, un peu oublié. Yves Stourdzé expose les tours et détours du pouvoir afin de ne rien perdre de son contrôle sur la société française.
Assurer la puissance de l'État en fabriquant un modèle de représentation aussi fort que la fonctionnalité de la technique, modèle qui aura de beaux jours devant lui et des échos très contemporains. La singularité de sa méthode ressemble à celle d'un archéologue sur un champ de ruines, découvrant pierre après pierre l'objet attendu de ses hypothèses et met à nu sa démarche même de recherche. L'objet de sa recherche, sa motivation essentielle a toujours été la question sans fond du pouvoir et de la domination. C'est ce qu'il traque, dans ses actions, dans le passé, une généalogie qui a pour but d'ouvrir l'avenir. Ces hypothèses font progressivement apparaître l'exercice du pouvoir vis-à-vis de son pays, de celui où nous sommes les habitants. De manière consciente ou inconsciente, le pouvoir modèle le fonctionnel de la nouveauté technique à ce qu'Yves Stourdzé appelle une esthétique des argumentaires.
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Le littoral, la dernière frontière ; entretien avec Jean-Louis Violeau
Paul Virilio
- Sens Et Tonka
- 1 Novembre 2013
- 9782845342316
Inspiré par la vision des militaires, Paul Virilio constatait en 1980 que le but recherché par le pouvoir était désormais «moins l'envahissement des territoires, leur occupation, qu'une sorte de résumé du monde, obtenu par l'ubiquité, l'instantanéité de la présence militaire, un pur phénomène de vitesse ». En 2009, il prolongeait :
« depuis plusieurs années, l'extérieur l'emporte partout sur l'intérieur et l'histoire géophysique se retourne tel un gant ».
La situation n'offre aucune prise, la « fin de l'Histoire» masque avant tout une fin de la géographie et de son continuum. L'immédiateté exclut l'étendue. Monde fini, fin de la géographie... mais comment donc reconfigurer l'espace pour calmer les flux ? La passion contemporaine pour l'édification de murs témoigne de cette ambivalence jouant simultanément sur la fermeture et l'ouverture, entre un pouvoir de plus en plus virtuel et de grossières barrières physiques, barricades ou corridors. À l'heure du « village planétaire », pensez donc ! Mais le village n'a-t-il pas toujours été dominé par l'isolement et la surveillance ?
Avec la crise de l'espace réel se profile le risque de l'enfermement des hommes sur une planète désormais réduite à rien. D'où cette irrépressible pulsion littoraliste qui caractérise notre modernité depuis plus d'un siècle et ne fait désormais que s'accentuer.
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Créé à Caen par un groupe d'anciens étudiants, la revue L'Anti-mythes s'est particulièrement intéressée à l'histoire de Socialisme ou barbarie et a organisé des entretiens avec quelques-uns de ses membres qui lui paraissaient avoir été différemment représentatifs de ce mouvement : Cornelius Castoriadis, Claude Lefort, DanielMothé et Henri Simon.
L'Anti-mythes a également publié ce long entretien avec Pierre Clastres, qui, au cours des années, est devenu une référence. À force de reproductions libres le texte original a subi des distorsions étranges et variées. Nous le restituons ici tel qu'il fut donné par P. Clastres à la revue. Son aspect direct, parlé, fut une volonté de P. Clastres qui, pour ne pas l'ébrécher, ne l'a relu qu'une fois publié.
Il ne fit, à notre connaissance, aucune remarque sur sa transcription.
Par sa simplicité d'exposé sans concession sur le fond, l'Entretien avec L'Antimythes constitue une porte d'accès déterminante à l'oeuvre de l'ethnologue.
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Les passages Blanqui Walter Benjamin entre mélancolie et révolution
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- 1 Juin 2013
- 9782845342064
«Lorsque je rééditai, il y a quelques années déjà, en collaboration avec Valentin Pelosse, des textes de Blanqui devenus rares, Instructions pour une prise d'armes ; L'Éternité par les astres (Sens&Tonka, Paris, 2000), je tentai de lire et d'interpréter la geste révolutionnaire d'Auguste Blanqui en m'aidant de Walter Benjamin; nous eûmes ainsi recours à un « collage » de citations en regard du texte des Instructions pour une prise d'armes et nous décidâmes d'insérer dans cet ensemble les thèses de Benjamin, Sur le concept d'histoire.
Plutôt que d'une décision arbitraire, il s'agissait de la reconnaissance d'une dette. Benjamin, en effet, notamment dans le texte Paris capitale du XIXe siècle (1935) apparaissait comme un «phare » dont les rayons permettaient de discerner les arrière-fonds philosophiques, cosmogoniques de la radicalité révolutionnaire de Blanqui et donc d'extraire celui que son biographe Gustave Geffroy nommait « l'Enfermé », à l'approche traditionnelle, trop exclusivement politique.
C'est dans la direction inverse que j'aimerais maintenant avancer :
Non plus redécouvrir le visage de Blanqui grâce au regard attentif de Benjamin, mais percevoir ce qui dans l'oeuvre de Benjamin est en rapport avec la présence soudain insistante de Blanqui. Ou plutôt, il s'agirait de repérer, de rouvrir, de parcourir les «Passages » qui vont de Blanqui à Benjamin, de s'attacher aux mouvements et aux arrêts qu'y effectue Benjamin. Bref, les «Passages Blanqui », les Passages ouverts, percés par Blanqui dans l'oeuvre de Benjamin :
- Quels sont les objets que le choc de cette rencontre a révélés ?
- Quelle puissance d'éveil accorder à l'image de l'Enfermé ?
Quelles sont les pistes neuves, renouvelées ou entrecroisées sur lesquelles cette image a lancé Benjamin?
- Quels sont les enjeux qui se sont constitués, noués, quelles sont les affinités électives qui se sont instaurées transversalement dans l'heur de cette rencontre ? » (M. A.) Par ce texte nous poursuivons le travail éditorial que nous avons engagé avec le philosophe Miguel Abensour. Ce texte se situe, dans sa pensée, au carrefour de sa réflexion sur l'utopie (ou l'utopique), la servitude volontaire, la théorie du héros et la pensée de l'émancipation : Comment devient-on réellement libre ?
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Surréalisme et situationnistes au rendez-vous des avant-gardes
Louis Janover
- Sens Et Tonka
- 1 Novembre 2013
- 9782845342279
La chronologie n'assigne pas seulement aux avant-gardes leur place dans l'Histoire ; elle les classe d'emblée par ordre d'importance. Il en est de même pour leurs substituts contemporains.
L'Internationale situationniste succède au surréalisme et le mouvement de Debord hérite d'une partie du mouvement de Breton et se déleste de l'autre pour repartir de l'avant. Mais vers quoi ?
La Révolution surréaliste n'avait nul besoin d'affirmer l'unité du « changer la vie » et du « transformer le monde » puisqu'elle en était l'expression. Le surréalisme artistique introduit la division au profit d'un « changer la vie » qui finit par se confondre avec les changements dans l'art. Avec les situationnistes, la volonté d'unité est dépassée par le recours au « tout subversif », à la révolte considérée comme le dernier des Beaux-Arts.
C'est cette part irréductible de la Révolution surréaliste, l'exigence d'une utopie critique et poétique, occultée par les situationnistes, par les héritiers et les historiographes qui est mise ici en lumière et se retrouve alors devant nous : à travers cette promesse d'avenir perce une voix qui entre en résonance avec les questions de notre temps, au rendez-vous des amis, alors que l'Internationale situationniste, qui a dépassé tous les temps, se trouve reléguée loin derrière, au rendez-vous des avant-gardes.
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Utopiques Tome 4 ; l'histoire de l'utopie et le destin de sa critique
Miguel Abensour
- Sens Et Tonka
- 7 Mars 2016
- 9782845342620
Le texte de Miguel Abensour, écrit et publié au début des années 1970, correspond bien à l'esprit de l'époque qui ne redoutait pas de remettre en question ce qui, d'un avis général, ne faisait pas question. Désireux de penser l'utopie à nouveaux frais - ce qu'il n'a pas cessé de faire depuis - l'auteur de cet essai novateur isole un obstacle majeur à une nouvelle pensée de l'utopie, à savoir la critique marxiste de l'utopie au nom de la science. Il perçoit dans cette formation critique un énoncé dominant qui a pour fonction d'exclure tout énoncé en rupture. De là son travail qui, par un patient retour aux situations énonciatrices, vise à élaborer un autre modèle d'interprétation, un autre paradigme que celui issu de la critique marxiste classique de l'utopie. À suivre M. Abensour, la véritable matrice critique marxienne n'est pas le couple antinomique de l'utopie et de la science - ce qui est la position d'Auguste Comte le fondateur du positivisme - mais bien plutôt l'opposition découverte en 1843 entre la révolution partielle et la révolution totale. La « faiblesse » de l'utopie serait non pas son excès, mais son appartenance à la sphère de la révolution partielle. Si l'on ajoute à cela que Karl Marx pratique une inversion de la critique bourgeoise de l'utopie, il apparaît que l'auteur des Manuscrits de 1844 invite de façon décisive à distinguer entre les utopies qui ne sont que « l'ombre portée de la société présente » (Proudhon) et les utopies à beaucoup d'égards révolutionnaires qui sont « des expressions imaginatives d'un monde nouveau » (Fourier, Owen ).
S'opposant également à la thèse selon laquelle l'utopie s'éteindrait en 1848, M. Abensour s'emploie à discerner trois formes de l'utopie : le socialisme utopique, le néo-utopies et ce qu'il appelle le nouvel esprit utopique qui persiste après 1848 jusqu'à nos jours.
Dans la seconde partie, il s'agit - au-delà de la restitution des conditions d'énonciation - de dévoiler , en sachant mettre en lumière la traversée du mouvement jeune-hégélien de gauche, la trajectoire du geste marxien de sauvetage de l'utopie, à savoir la transformation de la question statique de la propriété privée en celle, historique, du rapport du travail aliéné à la marche du développement de l'humanité. Marx n'est donc pas le fossoyeur de l'utopie et ce d'autant moins qu'il a su effectuer une transcroissance de l'utopie au communisme critique. De cette démarche, il ressort qu'il existe un noyau insécable d'utopie dans l'oeuvre de Marx, qui est bien plus le penseur du communisme critique que celui d'un socialisme dit scientifique. Il ne faut pas se méprendre sur la critique marxienne de l'utopie ; loin d'être purement destructrice, elle est cathartique - salvatrice, c'est- à-dire que la critique de l'utopie ne saurait se dissocier de son sauvetage, mieux encore, la critique de l'utopie est la voie privilégiée qui mène à son sauvetage.
Nous assistons, contre toute attente, à un renouveau de l'utopie, ce qui donne à la pensée du nouvel esprit utopique de M. Abensour tout son sens et toute son actualité.
Comme l'écrit Adorno : « On ne jette pas le bébé avec l'eau du bain ».